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De Vatican II au processus synodal, Dieu conduit son peuple

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FOTOTECA ACI/CPP/CIRIC

11 octobre 1962 : Foule amassée sur la place Saint Pierre lors de la messe d'ouverture du Concile Vatican II.

Eric de Moulins-Beaufort - publié le 10/10/22

Le président des évêques de France voit un lien entre l’ouverture du concile Vatican II il y a soixante ans et l’entrée du processus synodal dans lequel l’Église est aujourd’hui engagée. Prendre au sérieux les voies tracées par le concile, c’est comprendre que l’enjeu du synode n’est pas d’adapter l’Église au monde de ce temps, mais de vérifier que nous sommes embarqués avec Jésus là où Dieu nous appelle.

Soixante années ne se célèbrent pas comme cinquante ou cent. Le concile Vatican II est à vivre. Il a tracé pour l’Église des voies à la fois “nouvelles et anciennes”, selon le sens authentique de la Tradition qui est un acte de transmission d’une vie à recevoir et à partager toujours à neuf et non une entreprise de conservation d’un passé qui ne peut que s’user. Ce qui correspond aujourd’hui à l’ouverture du concile naguère est le processus synodal dans lequel le pape François a fait entrer l’Église avec la forte détermination qui est la sienne. 

Rester prudents

En ce mois d’octobre 2022, l’Église catholique se prépare sur les cinq continents à entrer dans la phase continentale de ce processus. Déjà un processus synodal à l’échelle d’un pays était à peu près inédit en Europe. Vivre cela à l’échelle d’un continent n’a pas de précédent, sinon peut-être en Amérique latine où les rencontres régulières du Celam ont progressivement pris de l’importance, se révélant capables de proposer des orientations pastorales valant pour l’ensemble du sous-continent. Les synodes africains voulus par les papes Jean-Paul II puis Benoît XVI en ont été aussi des anticipations ou des préparations. À l’échelle de l’Europe, l’expérience n’a jamais eu lieu. À la fin de ce mois, une session de deux jours tenue grâce à des visioconférences réunira les présidents des conférences épiscopales d’Europe. Du 5 au 12 février, une session se tiendra à Prague selon des modalités mixtes ; pendant trois jours, des délégations de quatorze personnes choisies par chacune des conférences épiscopales se rencontreront, trois personnes étant physiquement présentes à Prague avec les présidents de conférence épiscopale, les dix autres participant par visioconférences ; trois jours ensuite permettront un travail des seuls présidents des conférences épiscopales et de quelques invités. 

Les récits de l’époque nous montrent que les participants de l’ouverture du concile étaient partagés entre l’émotion de prendre part à un événement de portée historique, de grandes attentes et un certain scepticisme. Personne en tout cas ne pouvait s’attendre à ce que le concile fut finalement.

Que peut-on attendre de cet événement ? Les récits de l’époque nous montrent que les participants de l’ouverture du concile étaient partagés entre l’émotion de prendre part à un événement de portée historique, de grandes attentes et un certain scepticisme. Personne en tout cas ne pouvait s’attendre à ce que le concile fut finalement. Voilà qui doit nous rendre bien prudents face au processus synodal maintenant lancé. La prévision quant à ce qui pourrait en sortir est compliquée par le chemin synodal allemand, lancé avec courage par les évêques et l’organisation des laïcs allemands mais dont les échos font rêver certains et remplissent les autres d’inquiétude. Les synthèses synodales venues des différents pays d’Europe font état de demandes assez parallèles (à moins qu’on ne les juge plutôt convergentes) et aussi des mêmes faiblesses, des parties entières du peuple de Dieu, notamment parmi les jeunes adultes ne s’étant guère exprimées. 

Ne pas confondre synode et concile

Deux faits paraissent certains. Le premier est qu’il ne sera plus possible de réfléchir à la vie de l’Église et à sa mission avec les seuls évêques, sans prendre le temps et les moyens non pas seulement d’entendre l’ensemble des fidèles du Christ mais aussi de travailler et de réfléchir avec eux tous. Déjà, en vue d’octobre 1962, de larges consultations des facultés de théologie, des évêques, des congrégations religieuses avaient été organisées. Le processus synodal en cours élargit cette consultation avec les moyens nouveaux dont l’humanité dispose. 

Le second est qu’il ne faut sans doute pas confondre synode et concile. Un concile est une réunion des évêques en tant que le collège des évêques succède au collège des apôtres pour déterminer ce qui maintient l’Église dans la fidélité à la foi apostolique. La fonction d’un concile est d’écarter ce qui ferait perdre l’inouï de l’œuvre de Dieu, de la “trop grande charité”, propter nimiam caritatem, dit saint Paul, qui veut s’engager lui-même dans le salut de l’humanité, prendre pour lui sans mentir la condition humaine, répandre sa sainteté à l’intime de la vie et des relations des êtres humains, les divinisant non de manière magique mais en les introduisant dans l’intensité des relations divines. Le discernement ultime en ces matières appartient aux évêques et la garantie qu’ils peuvent donner est celle de leur unanimité dans la confession de la foi. 

Le grand combat spirituel de Dieu et de l’humanité

Les conciles ont aussi eu pour tâche d’organiser concrètement la vie de l’Église en réglant un certain nombre de questions dites disciplinaires, c’est-à-dire en s’efforçant d’apporter une solution commune aux questions concrètes venant de la vie des hommes et de l’extension de l’Église à travers le temps et l’espace. Des modalités sont à imaginer pour combiner le travail avec tout le peuple de Dieu et le discernement des évêques. Le processus synodal et le synode des évêques qui le conclura en octobre 2023 ne sont précisément pas des conciles. 

Comme l’étymologie l’indique, le synode renvoie à une marche faite en commun. J’ai entendu récemment un cardinal facétieux faire remarquer que le mot “synode” intervenait une seule fois dans le Nouveau Testament : en saint Luc, au moment où Marie et Joseph cherchent Jésus adolescent qui n’est plus avec eux au retour de Jérusalem, “synode” désigne la caravane dans laquelle ils le pensaient embarqué. L’enjeu du synode n’est pas d’adapter l’Église au monde de ce temps, mais de vérifier qu’en ce temps aussi nous sommes embarqués avec Jésus, non pas là où nous pensons qu’il devrait être mais là où lui choisit d’être pour “être aux affaires de son Père”, lui qui, pauvre, chaste et obéissant, nous révèle une beauté et une force de la condition humaine à laquelle nous n’osons aspirer et à laquelle nous préférons nous dérober. 

Participation, communion, mission” : ce furent au bout du compte les mots du concile Vatican II ; soixante ans plus tard, bien des aveuglements levés et des naïvetés dépassées dans la douleur, il convient de définir les moyens concrets de les vivre en vérité.

Si l’on interprète le concile en termes triomphalistes, on peut être déçu par la situation soixante ans après. Mais si l’on prend au sérieux la manière dont le Concile exprime la nature et la mission de l’Église au service de l’œuvre de Dieu Créateur et Rédempteur, on peut comprendre que nous vivons un temps, douloureux et fascinant, du grand combat spirituel de Dieu qui appelle l’humanité à lui, et de l’humanité qui lui répond et lui résiste. “Participation, communion, mission” : ce furent au bout du compte les mots du concile Vatican II ; soixante ans plus tard, bien des aveuglements levés et des naïvetés dépassées dans la douleur, il convient de définir les moyens concrets de les vivre en vérité.

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