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La véritable humanité du Christ

ALBRECHT DURER

Domaine public

L'Homme des douleurs par Albrecht Durer.

Jean-François Thomas, sj - publié le 15/11/21

En relativisant l’humanité du Christ, les hérésies contestent aussi la divinité de Jésus. Le temps de l’Avent qui arrive nous permet de revenir dans la vérité de l’incarnation du Fils de Dieu, totalement homme et parfaitement homme.

Le début de l’année liturgique pour un catholique est l’Avent, cette préparation, « petit carême », pour accueillir le mystère de l’Incarnation. L’Évangile selon saint Jean commence par ces mots : Et Verbum caro factum est et habitavit in nobis : et vidimus gloriam eius, gloriam quasi Unigeniti a Patre, plenum gratiae et veritatis. « Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, gloire du Fils unique venu du Père, plein de grâce et de vérité. »

Voilà la véritable humanité du Christ, Fils de Dieu. Tout au long de l’histoire de l’Église, des hérésies ont tenté de la défigurer et de la réduire à une caricature. Que ce soit Marcion, excommunié en 144 pour avoir affirmé que le corps humain de Jésus n’était qu’apparence car la matière est mauvaise ; ou Arius, condamné au concile de Nicée en 325, qui, à l’opposé, réduit la divinité du Christ en affirmant que son existence n’est pas éternelle ; et encore Nestorius, condamné par le concile d’Éphèse en 431, élaborant un système compliqué dans lequel Jésus-Christ est composé de deux personnes distinctes, l’une humaine et l’autre divine ; ou bien au contraire le monophysisme, épinglé par le concile de Chalcédoine en 451, considérant que la nature humaine du Christ disparaît dans la Personne divine. Et tant d’autres car l’imagination débridée des hommes n’a point de limites !

Cela nous rassure peut-être de mettre en doute ainsi la puissance divine contenue dans le Christ.

À chaque fois, ce fut la Sainte Humanité du Christ qui fut bafouée, comme lors des supplices de la Passion. Les plus terribles attaques sont celles qui s’en prennent à la perfection de la nature humaine que possède le Christ. Ce mépris demeure courant, notamment lorsqu’on réduit Jésus-Christ à un homme, certes moins pire que nous, capable peut-être de miracles, mais tout aussi fini que nous ne le sommes. Cela nous rassure peut-être de mettre en doute ainsi la puissance divine contenue dans le Christ.

Jusqu’à l’identité parfaite

Notre problème est que, le plus souvent, nous comparons Jésus à ce que nous sommes. Nous rabaissons son humanité à la nôtre qui n’est que poussière sans Lui. Charles Péguy, dans Le Mystère des Saints Innocents, met ces mots dans la bouche du Père : 

« On parle toujours, dit Dieu, de l’imitation de Jésus-Christ/ Qui est l’imitation,/ La fidèle imitation de mon fils par les hommes./ Et j’en ai connu et j’en connaîtrai des imitations si fidèles, dit Dieu,/ Et si approchées,/ Que moi-même j’en demeure saisi d’admiration et de respect./ Mais enfin il ne faut pas oublier/ Que mon fils avait commencé par cette singulière imitation de l’homme./ Singulièrement fidèle./ Qui elle fut poussée jusqu’à l’identité parfaite./ Quand si fidèlement si parfaitement il revêtit le sort mortel./ Quand si fidèlement si parfaitement il imita de naître./ Et de souffrir./ Et de vivre./ Et de mourir. » 

Cette imitation de l’homme par le Christ n’est point celle du péché mais celle de la nature que nous n’aurions jamais dû perdre par la faute du péché originel. En Lui, l’Épiphanie de Dieu s’unit étroitement à la Sainte Humanité. Voilà ce que nous contemplerons à Noël et que nous contemplons normalement chaque jour. Les deux natures distinctes, humaine et divine, et qui demeurent distinctes, se retrouvent dans l’unique Personne du Verbe. Cette Personne est le souffle dont parle Paul Claudel, souffle à nul autre pareil, souffle de toute puissance qui accepte de se faire le prisonnier des hommes dans le sein de la Très Sainte Vierge : 

