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Séisme en Syrie : “Le temps est notre pire ennemi”

Enfants rescapés du séisme dans un refuge à Jindayris, le 9 février 2023

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Cécile Séveirac - publié le 09/02/23
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Présente en Syrie depuis 2015, l’ONG chrétienne Medair est en première ligne pour fournir une aide d’urgence aux rescapés du séisme du 6 février. Pour Reija-Liisa Schmidt-Teigen, directrice de l’ONG à Damas, "la population manque de tout, de vivres, d’habits et d’eau potable". Entretien.

Plus de 3.000 morts en Syrie et 14.000 en Turquie : de jour en jour, les chiffres augmentent. Frappés par un séisme de magnitude 7.8 dans la nuit du 6 février, les deux pays vivent un véritable cauchemar. L'ONG Medair est présente en Syrie depuis 2015. À Damas, Reija-Liisa Schmidt-Teigen coordonne l’aide humanitaire d’urgence pour les rescapés qui ont survécu au tremblement de terre. Pour celle-ci, la population syrienne fait face à de nombreux défis : accès à l’eau potable, inflation, promiscuité… Entretien. 

Aleteia : Comment décririez-vous la situation à Alep et dans les villes de Syrie touchées par le séisme ?
Reija-Liisa Schmidt-Teigen : La situation est terrible pour les Syriens. À Alep, nous avons beaucoup de familles qui sont dans des refuges et des centres d’accueil mais les conditions de vie sont précaires. Tout le monde est agglutiné au même endroit, les gens n’ont aucune intimité, ils dorment les uns à côté des autres, pour ne pas dire les uns sur les autres. La population manque de tout, de vivres, d’habits et même d’eau potable. L’accès à celle-ci est devenu un véritable enjeu pour nous, les réservoirs ont été détruits. Nous travaillons donc à trouver des solutions avec le gouvernement syrien pour faire parvenir de l’eau potable jusqu’aux zones sinistrées le plus rapidement possible.

Comment cela se passe-t-il du côté des zones rebelles ? 
Les zones non gouvernementales reçoivent de l’aide humanitaire, mais elle est plus mince. Medair n’est enregistrée que dans la zone gouvernementale, ce sont d'autres associations, ONG et acteurs qui sont sur place et font le maximum pour aider la population des villes concernées. 

Ce séisme est une crise qui s’ajoute à toutes les crises précédentes. Les Syriens sont épuisés. 

Quels défis principaux rencontrez-vous sur place dans votre mission ? 
La difficulté majeure, c’est l’inflation. On constate depuis plusieurs années une augmentation fulgurante des prix, ce qui rend toute intervention extrêmement coûteuse si l’on souhaite se fournir en biens et en vivres sur le marché syrien. Reste la solution de l’importation. Mais là aussi, c'est assez complexe car tout prend un temps phénoménal : il faut une approbation administrative pour chaque démarche. C’est sûrement le temps, ici, qui est notre pire ennemi. 

Quelles sont les priorités à court et à moyen termes pour aider la Syrie à se relever de la catastrophe ? 
Nous essayons de procéder étape par étape. Le premier pallier à compléter, c’est l’aide d’urgence, c’est-à-dire la fourniture de produits de première nécessité. Nous voulons essayer de trouver des solutions rapides pour permettre aux gens de retrouver une intimité, d’avoir chaud en plein hiver, de manger à leur faim et d’avoir accès à de l’eau potable. Cependant, il faut évidemment réfléchir dès maintenant à des solutions pour l’après : permettre aux enfants de retourner à l’école, aux parents de travailler à nouveau… mais cela prendra du temps car ce séisme est une crise qui s’ajoute à toutes les crises précédentes. Les Syriens sont épuisés. 

Les Syriens ont-ils perdu tout espoir ? 
C’est compliqué à dire. Pour le moment, je dirai que tout le monde se sent désespéré. Beaucoup ont perdu des proches, d’autres cherchent encore les leurs parmi les décombres et restent parfois plusieurs heures sans connaître leur sort. Malgré tout, je pense pouvoir dire que le peuple syrien est résilient. Il fera face, mais c’est aussi à nous de leur redonner espoir et de les aider à traverser ce traumatisme. Il y a sûrement de l’espoir qui subsiste, mais en tant qu’ONG nous devons nous demander comment aider ces gens à le garder, à ne pas le laisser sombrer.

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