separateurCreated with Sketch.

« L’espérance est chevillée au corps des humains »

NADZIEJA
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Paul Valadier - publié le 06/06/21
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Auteur d’un petit traité roboratif sur l’espérance, Ce qui nous fait tenir en temps d’incertitude (Mame), le père Paul Valadier analyse en profondeur les peurs de notre temps, et comment les épreuves nous révèlent les ressources spirituelles qui peuvent nous aider à les traverser.

Aleteia : Dans l'histoire des hommes, les peurs de notre époque sont-elles nouvelles ?
Paul Valadier : Toute époque a connu des peurs, sinon dans la totalité de la société, du moins en certaines couches de cette société. Peurs des épidémies (choléra, peste, typhus…) en des temps où la médecine se révélait souvent impuissante, peur de l'insécurité bien plus grande qu'aujourd'hui, même dans les villes, peur des troubles civils et des guerres, peur des famines très fréquentes… La liste serait longue. De nos jours, la surprise est grande : ce qui est nouveau, car nos sociétés, persuadées d'un inéluctable progrès des sciences, ont largement cru que nous avions « dépassé » ces périodes obscures et obscurantistes, et donc que pourrait régner assurément une existence sans trop de souffrances pour tous. Or il n'est en rien : on découvre même à quel point nos scientifiques bafouillent et se contredisent. Les épidémies sont donc toujours d'actualité, et l'on nous en promet d'autres… Autre nouveauté évidente : le caractère mondial de la pandémie. Aucun pays n'est épargné, et du coup nous nous découvrons solidaires bien plus que nous ne l'aurions pensé. D'où la question : que valent nos frontières devant la maladie ?

En quoi les formules proposées aujourd’hui pour vaincre ces peurs sont-elles insatisfaisantes ?
Je ne vois malheureusement pas beaucoup de « formules proposées ». Le ton général est au catastrophisme, notamment à cause des changements climatiques, peut-être surtout dans un pays comme la France, où le penchant au pessimisme et au dénigrement des autorités, quelles qu'elles soient, est fort. Cependant, même si une foi aveugle dans les progrès scientifiques et techniques en a pris un coup, nous gardons l'espérance de surmonter l'épidémie grâce aux vaccins ; or ceux-ci ont été remarquablement mis au point avec une rapidité impressionnante. Mais il faudrait plus qu'une technique, si bonne soit-elle, pour remonter le moral de nos sociétés : des énergies spirituelles seraient indispensables. Or l'appel aux « valeurs républicaines », invoquée de tous côtés, paraît bien dérisoire par rapport à ce vide spirituel et intellectuel qu'aucun système politique ne peut combler.

Pour un croyant, la volonté de vivre a un nom : la force secrète que le Dieu vivant donne à chacun de vivre

L'espérance chrétienne est une réponse, mais l'espérance peut être aussi une démarche de la raison : comment l'expliquez-vous ?
Paradoxalement en effet ce sont les religions, le christianisme en particulier, tellement décriées et tenues pour évanescentes, qui fournissent une ressource éminente de sens, donc d'espérance dans notre situation. Mais l'espérance est chevillée au corps des humains : la volonté de vivre, de survivre est plus forte que tout. En témoignerait l'extraordinaire mobilisation dont nous avons été les témoins, tant du personnel médical, vraiment exemplaire, que de tout un chacun qui s'est préoccupé des siens, en a pris des nouvelles, s'est montré affectivement proche malgré les confinements qui nous isolaient. Tout n'a pas été parfait, mais force est de constater que, même si certains ont baissé les bras ou se sont sentis écrasés, beaucoup ont montré une impressionnante ténacité à vivre. Pour un croyant, la volonté de vivre a un nom : la force secrète que le Dieu vivant donne à chacun de vivre, et si possible de vivre bien, ce goût de vivre qui stimule la raison et renforce la volonté.

Propos recueillis par Philippe de Saint-Germain.

Paul Valadier

Ce qui nous fait tenir en temps d’incertitude, par Paul Valadier, Mame, mars 2021.

Vous aimez le contenu de Aleteia ?

Aidez-nous à couvrir les frais de production des articles que vous lisez, et soutenez la mission d’Aleteia !

Grâce à la déduction fiscale, vous pouvez soutenir le premier site internet catholique au monde tout en réduisant vos impôts. Profitez-en !

(avec déduction fiscale)