À quoi servent les débats : à donner du spectacle ou à chercher la vérité ? Heureusement, se réjouit l’écrivain Henri Quantin, qu’il reste des îlots de vrai débat qui résistent à l’envahisseur communicationnel, comme l’émission « Répliques » d’Alain Finkielkraut.
« Il faudrait ne jamais débattre. » Étonnante fulgurance de Philippe Muray, dans un texte de 2003 repris dans le troisième volume de ses Exorcismes spirituels (Belles Lettres). Pourquoi cette maxime définitive ? En apparence, elle dit le refus de discuter : toute pensée magistrale s’impose par sa hauteur de vue et par son écart avec le lieu commun ; elle tranche dans le vif et ne se soumet pas à la comédie médiatique du pour et du contre. Lassé d’un appel au débat proféré par ceux-là mêmes qui ont par avance fait la liste de ce qui ne fait plus débat, Muray dénonçait le cirque télévisuel par des mots percutants : « On convoque de grands problèmes et on les dissout au fur et à mesure qu’on les mouline dans la machine de la communication. Et plus il y a de débat, moins il y a de réel. »
Se rapprocher de la vérité
On le sait en outre depuis Platon, la puissance de la démagogie mine la parole publique, ce que renforce encore le monde du spectacle. À l’issue d’un débat télévisé, le plus convaincant est-il le candidat au programme le plus juste ou le meilleur orateur ? Celui dont l’argumentation est la plus fine ou celui qui cabotine le mieux devant la caméra ? Celui qui recherche le bien commun ou celui qui flatte les instincts ? Le plus cultivé ou le mieux habillé ?