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À Trappes, le match de football le plus extraordinaire de l’année

TRAPPES-Jean-Etienne-Rime

Un match de foot opposant l’équipe de la mosquée à celle de la paroisse a eu lieu le 1er juin 2024 à Trappes.

Jean-Étienne Rime - publié le 06/06/24
Quand les joueurs de la paroisse de Trappes affrontent ceux de la mosquée, c’est le match le plus extraordinaire de l’année qui se déroule sous vos yeux. Notre chroniqueur, coordinateur de la Fraternité missionnaire des cités, raconte l’événement qui a eu lieu le 1er juin et qui restera pour beaucoup un moment fort vécu par la population réunie par le sport.

Le match le plus extraordinaire se jouera-t-il lors de l’Euro 24 ou aux Jeux Olympiques ? Non, le match le plus extraordinaire de l’année s’est déjà déroulé le samedi 1er juin dernier sur le stade de Trappes (Yvelines) et il a opposé l’équipe de la mosquée à celle de la paroisse. Une réussite formidable, un enthousiasme partagé et la ferme volonté de recommencer. Cette initiative est un symbole vivant de paix dans une ville populaire marquée par beaucoup de faiblesses, de difficultés et d’incertitudes sur l’avenir des jeunes.

Tout le monde s’est entraîné

L’idée est ancienne et n’avait jamais vu le jour. Il a fallu les Jeux olympiques pour donner un coup d’accélérateur aux deux initiateurs, l’imam et le curé de Trappes. Les épreuves olympiques qui se dérouleront dans les Yvelines, trop coûteuses, seront difficilement accessibles aux habitants alors qu’elles portent initialement une volonté de paix par le sport voulue par Coubertin et le dominicain Henri Didon, autre inspirateur des Jeux modernes. L’idée de vivre ensemble ces valeurs a germé dans les esprit des religieux et s’est concrétisé avec un match football.

Il fallait trouver un stade, un appel au maire qui a répondu avec enthousiasme et officialise dans les secondes qui suivent, par SMS, la mise à disposition d’un stade. Il fallait aussi trouver un arbitrage vraiment impartial et neutre, une arbitre officielle de la FFF : une femme très professionnelle et souriante à la fois s’est bénévolement proposée. Ensuite, chacun devait constituer une équipe et tous les volontaires ont été acceptés, chacune comportant environ 25 joueurs, ce qui a permis de faire entrer sur le terrain un maximum de jeunes ou moins jeunes. L’imam et le curé ont enfilé le maillot, ils ont joué avec ardeur, comme tous. Tout le monde s’est entraîné et la paroisse a même constitué une équipe officielle qui porte le nom de FC Saint-Georges. Le père Étienne Guillet nous dit qu’il espère, avec autant d’humour que de conviction, qu’elle sera en Ligue 1 dans quelques années ! 

Le résultat le plus important

Ce 1er juin, il pleuvait des cordes quand le maire a sifflé le coup d’envoi, et la confrontation a débuté sous les encouragements d’une foule nombreuse, digne des grands supporters. On avait bien la crainte de débordements et les plus petits disaient avant le match : "Si c’est mal arbitré, on va se battre dans les tribunes !"… mais l’arbitrage a été parfait, on riait ensemble, on s’encourageait les uns les autres. De son côté, la préfecture, craignant aussi des débordements, avait dépêché des CRS qui ne sont intervenus que pour encourager et commenter le match. On les entendait dire : "La défense n’est pas bonne ou ce petit, il ira loin…"

Score du match, 3-2 pour le FC Saint-Georges mais le résultat le plus important était celui de l’amitié et de la joie. Les jeunes joueurs de l’équipe adverse sont venus dans le vestiaire féliciter les vainqueurs, tous se sont retrouvés autour d’un apéro géant dans une ambiance franchement amicale, et l’on s’est quitté en se promettant une revanche l’année prochaine.

Au-delà du sport, cet événement a marqué les esprits et les cœurs par ce moment de paix et de rencontre qui a dépassé les fragilités d’une ville difficile, tendue, incertaine.

Au-delà du sport, cet événement a marqué les esprits et les cœurs par ce moment de paix et de rencontre qui a dépassé les fragilités d’une ville difficile, tendue, incertaine. Cette paix est voulue par les décideurs, maire, curé, imam qui ont l’habitude d’échanger et de promouvoir tout ce qui peut apaiser. Pour aller plus loin, ils ont confié cette responsabilité et ce message à tous, joueurs, spectateurs, familles venues sur ce stade vivre une joie. Le match restera pour beaucoup un souvenir d’un moment vécu par la population réunie par le sport. C’est plus qu’une injonction des responsables dans la cité à vivre dans la paix, c’est tout simplement un moment de convivialité, de rencontres, d’échanges partagés par tous, par ceux qui au quotidien se retrouvent dans les rues de Trappes, dans les cours d’immeubles et dans les boutiques.

Les musulmans de Trappes avaient eu cette idée qui est restée longtemps en attente et s’est enfin réalisée. Tous ont apprécié la simplicité et les relations joyeuses qui se sont tissées. Les catholiques de la paroisse Saint-Georges partagent cet enthousiasme et le père Étienne Guillet, dans son homélie dominicale, n’a pas manqué de dire qu’au-delà de l’enjeu sportif, celui du Royaume de Dieu passait par la paix, la rencontre, la joie de vivre ensemble dans l’amour du prochain. Et si d’autres quartiers populaires se lançaient dans cette belle aventure ? À Sarcelles, plus de 1.000 jeunes se sont retrouvés sur un stade, d’autres matchs ont eu lieu ou sont programmés : une façon différente de parler des cités et des quartiers populaires autour de l’entente, de l’échange et de la paix.

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