Curé de la paroisse d’Écully, le père Martin Charcosset commente l’épisode de la femme adultère, dans l’évangile du cinquième dimanche de carême (Jn 8, 1-11). Au flagrant délit de péché, Jésus répond par un flagrant délit de miséricorde.
Nos familles sont le lieu des plus grandes joies et des plus grandes peines, et c’est parce que les liens d’amour y sont si profonds que les trahisons peuvent être si douloureuses. Vivre le pardon en famille est indispensable, et peut souvent sembler impossible. Puisque le temps de carême est une invitation à la conversion radicale, il n’est pas étonnant que les évangiles du quatrième et du cinquième dimanche nous présentent des situations de famille blessées : dimanche dernier, la parabole du Fils prodigue présentait la situation d’un pauvre vieux père dont les fils désirent le bonheur et la reconnaissance, et qui font exploser la cellule familiale (Lc 15, 1-32). Ce dimanche, ce n’est plus une parabole, mais l’histoire vraie d’une femme qui a trahi son époux (Jn 8, 1-11). Dans les deux cas, ces familles sont tellement blessées qu’il n’y a, semble-t-il, pas d’espoir de les sauver : personne n’oserait parier sur leur avenir. Personne… à part peut-être Jésus.
Le piège tendu à Jésus
Dans ces deux histoires, il y a de l’amour blessé, et des éléments quelque peu sordides : les dames avec lesquelles le fils prodigue a dépensé sa fortune, ou les détails de la trahison de la femme que les scribes et les pharisiens amènent à Jésus. Dans ce dernier cas, il y a aussi une dimension judiciaire. L’adultère est non seulement une blessure de la confiance dans l’intimité de ce couple, mais c’est aussi un délit, puisque le mariage a une dimension sociale. Et c’est pour cela que les scribes et les pharisiens viennent demander à Jésus quelle est la punition légitime. Et il y a un piège… Car si Jésus dit que c’est la justice du gouverneur romain qui doit s’en charger, il a raison du point de vue du droit, mais on pourra l’accuser d’être un laxiste et un collabo. Si en revanche il répond que les Juifs peuvent la lapider, il entre dans la surenchère des rigoristes, et il se rend complice de la mort de cette femme ; au besoin, on pourra le dénoncer à Pilate pour trouble à l’ordre public.