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L’âge du mâle, une faute morale grave

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Serge Tenani / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Frédéric Beigbeder.

Henri Quantin - publié le 12/04/23

Le mâle blanc de plus de 50 ans a le grand tort d’avoir plus de 50 ans. Heureusement, son âge change souvent, observe l’écrivain Henri Quantin, ce qui lui vaudra de disparaître un jour. À moins qu’il ne décide de changer d’âge pour échapper à la faute morale grave de sa date de naissance ?

La sortie récente du livre de Frédéric Beigbeder, Confessions d’un hétérosexuel légèrement dépassé (Albin Michel), a mis une fois de plus sur le devant la scène ou du prétoire “le mâle blanc hétérosexuel de plus de 50 ans”. Critiquer ce coupable idéal, affirme Beigbeder, “c’est être raciste quatre fois”. L’auteur entend rappeler une chose simple : il n’a “pas choisi d’être un homme, ni d’être blanc, ni de désirer les femmes, ni de naître en 1965”. Ce quadruple racisme est devenu presque ordinaire, au point que le jeu de mots qui assimile le mâle au mal est en passe de se transformer lui-même en cliché. Philippe Muray fut sans doute le premier à dénoncer par l’ironie la théorie de “l’axe du mâle” et on ne sait s’il faut surtout admirer l’acuité de la prophétie ou désespérer devant la rapidité de son accomplissement.

Une question semble toutefois restée inaperçue : l’âge de la culpabilité du mâle blanc hétérosexuel est-il définitivement fixé à 50 ans ou est-il susceptible d’évoluer ? Autrement dit, si 50 ans était l’âge du péché sans rémission quand l’expression s’est diffusée — mettons il y a dix ans —, est-ce toujours à 50 ans qu’on est bon pour le pilori ou bien le coupable est-il désormais le mâle de 60 ans ?  Sauf exception, le mâle blanc hétérosexuel l’est pour la vie — c’est même ça qu’on lui reproche — mais l’âge d’un être, ce n’est un secret pour personne, change souvent. Si l’homme était déclaré coupable le jour de ses 50 ans en 2013, l’est-il seulement pour son soixantième anniversaire en 2023 ?

La question est moins anecdotique qu’il n’y paraît, pas seulement pour l’auteur de ces lignes, qui confesse volontiers être personnellement concerné par la réponse. Si l’âge de la culpabilité masculine passait progressivement de 50 à 60 ans, puis de 70 à 80 ans, cela signifierait deux choses : d’une part que l’homme accusé est avant tout le produit de son temps (en gros, enfant des Trente Glorieuses et de la supposée domination masculine traditionnelle) ; d’autre part que le monde meilleur de l’indifférenciation qu’on nous promet progresse. Dans cette logique, les hommes de 50 ans seront peu à peu nés dans l’ère nouvelle, auront été rééduqués à temps et battront leur coulpe bien avant l’âge mûr. Les mâles blancs hétérosexuels, quel que soit leur âge, ne constitueront donc plus qu’une espèce en voie de disparition, comme les anciens combattants honteux d’une guerre ignoble. L’étiquette infamante disparaîtra avec eux. Difficile de faire du “mâle blanc hétérosexuel de plus de 105 ans” une menace redoutable.

Dans ce faux paradis du narcissisme autoritaire, le changement d’âge pourrait se faire dans les deux sens.

L’autre hypothèse est qu’avoir plus de 50 ans sera encore une faute impardonnable dans quarante ans et que l’accusation est un produit renouvelable à chaque génération, indépendamment de l’éducation ou de l’endoctrinement reçu de la société. Dénoncer le mâle de plus de 50 ans ne serait alors qu’une variante du jeunisme triomphant, racisme anti-vieux ou logique euthanasique anticipant la date de péremption.

Narcissisme autoritaire

Florence Foresti, dans son dernier spectacle Boys, boys, boys, a proposé une solution joliment moqueuse : contre ceux qui décident d’être “non-genrés”, elle a décidé d’être “non-âgée”, passant par la magie du verbe de 49 à 32 ans. Est-ce parce qu’elle perçoit que ses 50 ans imminents, même pour une femme, relèvent plus encore de la faute morale grave que du déclin physique ? Quoi qu’il en soit, son pied de nez ou son bras d’honneur aux chasseurs de quinquagénaires est habilement formulé. Car si chacun peut décider de s’auto-engendrer par sa seule volonté, en niant tout ce qui l’ancre dans un corps et dans une histoire, on voit mal pourquoi le mâle blanc ne pourrait pas exiger que l’état civil modifie sa date de naissance : comme un homme se sentant femme ou parfois pris pour une femme, le quinquagénaire peut toujours arguer qu’il se sent plus jeune que son âge ou que beaucoup se trompent sur le nombre de ses années.

Bien sûr, dans ce faux paradis du narcissisme autoritaire, le changement d’âge pourrait se faire dans les deux sens : les lycéens pourraient décréter qu’ils ont l’âge de la retraite, même s’ils n’ont pas redoublé cinquante fois leur Seconde. Ceux d’entre eux qui ont bloqué leur lycée avec des pancartes “65 ans, non merci” avaient, de fait, des allures de vieillards précoces, fatigués par la vie avant même d’avoir essayé de la vivre. On ne s’étonne pas que, même pour le suicide, certains exigent de plus en plus tôt d’être des “assistés”.

Conclurons-nous banalement que la jeunesse d’esprit, de même que la culpabilité, n’a guère à voir avec la date de naissance ? Cela aurait au moins le mérite de rappeler que si “la valeur n’attend pas le nombre des années”, il en va de même pour la capacité à nuire. Car, on ne le rappellera jamais assez, ce sont les jeunes imbéciles qui font les vieux cons.

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