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Pourquoi Netflix s’intéresse à ce prêtre polonais

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© IMDb

Dawid Ogrodnik est le père Jan Kaczkowski dans le film "Johnny", de Daniel Jaroszek.

Anne-Sophie Retailleau - publié le 03/06/23

Fondateur d’un centre de soins palliatifs d’avant-garde et bioéthicien, le père Jan Kaczkowski a fait de la défense de la dignité des personnes en fin de vie le combat de la sienne, jusqu’à sa mort en 2016. Très connue en Pologne, son histoire a inspiré un film actuellement disponible sur Netflix.

Son histoire a touché des millions de personnes. Bien avant son décès en 2016, le père Jan Kaczkowski était déjà une figure bien connue des Polonais. Réputé pour sa verve et son empathie, ce jeune prêtre s’est engagé pour défendre la dignité des malades en phase terminale. Sa vie a fait l’objet d’un film, “Johnny”, disponible sur Netflix depuis le 23 mars. Drôle et émouvant, ce long-métrage retrace l’engagement du père Jan pour les mourants, à travers les yeux d’un jeune drogué que le prêtre décide de prendre sous son aile. 

Rien ne prédestinait le père Jan à devenir l’un des plus célèbres défenseurs de soins palliatifs en Pologne. Handicapé de naissance, le jeune Jan souffre d’une lourde déficience visuelle et se déplace difficilement. Ordonné prêtre en 2002, sa hiérarchie refuse de lui confier une charge de catéchiste, jugeant son état de santé incompatible. Il devient alors aumônier de l’hôpital local de la ville de Puck, où il découvre l’ampleur du manque de moyens dans les services de soins palliatifs. Et les drames qui s’y vivent. “Une partie du service interne de l’hôpital qui se chargeait des soins palliatifs dans de mauvaises conditions a été supprimée, témoigne-t-il. J’y étais aumônier et j’allais aussi de maison en maison visiter les malades, comme n’importe quel prêtre. J’ai vu des gens souffrir à l’agonie en mourant d’un cancer. Il n’était pas nécessaire d’être Napoléon pour comprendre qu’il fallait faire quelque chose.” 

Directeur d’un centre de soins palliatifs

Frappé par l’expérience de ses visites auprès des mourants, le père Jan se lance dans le projet qu’il considère comme l’œuvre de sa vie: construire un centre de soins palliatifs de pointe. L’hospice Saint Padre Pio accueille ses premiers patients en 2009. Le père Jan, qui a obtenu entre-temps un doctorat en bioéthique, dirige le centre. Il assiste les malades, accompagne les mourants et leurs familles et administre les Sacrements. Si le père Jan décide très tôt de se consacrer à la défense de la dignité des personnes en fin de vie, c’est qu’il montre une sensibilité particulière pour les plus faibles, ceux qui sont laissés pour compte. 

Le sens de mon sacerdoce, le sens de ma vie, c’est de célébrer le Saint sacrifice et d’être avec les mourants.

Mais il restait une dernière étape pour en faire pleinement la cause de sa vie, pour aller jusqu’au don total à l’image de Celui qu’il voulait suivre. En juin 2012, le père Jan apprend qu’il est atteint d’un glioblastome cérébral. Il se bat déjà contre un cancer du rein, mais cette nouvelle tumeur est incurable. Il vit son diagnostic comme une libération, qui lui donne la force de surmonter ses doutes. “Je n’ai plus peur de rien, affirme-t-il dans une homélie. Je suis libre. Merci mon crabe (cancer, ndlr), de m’avoir libéré de mes nombreuses peurs”. 

Malade, le père Jan ne cesse pas ses activités au centre de soins palliatifs. Tourmenté à l’idée que le centre Saint Padre Pio ne s’effondre après son départ, il se lance dans une vaste campagne pour attirer les dons: livres, conférences, vidéos sur Internet… Très vite, le père Jan est invité sur les plateaux de télévision et les ondes radio de toute la Pologne. Il devient un visage familier des Polonais. Diminué par la maladie et le handicap, il apparaît pourtant débordant d’énergie et fait preuve d’une détermination désarmante. 

Fermement opposé à l’euthanasie comme à l’acharnement thérapeutique, le père Jan est convaincu que le respect de la dignité des malades en fin de vie passe par une éducation à la mort. Changer le regard sur la mort, des malades eux-mêmes, de leur famille, mais aussi des soignants. Le jeune prêtre décide de mettre en place des formations pratiques ouvertes aux étudiants en médecine au centre Saint Padre Pio. Apprendre ce qu’il faut dire et ne pas dire à un mourant, mieux connaître ses besoins physiques et psychiques, sans oublier l’attention à ses besoins spirituels. 

Pour bien mourir, il faut vivre

Apprendre à bien mourir, c’est d’abord apprendre à vivre. Pour aider les malades et leurs familles, le père Jan va jusqu’à publier un “manuel de la maladie”. Il y donne des conseils pour continuer à vivre malgré la maladie, et comment accompagner une personne malade. Sans angélisme, il cherche à convaincre que la vie d’un malade en fin de vie peut être intense et pleine de sens: 

“Je ne ferai pas de magie : une maladie grave vous oblige généralement à réorganiser complètement votre propre vie et, dans une large mesure, nos proches, mais elle vous donne aussi quelque chose en retour. Nous qui étions censés mourir il y a longtemps, et qui grâce aux efforts de la médecine, sommes encore en vie, nous sommes une surprise pour les autres et pour nous-mêmes. Cela nous donne la juste distance au monde et à nous-mêmes – c’est un grande force pour vivre dans la maladie, pour approfondir la proximité avec ceux que nous aimons, et pour accepter notre propre… mourir.”

“Je suis malade avec Lui”

Pour le père Jan, la clé du bien vivre comme du bien mourir se situe dans la qualité de la relation avec les autres. Et surtout avec l’Autre. “Le sens de mon sacerdoce, le sens de ma vie, c’est de célébrer le Saint sacrifice et d’être avec les mourants”, écrit-il. Le jeune prêtre, qui voue une profonde dévotion à l’Eucharistie, vit sa maladie comme une participation au Salut, en communion avec les souffrances du Christ. “Je suis malade avec Lui”, répète-t-il souvent. “Puisque Dieu est si incroyablement proche de l’homme, il est absurde de le blâmer pour le mal qui s’abat sur nous ou sur le monde, note-t-il dans un autre ouvrage.  Ainsi, lorsque je découvre que je suis en phase terminale, Il éprouve de la peur et du désespoir en moi et avec moi – Christ Lui-même, pour ainsi dire, est malade avec moi. Et il est tout aussi vulnérable que moi dans cette situation.”

Souffrir avec le Christ, pour s’offrir aux autres. Jusqu’au bout, le père Jan continue d’accompagner les mourants de Saint Padre Pio. Il s’éteint dans sa maison familiale le lendemain de Pâques en 2016, à l’âge de 38 ans. Par sa vie donnée pour défendre la dignité des plus fragiles, le père Jan offre un précieux témoignage pour notre époque marquée par la tentation de l’euthanasie.

Pratique

“Johnny”, de Daniel jaroszek, avec Dawid Ogrodnik et Piotr Trojan, disponible sur Netflix depuis le 23 mars, en version originale sous-titrée ou en français.

Tags:
EuthanasieMaladiePrêtre
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