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Que les propos de Mgr de Moulins-Beaufort sur le secret de la confession aient surpris les médias, c’est cela qui est surprenant. Le journal Libération, laïque successeur de l’esprit chagrin de Port Royal, s’offusque ainsi des propos de l’archevêque de Reims. Il s’émeut dans son titre principal, du « dangereux calcul du chef des évêques », accusé de défendre le secret de la confession. Comme s’il y avait calcul, et comme si un danger quelconque venait de l’épiscopat ! Comment craindre les calculs d’un épiscopat souffrant, déconsidéré et démuni, qui assume comme il peut les scandales dont le rapport Sauvé a donné les détails ? Nous voyons bien que nos évêques n’en sont plus à calculer. Ils disent chacun à sa manière, au milieu de la tempête : « Sauve-nous Seigneur, nous périssons. »
Je croyais que, depuis 1905, l’Église et l’État étaient séparés en France. J’ai été, comme tout le monde, interloqué de voir qu’un ministre de l’Intérieur “convoquait” le président de la conférence des évêques comme un simple chef de bureau, et que ce dernier, comme au temps du Concordat, n’avait d’autre issue que de s’exécuter.
Je croyais qu’il existait deux ordres, le temporel et le spirituel, et qu’il était aussi vain, s’agissant de l’Église catholique, de discuter de la hiérarchie des normes entre le droit canonique et le droit séculier que de s’inquiéter du sexe des anges (lui aussi devenu incertain, il est vrai). J’ai été, comme tout le monde, ébahi de découvrir que le droit canon faisait partie de notre droit positif, à une place éminente ou non, bref à une certaine place nichée au milieu de notre arsenal juridique séculier. Ébahi de voir que le président de la Conférence des évêques se trouvait sous l’autorité hiérarchique d’un ministre, sur des sujets relevant de nos consciences.
Mais Libération n’y peut rien, c’est Mgr de Moulins-Beaufort qui a raison. Le danger n’est pas dans un supposé calcul dangereux du président des évêques, mais dans la confusion dangereuse du spirituel et du temporel, dont la séparation a fondé notre civilisation. Le droit canon de l’Église a vécu pendant des siècles dans des systèmes juridiques de toutes natures, sous des régimes de toutes espèces, sans avoir à s’y intégrer : car ces deux droits ne parlent pas de la même chose. Le secret absolu de la confession est indivisible de la réalité spirituelle. Il n’est pas séculier. Il est le dernier espace civilisé, dans un monde qui perd chaque jour un peu de sa civilisation.
S’il existe une civilisation chrétienne, ou plutôt s’il n’existera jamais de civilisation chrétienne au sens où les forts et les puissants l’entendent, c’est parce que le Royaume fondé par le Christ repose sur ce qui est le plus opposé au droit, le plus opposé à l’État, le plus opposé à l’ordre public, le plus opposé à l’institution judiciaire que tout ce qui se peut concevoir : le pardon. Le pardon est un espace inviolable. Il doit le rester.
Bien sûr, il faut que les criminels se dénoncent, et il faut que chacun mette les faibles à l’abri des prédateurs. Mais s’il n’y a plus de secret de la confession, il n’y aura plus de confession du tout. Voulons-nous un monde dur, un monde impitoyable ? Renonçons au secret de la confession.