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La capitalisation d’Apple dépasse le PIB de la France

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Hector RETAMAL / AFP

Xavier Fontanet - publié le 18/01/22

Ancien chef d’entreprise et professeur de stratégie, Xavier Fontanet tire les conséquences de l’apparition de géants économiques privés dont les capitalisations dépassent le PIB de pays de moyenne importance. Pour lui, l’heure est à l’adaptation des politiques publiques et sociales afin de créer des terreaux économiques attractifs.

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Quand Apple, une société qui capitalise 3.000 milliards de dollars, c’est-à-dire plus que le PIB de la France, met près de 100 milliards dans un programme de rachat d’actions, c’est évidemment l’occasion de libérer les commentaires démagogiques contre les grosses entreprises, le capitalisme et les dividendes comme le font un peu facilement certains de nos grands journaux. Dommage, car c’est une belle occasion de réfléchir un peu ! 

D’abord, il y a des règles de base de l’économie d’entreprise à expliquer : quand une entreprise a une rentabilité plus élevée que sa croissance, elle accumule des liquidités et elle a alors deux possibilités : soit les utiliser pour investir dans d’autres métiers (c’est-à-dire se diversifier), soit les rendre aux actionnaires. Se diversifier n’est pas la tendance actuelle, on le voit bien. De très grands groupes comme General Electric aux États-Unis, Toshiba au Japon où Siemens en Allemagne se concentrent et remettent en bourse les divisions qui ne sont pas leur cœur de métier. Le cas le plus récent étant celui de Mercedes qui considère que les synergies entre camions et voitures ne sont pas suffisantes pour justifier de garder les deux activités dans le même groupe et qui vient de se séparer de sa division poids lourds (Daimler). Les « pure player » — entreprises spécialisées sur un métier (plus lisibles de ce fait) — sont donc la règle. La tendance actuelle est de rendre les liquidités quand on en a trop, quitte à faire appel au marché le jour où on en a besoin. 

Il y a deux façons de rendre les liquidités aux actionnaires et elles sont à peu près équivalentes : soit racheter des actions pour les détruire, ceci fait monter le cours de Bourse ; soit verser les liquidités en dividendes. La décision n’impactant pas la stratégie, la valeur de l’entreprise n’est pas affectée par ce choix technique : dans les deux cas, le résultat sera le même pour l’actionnaire en termes de rentabilité, soit une action un peu plus haute et moins de dividendes, soit une action un peu plus basse et plus de dividendes. Difficile de déceler où est le scandale. Le penser, c’est manifestement ne pas être assez formés à l’économie. Tout le monde devrait s’accorder sur l’idée qu’il est très important que chaque citoyen comprenne le mécanisme de la cotation boursière et son lien au financement des entreprises, encore faut-il que le système éducatif soit équipé pour cela et que les journalistes soient, eux aussi, assez formés en matière économique. 

Une capitalisation supérieure au PIB de la France

Revenons aux 3.000 milliards d’Apple. Ce qui surprend, c’est évidemment la valeur dont on parle, surtout quand on est citoyen d’une société d’un pays de taille moyenne comme le nôtre (2.500 milliards de PIB). Les chefs des entreprises comme Apple travaillent avec des masses financières plus importantes que celles dont disposent leurs dirigeants politiques. Précisons que si l’on compare une capitalisation (un stock) dans le cas de l’entreprise avec un flux dans le cas du PIB, il n’empêche ! Il est clair que si ces entreprises ont pris ces tailles gigantesques, c’est que nous-mêmes en tant que consommateurs avons fait appel à ces produits qui rendent, quoi qu’on raconte, d’immenses services.

Il ne faut se faire aucune illusion, dans le cas qui nous occupe, l’écart va continuer à se creuser : les marchés de communication sont en forte croissance et Apple n’a que 16% de part de marché dans son produit phare, l’iPhone. Il faut donc apprendre à vivre avec des entreprises dont les capitalisations vont dépasser le PIB de pays de moyenne importance et réfléchir à ce qu’implique cette nouvelle situation. 

Il ne faut se faire aucune illusion, dans le cas qui nous occupe, l’écart va continuer à se creuser : les marchés de communication sont en forte croissance et Apple n’a que 16% de part de marché dans son produit phare, l’iPhone. Il faut donc apprendre à vivre avec des entreprises dont les capitalisations vont dépasser le PIB de pays de moyenne importance et réfléchir à ce qu’implique cette nouvelle situation. 

Créer un terreau économique meuble

Première idée, qui touche le financement des retraites : on ne peut que regretter amèrement le fait que nos politiques aient monté des systèmes de retraite fondés sur la répartition. Sans prendre des cas extrêmes comme Apple, force est de constater que le marché financier américain a été multiplié par 40 depuis 1983, date de la décision de la retraite à 60 ans par répartition. Si on avait introduit à cette époque, ne serait-ce qu’une dose de capitalisation dans nos systèmes de retraite, il n’y aurait absolument aucun problème de financement, ce que démontrent des pays comme la Suisse ou la Nouvelle-Zélande qui ont parié il y a cinquante ans sur elle.

La deuxième conclusion touche à l’évolution des politiques économiques des États et à leur « politique industrielle ». Les masses que mobilisent ces titans pour se développer dépassent largement ce qu’un pays comme le nôtre peut « mettre sur la table ». Les politiques où l’on cherche à pousser des champions, ne peuvent se concevoir au minimum qu’au niveau de l’Europe. Au niveau du pays, les politiques d’attractivité seront la meilleure façon de donner de l’élan aux jeunes pousses et inciter les grandes entreprises à installer des filiales, des usines, des centres de recherche. Elles concernent aussi bien la sphère publique que la sphère sociale. La ligne directrice sera de créer un terreau économique meuble avec pas trop d’impôts, pas trop de règlements, de bons équipements publics, des formations générales et professionnelles au top niveau et, peut-être plus important que tout, un dialogue social harmonieux. L’équilibre entre les États et les entreprises est en train de changer, il ne sert à rien de diaboliser les plus grandes d’entre elles. Il est préférable de bien comprendre les forces à l’œuvre et adapter les politiques publiques et sociales afin d’être en position de saisir les opportunités qu’offre ce formidable changement.

Tags:
Bien commun
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