Évêque de Noyon sous le règne cruel de Clotaire, le pieux Médard avait des pouvoirs impressionnants. Mais avait aussi ses faiblesses…
La conversion et le baptême de Clovis, en 496, ont certes fait de la Gaule, au lendemain de la chute de l’Empire romain d’Occident, le premier royaume catholique d’Europe, mettant un coup d’arrêt à l’expansion de l’hérésie arienne et assurant le triomphe, jusque-là bien menacé, de l’Église, mais cette réussite aura vite des conséquences moins heureuses. Après la mort de leur père, en novembre 511, les fils de Clovis, quoique baptisés à la naissance, à l’exception de l’aîné, Thierry, issu d’un premier mariage avec une princesse franque de Cologne aussi païenne que son mari, vont vite montrer combien leur catholicisme est superficiel. Violences et cruautés constantes, allant jusqu’aux tentatives de fratricide, assassinats de leurs jeunes neveux orphelins afin de s’emparer de leur part d’un héritage royal partagé entre les fils du défunt — conformément à l’usage germanique qui assimile le royaume à une propriété privée —, scandales de mœurs, concubinages, polygamie, la liste des crimes de la seconde génération mérovingienne est longue.
Un épiscopat à la botte
Du temps de leur père, les grands évêques gallo-romains, à l’origine de l’élévation de la lignée des petits princes francs de Tournai, de l’union avec la princesse burgonde catholique Clotilde, et qui ont largement dicté la politique intérieure et extérieure de Clovis en échange du ralliement des catholiques à sa dynastie, auraient élevé la voix et condamné sans faiblesse les coupables. C’est précisément cela que le dernier survivant de la fratrie, Clotaire, qui a réussi, au prix de toutes les turpitudes, à récupérer l’intégralité de la « Francia » et qui règne sur elle avec une poigne de fer ne veut pas ; il ne saurait tolérer non plus que des clercs lui reprochent sa vie privée agitée, et les quatre ou cinq épouses « légitimes », toutes parées du titre de « reine », sans parler des maîtresses, qu’il entretient dans son palais de Soissons. Le meilleur moyen de s’éviter des désagréments est de s’entourer d’un épiscopat entièrement dévoué à sa personne qui ne se permettra jamais de critiquer le souverain.