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Économie : le modèle de la “solidarité exigeante”

L'usine Volkswagen de Hanovre.

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Xavier Fontanet - publié le 14/10/21
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Le traitement de choc que les Allemands surent adopter pour redresser leur économie après la réunification pourrait inspirer les Français. Dans sa chronique hebdomadaire, Xavier Fontanet montre en quoi cette "solidarité exigeante" peut être aussi efficace que sociale.

Une expérience dont nous devrions nous inspirer est celle de l’Allemagne sous Schröder au début des années 2000. La RFA était à l’époque le parent pauvre de l’Europe, ses dépenses publiques avaient explosé du fait des dépenses liées au rapprochement avec l’Est. Sa dette frôlait 70% du PIB et les budgets étaient en déficit. Le chancelier expliqua à ses concitoyens que la situation ne pouvait pas durer et que, si on ne réformait pas en profondeur le système social, le pays tomberait un jour entre les mains de financiers qui le mettraient en danger.

Gerhard Schröder confirma que la solidarité, ciment de la société allemande, ne serait pas mise en cause mais que dans des conditions difficiles que le pays traversait, il demanderait des efforts aux récipiendaires des aides sociales. Ce fut le fameux Fördern und Fordern — « aider et exiger ». Il refusa que l’État fédéral comble le trou des caisses de retraite et de santé et demanda aux syndicats et au patronat de régler eux-mêmes le problème. Le résultat fut rapide et les mesures prises simples : on repoussa significativement l’âge de départ à la retraite et on introduisit un ticket modérateur pour les dépenses de santé. L’équilibre financier des deux caisses fut rapidement rétabli.

La France est le seul pays à posséder le mot égalité dans sa devise nationale, d’où l’idée que l’État a pour mission d’assurer l’égalité et donc que toute aide est un dû sans devoir de retour...

Le déficit des caisses chômage était lui aussi considérable : ce dernier dépassait 8%. Schröder fit passer un principe simple qui fut relayé fidèlement par la presse : « Mieux vaut un travail pas tout à fait satisfaisant que l’horreur d’un chômage, même bien payé, à la maison. » C’était l’époque où la France fait le choix inverse, avec Lionel Jospin, il faut le dire… celui d’un chômage bien rémunéré.

On introduisit en Allemagne le concept de CDI à temps variable (qui permettra aux grandes entreprises telle que Volkswagen d’amortir le choc des crises) et des mini jobs (qui firent beaucoup parler d’eux) mais qui étaient en fait des contrats adaptés au temps partiel et qui avaient pour objet de lutter contre le travail au noir. Il s’en créa… 9 millions, 3 millions de personnes ayant deux emplois ; le chômage s’effondra pour tomber au niveau actuel, entre 3 et 4%. Les dépenses publiques et sociales baissèrent de 57% à 44% du PIB. Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre que ce traitement de choc fit repartir l’économie. Le point central dans toute cette affaire a été la capacité du chancelier Schröder de faire comprendre que l’équilibre financier devait entrer de plain-pied dans les raisonnements car c’était affaire de souveraineté ; l’autre élément décisif sera le soutien des médias, en particulier celui du groupe Bertelsman. 

La France devrait s’inspirer de cet exemple venant de son plus proche voisin. Ceci n’est malheureusement pas évident pour nous Français, car deux idées fausses ont pollué nos esprits. D’abord l’idée que l’argent tombe du ciel : à force d’utiliser le concept d’État-providence (un comble pour un état laïque !) le sentiment de nombre de nos concitoyens est que l’état de nos finances publiques ne fera jamais problème. Une deuxième erreur plus insidieuse vient du triptyque liberté-égalité-fraternité inscrit au fronton de nos édifices publics. La France est le seul pays à posséder le mot égalité dans sa devise nationale, d’où l’idée que l’État a pour mission d’assurer l’égalité et donc que toute aide est un dû sans devoir de retour (avec le risque qu’un grand nombre de nos compatriotes s’enferme dans un statut d’assistés).

L’affaire est plus sérieuse que l’on croit. Tous ceux qui connaissent bien le nord de l’Europe peuvent attester que la parole des gouvernants français souffre de la fragilité de nos finances publiques. Nos voisins attendent aussi des Français qu’ils fassent les efforts par lesquels ils sont passés. Cette idée de « solidarité exigeante » doit être au cœur de la campagne présidentielle et son adoption par notre pays peut être un axe majeur de réforme et une contribution à la construction d’un solide édifice européen.

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