« Cette paix que le vent sans jamais en émouvoir la source ne cesse d’interroger avec mystère ou avec furie !/ Sur les choses qu’il a créées ne cesse pas l’interrogation de l’Esprit./ La mer des hommes et des feuilles, il ne cesse de la brasser et de la remuer, la mer des peuples et des eaux !/ C’est de lui qu’il est écrit : J’ai cherché en toutes choses le repos./ Et pourtant ce souffle impatient du monde il y a quelqu’un  qui a su l’emprisonner./ Il a suffi naïvement pour le prendre de cette Vierge qui lui dit : Mon bien-aimé !/ Un enfant dort sur son sein et la joue contre sa joue./ “Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous.” »

Une humanité sans péché

Dans son humanité, le Christ ne connaît point l’étroitesse de notre nature pécheresse, de notre médiocrité. Laisser supposer un seul instant que le Christ ait pu céder à la moindre faiblesse, parce qu’Il est totus homo, est un sacrilège, hélas très répandu depuis que certains osent affirmer que le Sauveur a partagé la nature humaine dans ce qu’elle a de plus bas. Saint Bonaventure précisait que l’homme seul est imago Dei, image de Dieu, et que tous les autres êtres ne sont que des « vestiges » qui subissent leur être, qui dorment d’une certaine façon, n’étant pas pleinement conscients de leur origine divine. Cependant, notre nature diffère de celle de Dieu puisque nous sommes des créatures, ce qui n’est point le cas du Christ. Jésus-Christ n’est pas comme nous une simple image de Dieu, puisqu’Il est Personne de la Sainte Trinité, ayant totalement assumé la nature humaine dans sa perfection. Il est totalement homme car Il a revêtu la structure ontologique de notre nature, mais les différences qualitatives avec nous sont plus qu’un abîme ! 

Le temps liturgique de l’Avent qui avance vers nous pourrait être mis à profit pour remettre à l’endroit notre adhésion à la foi de l’Église en ce qui concerne l’humanité et la divinité de Notre Seigneur.

Comme son humanité est élevée par le Verbe divin, elle est nécessairement au-dessus de celle des autres hommes par ses qualités. Nous pouvons déjà faire l’expérience de la différence qualitative qui nous sépare des saints alors que nous possédons la même nature qu’eux. À plus forte raison en ce qui regarde le fossé entre nous — même le plus saint parmi les hommes — et le Christ. Le théologien Dietrich von Hildebrand (+1977) écrit à ce sujet, dans La Vigne ravagée 

« La déformation actuelle de la Sainte Humanité de Jésus trahit une conception erronée de l’“ampleur” que les auteurs confondent avec la pure extension logique. Ils confondent l’essence de l’homme avec l’ensemble des hommes. Ils oublient complètement qu’“être pleinement homme” ne signifie pas du tout posséder — même en puissance — tous les traits possibles qui se trouvent chez les êtres humains. “Totus” se réfère à l’essence de l’homme et à l’ensemble des “accidents”, qualités, défauts et vertus qui s’ajoutent, pour le bien ou pour le mal, à la nature de tous les hommes. »

Une grâce du temps de l’Avent

Ce qui est trouble est que, tout en relativisant la perfection de la nature humaine du Christ, nous ne Lui refusons pas totalement sa divinité, sans nous rendre compte qu’il existe alors une contradiction dans notre foi. Il faut dire que le poison concernant l’humanité du Christ est très subtil, et il s’est affiné au cours des siècles. Le temps liturgique de l’Avent qui avance vers nous pourrait être mis à profit pour remettre à l’endroit notre adhésion à la foi de l’Église en ce qui concerne l’humanité et la divinité de Notre Seigneur. Ce serait une cure de jouvence spirituelle et nous en sortirions régénérés.

Tags:
AventDieuFoiHérésieJésus
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