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Le jour où Jean Paul II a ordonné à des communistes de reconstruire un sanctuaire

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NOTRE DAME LA VANG

Hoang Dinh Nam | AFP

Marzena Devoud - publié le 20/06/22

Place Saint-Pierre, le 19 juin 1988, la canonisation de 117 martyrs du Vietnam par Jean Paul II a été une cérémonie sans précédent. Jamais autant de martyrs n’avaient été canonisés en même temps. Mais en plus, ce jour-là, il y a eu un quasi-miracle.

Ce 19 juin 1988, dès l’aube, des groupes de fidèles gagnent petit à petit la place Saint-Pierre  ensoleillée. Pas un nuage dans le ciel romain, pour cette belle matinée qui s’annonce historique : c’est en présence de milliers de Vietnamiens qui vivent en exil dans le monde entier que le pape Jean Paul II s’apprête, au cours d’une grande cérémonie, à canoniser 117 martyrs du Vietnam. Un évènement sans précédent : jamais autant de saints n’ont été canonisés le même jour. Depuis longtemps, le pape polonais tenait à rendre ainsi hommage de la façon la plus marquante possible, à cette époque, “à la fidélité au Christ des sept millions de chrétiens que compte actuellement l’Église au Vietnam.”

Mais la détermination du Saint Père ne va pas plaire du tout au gouvernement vietnamien communiste en place. À tel point que ses ambassadeurs vont tenter d’intimider les catholiques vietnamiens vivant aux quatre coins du monde de se rendre à Rome pour la cérémonie. Stefan Wilkanowicz, un intellectuel catholique polonais proche de Jean Paul II, alors membre du Conseil pontifical des laïcs, se souvient très bien des menaces à peine voilées, formulées par les services de l’ambassade du Vietnam en Pologne, à l’égard de son épouse vietnamienne invitée à Rome pour la cérémonie : “À quelques semaines de la canonisation des martyrs dont son ancêtre, Thérèse a reçu plusieurs coups de fil de la part de l’ambassade. On lui annonçait que si jamais elle allait participer à la cérémonie, sa famille restée au Vietnam en subirait des représailles. Nous savions très bien que cela signifiait : des mesures qui pouvaient être terribles… Finalement, je suis allé à Rome seul. Cet exemple, explique à Aleteia Stefan Wilkanowicz, montre le regain fort de tensions entre le Vatican et les autorités communistes, provoquées par l’annonce de ces canonisations.”

Le régime de Hanoï parlait d’une “attaque contre l’unité nationale”, il qualifiait les trois siècles de présence de l’Eglise catholique au Vietnam de “300 ans de collaboration avec le colonialisme”. Rien d’étonnant qu’aucun pèlerin n’a reçu l’autorisation de venir du Vietnam pour assister à la cérémonie.

La canonisation sous haute tension

Pourtant, face à ces tentatives d’intimidation, Jean Paul II va rester plus que déterminé à honorer les saints martyrs du Vietnam. Parmi eux, des religieux et laïcs vietnamiens ( 37 prêtres, 14 enseignants, un séminariste et 44 laïcs), comme des missionnaires français (deux évêques et huit prêtres des Missions étrangères de Paris) et espagnols (six évêques et cinq prêtres dominicains). Tous persécutés, torturés et morts pour leur foi entre 1745 et 1862.

Stratège, habitué au jeu de force entre l’Eglise et le régime totalitaire dont il a eu l’expérience en Pologne, Jean Paul II décide ce jour-là, de faire indirectement allusion aux critiques émanant des autorités vietnamiennes. Il affirme que les martyrs, tout en restant fidèles à leur foi, sont restés loyaux à leur pays. Il souligne également que l’Église du Vietnam a prouvé de nombreuses fois qu’elle voulait “s’intégrer et apporter fidèlement sa contribution à la construction véritable de la patrie.” Et il va aller encore plus loin, en reprenant et retournant l’argument de l’unité du pays utilisé par Hanoï.

En effet, ce 19 juin 1988, Jean Paul II va faire mémoire de La Vang, le plus grand sanctuaire marial du Vietnam en demandant fermement sa reconstruction “dans un climat de liberté et de paix, et de gratitude envers celle que toutes les générations disent bienheureuse. De sorte que ce sanctuaire puisse favoriser l’unité nationale et le progrès civil et moral du pays”. Cette demande, et le Pape le sait parfaitement bien, vise le cœur de la chrétienté au Vietnam.

Le sanctuaire La Vang et l’unité du pays

Son histoire commence en 1798. Pour échapper aux persécutions, des chrétiens étaient obligés de s’enfuir dans la jungle, à 60 km de Hué, la cité impériale située au centre du pays. C’est alors qu’a eu lieu une série d’apparitions de la Vierge : elle les réconfortait, en expliquant comment se soigner avec les plantes de la jungle. S’il s’agit d’une tradition orale, les pèlerinages sur le lieu des apparitions ont commencé aussitôt et ils seront ininterrompus pendant deux siècles.

LA VANG CHURCH
Le sanctuaire Notre-Dame-de-La-Vang, septembre 1967.

En 1886, une petite chapelle sera construite, quatre ans plus tard, une église érigée et bénie en présence de 12000 pèlerins. A cette occasion, Notre Dame de La Vang sera alors déclarée protectrice des catholiques du Vietnam. C’est en 1962 que Jean XXIII élèvera cette église au rang de basilique mineure. Mais hélas, elle sera détruite pendant la guerre, entre les années 1972-1975.

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Statue de Notre Dame de la Vang.

Le miracle porté par les martyrs canonisés

Connaissant la puissante dévotion des Vietnamiens à Notre Dame de La Vang et portée par la force de cette journée de canonisations si importantes pour l’Église du Vietnam, Jean Paul II décide d’adresser aux autorités communistes la demande de la reconstruction du sanctuaire. À la surprise de tous, les communistes acceptent !

Ainsi, le 15 août 1998, soit dix ans après la canonisation des 117 martyrs, pas moins de 70.000 fidèles ont pu prier ensemble à La Vang, pour le 200e anniversaire des apparitions de la Vierge. Depuis, de nombreux Vietnamiens visitent le sanctuaire marial au moins une fois dans leur vie, en particulier à l’occasion du 15 août, le jour de la solennité de l’Assomption. Un vrai miracle, porté par les martyrs canonisés et les fidèles rassemblés place Saint-Pierre ce 19 juin 1988…

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