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La beauté de Noël selon Christian Bobin

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Aurimages via AFP

Henri Quantin - publié le 21/12/22

L’écrivain Henri Quantin se souvient des mots de Christian Bobin sur la beauté de Noël. Comme un ami, le poète évoque ce "quelque chose" entre la beauté d’une attente et la beauté d’un souvenir, la beauté d’une rencontre "à voix basse"…

Il y a des écrivains qu’on lit et relit si souvent qu’on s’imagine être leur ami. Parce qu’on les a élus, on se plaît à croire que l’affinité est réciproque et qu’ils nous comptent parmi leurs happy few. Tel est l’effet d’un long compagnonnage avec des œuvres qui orientent votre regard, pétrissent votre chair et habitent vos paroles. D’autres écrivains sont plutôt des rencontres de passage. On les a croisés un jour fugitivement, au gré d’une page ouverte presque au hasard ou d’un livre prêté par quelqu’un qui rêvait de vous faire partager sa passion. Que vous n’ayez pas donné suite à cette brève rencontre n’empêche pas qu’elle puisse vous avoir marqué. Une phrase lointaine revient, alors que vous ne l’aviez lue qu’une fois vingt ans plus tôt. S’il s’agit d’un écrivain vivant, sa mort peut avoir cet étrange effet de résurrection intérieure de quelques-uns de ses mots, que votre mémoire intime, à votre propre étonnement, n’a pas effacés.

L’appel est toujours présent

Ainsi, une phrase de L’homme qui marche de Christian Bobin est remontée intacte d’un passé enfoui : “Quelque chose avant sa venue le pressent. Quelque chose après sa venue se souvient de lui. La beauté sur la terre est ce quelque chose.” Manière discrète de dire que Noël scinde l’histoire des hommes en deux, mais que le Christ, cet “homme qui marche”, unit l’avant et l’après, comme l’écho de “sa venue” unit les deux phrases mieux que toute coordination. “Quelque chose”, se contente de répéter Bobin, au seuil et à la clôture de son aphorisme. Humilité du poète qui refuse la saisie de la définition qui enclot. Qu’elle soit pressentiment ou mémoire, la beauté est trop fragile pour qu’on puisse s’en emparer sans la faire fuir, trop fugace pour qu’on puisse la figer sans la détruire. 

L’appel est toujours présent, et c’est pour cela qu’il peut continuer à unir un avant et un après.

La beauté d’une attente et la beauté d’un souvenir, toutefois, ne serait rien sans la réalité d’une présence et d’une rencontre. Bobin ne l’oublie pas quand il écrit : “Telle est la figure du plus grand roi d’humanité, du seul souverain qui ait jamais appelé ses sujets un à un, à voix basse de nourrice.” L’appel est toujours présent, et c’est pour cela qu’il peut continuer à unir un avant et un après.

Quelqu’un qui naît

Pourquoi le Christ de Bobin a-t-il “une voix basse de nourrice” ? Pour désigner la douceur de la parole divine et suggérer que le vrai enfant de la crèche est l’homme sur lequel Dieu se penche ? Peut-être aussi simplement parce que la nourrice nourrit… Entre quelque chose qui pressent et quelque chose qui se souvient, il y a Quelqu’un qui naît. Il naît pour être mangé. Le pressentiment de la beauté est aussi faim de Dieu.

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ecrivainLittératurenativiteNoël
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