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Un pape, à quoi ça sert ?

Ca sert à quoi un pape?

© ANDREAS SOLARO / AFP

Jacques Perrier - publié le 02/02/20

« Serviteur des serviteurs de Dieu », le successeur de Pierre est d’abord le garant de l’unité de la foi et de la cohérence entre toutes les communautés catholiques à travers le monde.

Quelle était l’intention du Christ en instituant Pierre « prince des apôtres » ? Que ce soit par une révolution ou par la voie électorale, les citoyens d’un pays peuvent changer sa constitution, s’ils trouvent qu’elle n’est plus adaptée aux besoins et aux aspirations du plus grand nombre. Les constitutions sont changeantes. En France, les rôles respectifs du président de la République et du Parlement ont été plusieurs fois redéfinis. Pour l’Église, il n’en va pas de même. C’est le Christ qui a fondé et qui, aujourd’hui même, construit son Église : « Tu es Pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Église. » Le désir de tout chrétien est d’être fidèle au Christ. Il faut donc se demander : que voulait-il en donnant un rôle privilégié à Pierre ? C’est le point de départ, la base de tout dialogue œcuménique sur cette question.

Le premier des serviteurs

Pourquoi le pape se désigne lui-même comme « le serviteur des serviteurs de Dieu » ? Il faut toujours « repartir du Christ », comme disait Jean Paul II : lui, celui que « vous appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien », il a lavé les pieds de ses disciples. Il s’est fait serviteur : « Je suis venu, non pour être servi, mais pour servir. » Jésus met en garde ses apôtres contre la tentation d’exercer le pouvoir à la manière du monde. Quand le Christ ressuscité confirme Pierre dans sa mission, il lui dit : « Sois le pasteur de mes brebis. » Jésus, le Pasteur par excellence, s’est fait agneau pascal, mis à mort et ressuscité. Il n’est pas le mercenaire qui ne cherche que son intérêt. Il est le Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis. Tel est le modèle, la référence pour toute personne dotée d’une autorité dans l’Église.




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Dans sa constitution sur l’Église, après avoir parlé du « mystère de l’Église », l’Église dans la vision de Dieu, le concile Vatican II consacre un chapitre au « Peuple de Dieu ». Ce Peuple est constitué par tous les baptisés, tous les serviteurs de Dieu. Le concile traite seulement ensuite de la hiérarchie dans l’Église, particulièrement des évêques et du pape : ils sont au service du Peuple de Dieu. Non pas en suivant les sondages de ce que pensent les catholiques. Mais pour permettre au Peuple de Dieu de répondre à sa vocation et d’accomplir pleinement sa mission. Le pape est le premier des serviteurs pour que tous soient effectivement serviteurs « de Dieu ».

Souvent des réformateurs

Le pasteur conduit le troupeau. Il ne le garde pas dans un pré bien clôturé, qui n’existait pas au temps de Jésus. Il appartient au pasteur de montrer la route et d’y entraîner le troupeau. Parfois, il doit remettre les brebis sur le bon chemin pour qu’elles ne tombent pas dans un précipice ou n’aboutissent dans une zone où elles ne trouveront rien à manger. Mettre ou remettre sur le bon chemin, c’est le rôle de toute réforme. Elle est toujours liée, dans l’Église catholique, à un ou plusieurs papes. Citons la réforme grégorienne au Xe siècle ; celle des conciles Latran IV et V au XIIIe ; la Réforme catholique au concile de Trente ; celle du concile Vatican II. Dans tous ces cas, les papes ont joué un rôle moteur, ne serait-ce qu’en convoquant le concile et en le présidant par des délégués.


Concile de Nicée

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Ecclesia semper reformanda, l’« Église toujours à réformer » est devenu presque un dicton. « Réformer », mais non « refonder » : on ne refonde pas l’Église comme on refonde un parti ou une association. Le rôle du pape est de percevoir les signes d’une réforme nécessaire et de conduire celle-ci pour qu’elle porte des fruits : celle du concile de Trente a mis plus d’un siècle pour entrer pleinement en vigueur. Depuis le dernier concile, les papes entendent bien poursuivre la réforme « Vatican II » après en avoir repéré les écueils.

La protection de l’indépendance des évêques

Le pape garantit l’indépendance des évêques et des Églises par rapport au pouvoir politique. Quel qu’il soit, celui-ci est toujours tenté de s’imposer au pouvoir spirituel. Ce fut le cas dans l’Empire byzantin où l’empereur se considérait comme l’égal des apôtres, l’évêque de l’extérieur, alors que le patriarche était l’évêque de l’intérieur. En Occident, au Moyen Âge, les papes se heurtèrent durement aux empereurs germaniques dans la querelle des investitures. Même si les évêques de l’époque avaient une autorité temporelle, les papes refusaient que les empereurs s’arrogent le pouvoir, non seulement de les nommer, mais de les investir.




