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De la « PMA pour toutes » à la révolution transhumaniste

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Charles-Éric de Saint-Germain - publié le 29/07/20

Le projet de loi de bioéthique, qui ouvre la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes, revient en deuxième lecture à l’Assemblée nationale en juillet. Pour la philosophe Judith Butler, à l’origine des "gender studies", seule cette reproduction artificielle est vraiment "humaine" car elle permet à tous les couples d’être "égaux". Ce faux progrès, dénonce le philosophe Charles-Éric de Saint-Germain, risque d’imposer une forme d’amour transhumain, aussi peu humain que possible.

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On souligne souvent aujourd’hui que la « révolution LGBT » constitue une rupture anthropologique majeure, à l’origine par exemple de la légalisation des mariages entre personnes de même sexe, mais peu de personnes soulignent le lien que cette révolution entretient avec une autre révolution en cours, celle du transhumanisme et des possibilités offertes par les nouvelles technologies.

Tout part en effet de l’idée, présente chez Judith Butler dans Troubles dans le genre, qu’il faut désormais renverser la norme hétérosexuelle, sous prétexte que le désir hétérosexuel n’aurait rien de naturel pour l’homme, mais qu’il serait le fruit d’un conditionnement culturel. Dès le plus jeune âge, celui-ci imposerait à chaque enfant le désir de l’autre sexe. En d’autres termes, l’hétérosexualité ne serait que le fruit d’une construction culturelle qu’il faudrait déconstruire, tout comme il a fallu déconstruire la domination masculine sous prétexte qu’elle passait pour « naturelle », en assignant aux femmes des rôles sociaux qui les ont longtemps confinés dans les tâches domestiques.

Tout n’est pas faux dans cette critique féministe de la domination masculine, il faut bien le reconnaître : il y a réellement des « stéréotypes culturels » à déconstruire, même si cela devient plus ennuyeux quand on parvient à la conclusion qu’il n’y aurait aucune différence « psychologique » entre l’homme et la femme, bref que les différences seraient seulement « physiologiques ».

Rien d’humain dans la procréation biologique

Mais la difficulté vient de l’ »inégalité » jugée insupportable par le lobby LGBT entre les unions hétérosexuelles fécondes et les unions homosexuelles stériles (je dis bien « stériles » et non « infertiles »). C’est là que la thèse de Butler, pour étrange qu’elle paraisse, prend toute sa force. En effet, si nous ne sommes pas hétérosexuels ou homosexuels « par nature », bref si le désir hétérosexuel, dans ce qu’il a de proprement « humain », est lui-même construit culturellement, alors cela signifie que la fertilité biologique (autrement dit ce qu’on l’on croyait jusqu’à maintenant être le propre du désir hétérosexuel) ne renvoie en réalité qu’à une pulsion purement biologique, qui vise à assurer, comme dans le monde animal, la perpétuation de l’espèce.

La conséquence de cette thèse, c’est que seule la procréation artificielle serait finalement vraiment et authentiquement humaine, ce qui est le « credo » de nombreux courants qui réduisent l’humanité à une production culturelle (cette thèse est d’origine marxiste) qui ne doit rien à la biologie et n’envisage pas que la « forme » de l’humanité, comme le pensait la thèse réaliste d’Aristote, puisse être transmise par la génération naturelle.


PMA PARIS

Lire aussi :
La PMA pour toutes, pente glissante de l’eugénisme ?

Par ailleurs, seule la procréation artificielle répond à un « désir » authentique et à un libre choix des parents, tandis que la procréation biologique ne donne finalement satisfaction qu’à une pulsion purement « animale » visant à assurer la survie de l’espèce, au prix même d’enfants non-désirés, ce qui constitue, pour notre humanité prétendument émancipée, le pire crime qui soit.

Enfin, avec la procréation artificielle, tous les couples sont réellement « égaux », et se réalise une tendance profonde et lourde du progrès de l’égalité démocratique. En d’autres termes, les couples qui continueront à se reproduire par la voie naturelle seront-ils encore considérés comme « humains » ?

Critères de perfection

D’ailleurs, il est probable qu’en faisant de la procréation artificielle la seule procréation humaine véritable, on ne parlera plus de procréation médicalement assistée pour ses utilisateurs (de fait, cette procréation n’aura effectivement plus rien de « médical ») mais on parlera plutôt de « procréation biologiquement dégradée » (PBD) pour ceux qui auront encore recours aux voies naturelles pour avoir un enfant !

« À l’avenir, les couples hétérosexuels seront peut-être eux aussi, « obligés » d’en passer par la procréation artificielle s’ils ne veulent pas que leurs enfants soient handicapés. »

On va sans doute dire que j’exagère. Et bien non, pour la bonne et simple raison que l’officialisation de la « PMA pour toutes » a aussi ouvert la voie au transhumanisme, c’est-à-dire non seulement à la possibilité d’octroyer des enfants aux couples homosexuels, mais à une forme d’eugénisme qui permettra de sélectionner les enfants selon des critères de perfection génétique. Cet eugénisme n’était pas encore présent quand on considérait que la PMA était réellement une procréation médicalement assistée visant à remédier à une situation d’infertilité, puisqu’il n’était aucunement question d’augmenter l’humanité, en faisant mieux que ce que la nature peut faire, même s’il y avait déjà dissociation de la procréation et de la sexualité.

Quand tout sera prévisible

À l’avenir, les couples hétérosexuels seront peut-être eux aussi, « obligés » d’en passer par la procréation artificielle s’ils ne veulent pas que leurs enfants soient handicapés. Lors des débats parlementaires sur la révision de la loi bioéthique en première lecture, une députée LREM, Aurore Bergé, a bien laissé entendre que les couples hétérosexuels qui le veulent ne seront pas empêchés de se reproduire « naturellement ». Mais la question mérite d’être posée : quels parents auront encore suffisamment d' »éthique » pour s’opposer au « progrès » de la procréation artificielle qui contribuera à l’amélioration des capacités physiques et intellectuelles de leurs enfants si d’autres ne lésinent pas sur les moyens ?

À titre personnel, je ne veux pas vivre dans ce monde-là. Car si l’homme (et j’en suis convaincu) se caractérise par sa fragilité, sa précarité, sa vulnérabilité, si c’est tout cela qui nous rend « solidaires » les uns des autres, et qui nous empêche de nous suffire à nous-mêmes, je crains surtout que ce monde transhumain ne soit en réalité inhumain. Ce sera un monde froid, parfaitement prévisible, car tout sera programmé. Il n’y aura plus aucune place pour la moindre surprise ni pour le moindre enchantement ou émerveillement. Triste à en mourir…




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Tags:
BioéthiqueGPAPMATranshumanisme
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