Dieu est tout-puissant et Il nous aime. Dès lors, un chrétien est en droit de Lui demander... l’impossible ! "Tu ne peux pas me le refuser puisque Tu en as à la fois le Pouvoir et le Vouloir !" peut s’exclamer le priant. Encore faut-il que l’objet de la demande soit compatible avec la charité, qui est le critère décisif pour juger du bien-fondé d’une prière. Dans le cas où une personne demanderait à Dieu le don d’ubiquité, le Tout-Puissant peut-il accéder à sa requête ? Oui, mais à condition qu’elle soit motivée par la volonté de porter secours à ses frères et sœurs dans le besoin. Dans les faits, seul Dieu est présent partout en même temps. C’est la définition de l’ubiquité. Comment pourrions-nous acquérir ce don à notre tour, nous qui sommes si limités ? Tout simplement en nous unissant à Lui ! La logique est imparable : en ne faisant qu’un avec Celui qui est présent en plusieurs lieux à la fois, je bénéficie en retour du même don d’ubiquité !
Un amour qui désire être sur tous les fronts
Telle est l’intuition qu’ont eu certains saints du Carmel. Pourquoi eux ? Peut-être parce qu’ils ont pour père le prophète Elie, le plus radical et zélé des saints de l’Ancienne Alliance, et le seul parmi eux à ne pas avoir connu la mort (avec Enoch) (2 R, 2, 11). Ainsi voit-on Thérèse de Lisieux désirer être à la fois missionnaire, martyr, confesseur de la foi, prêtre, bref, être tout et partout, avant de comprendre que cette vocation multiforme s’actualisera dans l’Amour qui est le cœur de tous les états de vie et de toutes les missions. Une autre sainte du Carmel théorisera cette ubiquité de l’âme lorsqu’elle est unie à son Époux divin, Jésus-Christ : il s’agit d’Edith Stein, Bénédicte de la Croix en religion. Écoutons-la nous parler de cette ubiquité spirituelle :
Une exigence de l’amour que le Christ nous a transfusé
Il n’est pas besoin d’être religieux ou religieuse pour être uni au Cœur du Christ afin de se déplacer sur les ailes de l’Esprit et "suivre l’Agneau partout où il va" (Ap 14, 5). Il ne s’agit pas non plus d’une exagération mystique. Dans la Constitution apostolique Sponsa Christi (1950), Pie XII affirmait que "toutes les moniales doivent bien savoir que leur vocation est pleinement et complètement apostolique, sans limites de lieux, de temps ou de choses, qu’elle s’étend partout et toujours à tout ce qui regarde, d’une façon ou d’une autre, l’honneur de leur Époux ou le salut des âmes".
Ainsi, acquérir ce don d’ubiquité selon la foi chrétienne ne ressortit pas d’un désir de toute-puissance mais découle d’une exigence de l’amour qui, en s’accroissant, désire étendre ses bienfaits au maximum de personnes autour de soi. L’Amour que nous a enseigné le Christ, mieux, qu’il a fait couler dans nos veines spirituelles, est insatiable et ne connaît pas de repos ! Avec Jésus, je puis être présent sur tous les continents, et ma prière peut autant porter sur une jeune Colombienne que sur un vieux Pakistanais, un couple russe ou bien encore sur la paix dans une région particulière du monde. Dans le même temps, je peux prier pour hâter l’accession au Paradis d’une personne morte il y a un siècle. Dans l’Esprit de Jésus, je survole le temps et l’espace ! Un privilège à user sans modération !