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La France connut plusieurs crises à ce sujet, que ce soit sous l’Ancien Régime ou au temps de la Révolution. Le pape Pie VI (1775-1799) ne pouvait pas accepter que les évêques et le clergé soient soumis à une « constitution civile ». Bonaparte signa un concordat avec le Saint-Siège (1801) mais s’arrangea pour l’appliquer au profit de l’État. Les régimes communistes cherchent systématiquement à fonder des « Églises patriotiques » qui soient des relais de l’idéologie du Parti. Le test est la liberté plus ou moins grande qui est laissée au pape de nommer les évêques. C’est le cas aujourd’hui encore au Chine et au Vietnam. À cause du pape, l’Église catholique est accusée d’être une puissance étrangère. Alors que, grâce au pape, l’Église locale est en même temps catholique.

L’unité de la foi

Le pape sauvegarde l’unité de la foi catholique entre les époques, entre les pays et entre les tendances. « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » : c’est après cette profession de foi que Jésus annonce à Pierre quelle sera sa mission dans l’Église. Dans les heures de la Passion, Pierre va défaillir. Jésus prie pour lui et lui renouvelle sa mission : « Quand tu seras revenu, affermis tes frères. » Quand le pape se rend dans un pays, il déclare d’habitude dans son premier discours qu’il est venu pour conforter dans la foi les fidèles de ce pays. La foi ne se résume pas à des formules, même si celles-ci ont été adoptées par des conciles œcuméniques comme le symbole de Nicée-Constantinople. Le pape doit donc veiller à tout ce qui nourrit la foi : par exemple, la possibilité de vivre librement son appartenance à l’Église, de célébrer les sacrements, de se former chrétiennement, d’exprimer sa foi au dehors.

Mais les formulations de la foi ont aussi leur importance. La foi est vivante : il est normal qu’elle se développe. Les situations changent : il est normal de chercher des expressions adaptées à de nouveaux contextes. Cependant le nouveau doit être cohérent avec l’ancien, car nos prédécesseurs étaient, au moins autant que nous, éclairés par l’Esprit saint. Ce qui se dit ici, dans telle partie du monde, ne doit pas être contradictoire avec ce qui se dit ailleurs. Ce que pensent certains doit pouvoir être reçu par toute l’Église. Ces obligations ne concernent évidemment que les questions importantes touchant « à la foi et aux mœurs ». En dernier ressort, c’est au pape qu’il appartient de veiller à cette cohérence. Cette mission englobe aussi la liturgie, car la liturgie doit exprimer la foi. Il y a place pour une certaine diversité, promue par les conférences épiscopales nationales. Mais les différences ne doivent pas être des divergences. Inversement, la nouveauté n’est pas forcément infidèle. Aux organismes romains travaillant sous l’autorité du pape d’appliquer ces distinctions.




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Quand deux routes se séparent, au début, elles sont encore toutes proches l’une de l’autre. Mais si le conducteur s’est trompé, il aura bientôt beaucoup de peine à rejoindre la route qu’il aurait dû prendre. Ou encore : quand deux branches d’une famille, même sans le vouloir, ont cessé de communiquer, quand elles voudront se retrouver, elles risquent de ne plus se reconnaître comme membres de la même famille. Au pape de veiller à ce que de semblables écarts ne nous coupent pas les uns des autres.

Une autorité mondiale

Avec la mondialisation, la place du pape est de plus en plus évidente. Le pape Jean Paul II était très sensible à la pluralité des cultures. L’humanité s’appauvrirait dans une sous-culture standardisée. Ne cédons pas à nouveau à la tentation de la tour de Babel : que tous parlent la même langue. Mais aucune culture, aucun pays ne peut rester enfermé sur lui-même. Il y aurait, paraît-il, 700 millions de Chinois recevant l’Internet. Dans ce village planétaire, il est bon qu’une voix, libre par rapport aux rivalités des empires terrestres, fasse entendre l’appel d’une autre destinée. Les obsèques du pape Jean Paul II et la renonciation du pape Benoît XVI ont été une sorte de referendum planétaire à ce sujet. La voix de Rome peut servir de référence, même si c’est pour la critiquer, voire la refuser.

Certes, il faut trouver les moyens pour que toutes les questions ne remontent pas à Rome. Mais il serait complètement anachronique et ce serait rendre un très mauvais service à notre temps que de procéder à une partition de l’Église catholique et de ne plus reconnaître dans le pape le garant de son unité. C’est peut-être la réponse à la question : « À quoi sert le pape ? ».

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