Place Saint-Pierre, le 19 juin 1988, la canonisation de 117 martyrs du Vietnam par Jean Paul II a été une cérémonie sans précédent. Jamais autant de martyrs n’avaient été canonisés en même temps. Mais en plus, ce jour-là, il y a eu un quasi-miracle.
Ce 19 juin 1988, dès l’aube, des groupes de fidèles gagnent petit à petit la place Saint-Pierre ensoleillée. Pas un nuage dans le ciel romain, pour cette belle matinée qui s’annonce historique : c’est en présence de milliers de Vietnamiens qui vivent en exil dans le monde entier que le pape Jean Paul II s’apprête, au cours d’une grande cérémonie, à canoniser 117 martyrs du Vietnam. Un évènement sans précédent : jamais autant de saints n’ont été canonisés le même jour. Depuis longtemps, le pape polonais tenait à rendre ainsi hommage de la façon la plus marquante possible, à cette époque, « à la fidélité au Christ des sept millions de chrétiens que compte actuellement l’Église au Vietnam. »
Mais la détermination du Saint Père ne va pas plaire du tout au gouvernement vietnamien communiste en place. À tel point que ses ambassadeurs vont tenter d’intimider les catholiques vietnamiens vivant aux quatre coins du monde de se rendre à Rome pour la cérémonie. Stefan Wilkanowicz, un intellectuel catholique polonais proche de Jean Paul II, alors membre du Conseil pontifical des laïcs, se souvient très bien des menaces à peine voilées, formulées par les services de l’ambassade du Vietnam en Pologne, à l’égard de son épouse vietnamienne invitée à Rome pour la cérémonie : « À quelques semaines de la canonisation des martyrs dont son ancêtre, Thérèse a reçu plusieurs coups de fil de la part de l’ambassade. On lui annonçait que si jamais elle allait participer à la cérémonie, sa famille restée au Vietnam en subirait des représailles. Nous savions très bien que cela signifiait : des mesures qui pouvaient être terribles… Finalement, je suis allé à Rome seul. Cet exemple, explique à Aleteia Stefan Wilkanowicz, montre le regain fort de tensions entre le Vatican et les autorités communistes, provoquées par l’annonce de ces canonisations. »