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« Monde d’après » : ne pas se tromper de direction…

Foule dans la rue

© blvdone - Shutterstock

Philippe Arondel - publié le 05/06/20

Si nous n’y prenons pas garde, le scénario de « l’après » risque de s’écrire sous les traits d’un capitalisme numérique et de surveillance émancipée de tout ordonnancement éthique et de tout enracinement historique. Le modèle technico-scientifique déconstruit par le pape François dans « Laudato si’ » sera-t-il pour demain ?

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Il est des moments où une certaine tristesse, voire une sourde mélancolie, nous saisit face aux intermittences du cœur et de la raison liées à la pandémie historique qui bouleverse nos repères habituels. Bercés par de douces illusions — ne nous répétait-on point depuis le début de la crise que « plus rien ne serait comme avant » — nous avions fini par croire, naïfs invétérés que nous sommes, que « l’après » aurait le visage d’une France réconciliée avec elle-même, apte, sinon à des consensus rayonnants, du moins à des compromis de qualité capables de retisser de la concorde sociale ?

Un « vieux monde »… en pire ?

Las, il nous faut aujourd’hui, toute honte bue, déchanter, puisque, jour après jour, dans la presse ou sur les plateaux des chaînes d’information continue, nous voyons revenir en force les vieux schémas du monde d’avant… déstabilisés un instant par la « grande peur » qui tétanisait quelque peu, au début du confinement, ses avocats attitrés.

Libérés — du moins en partie — de leur frayeur, ceux-ci se multiplient sur tous les fronts, essayant de pousser leur avantage en un temps où la sidération, compréhensible à bien des égards, semble encore engourdir l’esprit critique de nos contemporains.

Renouant avec leur antienne de toujours, certains nous expliquent, sans trop de preuves à l’appui d’ailleurs, qu’il conviendrait d’en finir enfin avec « le pouvoir gris » des seniors…

Les uns, renouant avec leur antienne de toujours, nous expliquent, sans trop de preuves à l’appui d’ailleurs, qu’il conviendrait d’en finir enfin avec « le pouvoir gris » des seniors — tous gorgés de richesses et jouisseurs comme chacun le sait ! — et de jouer la carte d’une sorte de lutte des âges, ou si l’on préfère d’une nouvelle lutte des classes ne disant pas son nom, axée sur la querelle des âges… au profit de jeunes tous dépeints comme des sacrifiés en puissance. Ainsi a-t-on pu voir, dans la presse du matin, un article intitulé, de façon provocante, « Tout ça pour des vieux blancs âgés de 84 ans », où s’étalait, certes avec quelque habileté, une sorte de critique ouverte de pouvoirs publics risquant de tuer définitivement l’économie, cette nouvelle idole, pour sauver des vies paraît-il sur le déclin… pas loin d’être qualifiés d’inutiles.

L’idole marchande contre la spiritualité ?

Les autres, surfant sur le désir légitime et un peu manipulé en l’occurrence, de remettre le pays au travail, font entendre de nouveau la curieuse petite musique d’une remise en cause — radicale ou pas — de certaines fêtes religieuses. Pour cet économiste de l’Institut Montaigne par exemple, la suppression du jeudi de l’Ascension s’imposerait au prétexte de dégager de nouvelles heures de travail. Mais ce n’est là si l’on ose dire, qu’un petit hors d’œuvre, puisque quelques élus, allant encore plus loin, plaident ouvertement pour un élargissement conséquent du travail du dimanche, oubliant délibérément que les expériences passées en ce domaine se sont toujours avérées peu concluantes en termes de gains économiques.

Des écrans faisant écran… à la vie ?

Enfin, s’appuyant sur l’indiscutable succès du télétravail pendant le confinement, l’on sent, à de multiples signes concordants, monter en puissance le désir d’un « tout numérisation » s’étendant jusqu’à des espaces sensibles et préservés comme l’école. Ayant apporté la preuve de leur résilience musclée, les fameux Gafam (abréviation des 5 entreprises internet les plus grandes du monde, ndlr) tant décriés avant la crise sanitaire, ne sont-ils pas en passe (cf. leur capitalisation boursière actuelle) de conquérir de nouveaux pouvoirs, d’étendre leur influence quasi idéologique, au détriment de nos vieilles nations incapables de la moindre stratégie de résistance agile et lucide ?

Le scénario de « l’après » qui risque de s’écrire aura les traits d’un capitalisme numérique et de surveillance s’émancipant progressivement de tout ordonnancement éthique et de tout enracinement historique.

Bref, le scénario de « l’après » qui risque de s’écrire aura les traits, si nous n’y prenons pas garde, d’un capitalisme numérique et de surveillance s’émancipant progressivement, de petits coups de force en petits coups de force, de tout ordonnancement éthique et de tout enracinement historique. Sa langue sera celle des prophètes de ce modèle technico-scientifique si finement déconstruit par le pape François dans Laudato si’, où le visage de l’homme semble se dissoudre dans les remous d’une mathématisation incontrôlable, et pensée, à l’instar du marxisme d’hier, comme la fin de l’histoire. 

Demain, un moment « social-chrétien » ?

Comment les chrétiens pourraient-ils, quelle que soit par ailleurs leur sensibilité, accepter que l’on s’acheminât peu à peu vers une anti-société gérée selon les fantasmes comptables de managers pour lesquels ne compte — sans jeu de mots ! — que le prix vénal des choses, les affects et émotions de nos vies devant être à chaque instant évalués à cette aune stricto sensu matérialiste ? Face à des échéances s’annonçant douloureusement chaotiques, ils doivent de toute urgence se réapproprier les grandes thématiques d’un enseignement social donnant tout son sens à la notion de bien commun face à la conjuration à ciel ouvert des conservatismes et corporatismes de toutes obédiences.


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