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Comment cultiver le souvenir d’un défunt et se reconstruire ?

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Encierro / Shutterstock

Marzena Devoud - publié le 01/11/22

Douleur, chagrin, solitude… La mort d’un proche apporte son flot de bouleversements. Comment cultiver son souvenir de manière apaisée, et trouver le chemin pour se reconstruire ?

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Agnès, mère de deux enfants en bas âge, vient de perdre François, son mari. Une mort subite qui a bouleversé sa famille et ses amis. Dès que possible, Isabelle — une amie du couple —la seule a avoir cette initiative parmi ses proches, dîne avec elle pour parler de François. Toutes les deux, elles évoquent alors les souvenirs, elles reformulent leurs dernières conversations, partagent les mots ou les gestes qui les ont marquées au fil des années. Ces réminiscences, qui rappellent un homme cultivé et drôle, le rendent présent. Et Agnès semble s’animer dès qu’elle parle de François. « C’est vrai, cela me fait du bien de lui redonner vie et me redonner vie aussi pendant ces quelques heures », confie-t-elle à Aleteia. « Même si l’absence de François m’écrase de chagrin, c’est encore pire quand mes proches évitent d’en parler pour ne pas me faire mal. Paradoxalement, c’est le contraire qui se passe. »

Le deuil invisible

Presque chacun a une relation personnelle avec un être cher disparu. Presque chacun a été témoin un jour du malaise provoqué par son propre deuil ou celui dans son cercle familial ou amical. Souvent, dès qu’il est question d’évoquer la personne défunte, la plupart des gens prend la fuite. Le deuil est devenu invisible. On n’arbore plus aucun signe montrant qu’on a perdu un être cher. Autrefois, la tradition proposait qu’on porte du noir, puis du violet, enfin un petit ruban noir : les autres étaient ainsi alertés. Aujourd’hui, rien ne doit laisser paraître.

Un héritage de valeurs et d’expériences

Pourtant, « il faut parler des défunts, les faire vivre via le souvenir, via la trace qu’ils ont laissé dans nos cœurs. Parfois, ils nous laissent avec des questions sans réponse. Leur disparition nous remue en profondeur, mais ne pas les évoquer serait pire », affirme Marie de Hennezel dans son ouvrage Vivre avec l’invisible (Robert Laffont). Il est alors essentiel de « continuer à faire exister sa pensée en nous ». Au-delà du chagrin, la vie d’un être que l’on a aimé laisse un héritage de valeurs et d’expériences. Dans le travail du deuil, reconnaître cet héritage permet de se reconstruire intérieurement.

Quand la douleur commence à être apaisée, penser à la personne défunte n’est plus une source d’abattement, mais plutôt de sérénité et de force de vie. 

Pour Christian de Cacqueray, auteur de Vivre en mortel (Salvator, 2021), les étapes du deuil sont nécessaires. Directeur du Service catholique des funérailles, il souligne qu’elles « permettent d’intérioriser ce qu’il y avait de meilleur dans le témoignage de vie et de foi » laissé par l’être disparu.

Bien sûr, le temps de la douleur est un temps où la personne en deuil n’est pas la même. Elle n’est pas dans la croissance, ni dans le rebond ni dans les projets… Mais au moment de la sortie du deuil, quand la douleur commence à être apaisée, penser à la personne défunte n’est plus une source d’abattement, mais plutôt de sérénité et de force de vie. Alors, la prise de conscience de la mort pourrait-elle enrichir la vie de celui qui reste ? « Oui. Car la mort d’un proche peut orienter la personne endeuillée dans une quête de sens », explique Christian de Cacqueray à Aleteia.

Au fil de ses centaines de rencontres avec des familles endeuillées, et de ses propres expériences et réflexions personnelles, il a acquis cette sagesse : « Si je me détourne de la conscience que tout ici est éphémère, je sombre dans une vie subie, sans relief et insatisfaite. Au contraire, si j’entre dans la dynamique vivifiante de la finitude terrestre, l’urgence des choix existentiels me met en marche. »

Aller sur la tombe pour faire le pèlerinage

Le vendredi 22 août 1997, le pape Jean Paul IIs’est rendu sur la tombe de son ami, le professeur Jérôme Lejeune, au cimetière de Châlo-Saint-Mars, dans l’Essonne. Dans le cadre de son programme « privé », il avait souhaité s’y recueillir et prier seul pendant une petite heure, suivie d’une rencontre avec la famille. « Cette image surprenante et rare : voir un souverain pontife prier tout seul sur la tombe d’un ami est une belle leçon de vie », remarque Christian de Cacqueray.

Prier et repenser à un proche défunt avec intensité, c’est faire une sorte de pèlerinage, un retour aux sources, une expérience spirituelle partagée entre l’ami disparu et l’autre endeuillé.

Contempler pour retrouver une lumière

Bernard, 75 ans, est veuf depuis quatre ans. Il a de la chance, sa maison de retraite est à une vingtaine de kilomètres du cimetière où se trouve la tombe d’Anne, son épouse. Il s’y rend tous les mois, toujours avec des fleurs. « Auprès de sa tombe, je ressens le désir de prier, je pense à nos conversations dont celles sur la foi qui était le ciment de notre couple face aux différentes épreuves. Mais j’aime aussi avoir d’autres rituels, comme aller me promener dans le parc que nous aimions tous les deux. C’est une sorte de contemplation à trois, Dieu, Anne et moi. Elle m’apporte beaucoup de joie profonde. Pour nos enfants, un autre rituel est important : refaire ses recettes culinaires à l’occasion de Noël. C’est assez merveilleux de pouvoir en parler en famille, notamment avec mes petits-enfants », confie-t-il encore à Aleteia.

« C’est comme l’image de la décalcomanie. Le papier s’en va, mais il reste une trace… La chair s’en va, mais dans le cœur il reste une lumière, une présence. Et il reste le meilleur, une mémoire bienveillante qui résonne de mille façons », explique Christian de Cacqueray.

Prier ensemble sur le chemin du Salut

« J’avais un lien très fort avec ma grand-mère maternelle. Elle reste comme un guide dans mon cœur. Je pense qu’elle m’a encouragé à épouser ma femme ! », raconte Christian de Cacqueray. « Ma grand-mère a toujours été très présente dans mon oraison quotidienne. C’est le sens même de la communion des saints. Dans notre coin prière familial, il y a les photos des proches que j’ai connus, dont ma grand-mère, comme aussi des ancêtres que je n’ai pas pu connaître. Comme Adrien, tué à l’âge de 22 ans pendant la Première Guerre mondiale. » Et de conclure : « Pouvoir transmettre son histoire à mes quatre enfants, contempler son visage est une forme de connexion à l’éternel. Prier avec tous ces proches défunts au quotidien, c’est avoir des partenaires sur le chemin du salut. »

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