La Cour des comptes dresse le bilan du regroupement des régions françaises : des fusions artificielles et coûteuses, antisubsidiaires. La subsidiarité s’accommode mal de la technocratie.
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Au crépuscule de son mandat présidentiel, François Hollande décida de faire une réforme historique : la France métropolitaine comptait vingt-deux régions, c’était trop, elle en aurait désormais treize. La chose allait tellement de soi qu’on ne prit pas la peine d’expliquer aux ignorants en quoi une région devait être plus vaste pour que le pays aille mieux.
On nous concocta en haut lieu une nouvelle carte de France, mosaïque de grandes espaces regroupés un peu au hasard, ne correspondant souvent à aucune réalité économique, géographique ou humaine, et ne résultant d’aucun élan d’appartenance commune. Mettons ensemble la Creuse et le Pays Basque, ensemble le Cantal et la Savoie, et tout ira mieux. Et décidons cela à Paris. Dans un pays comme la France, façonné par quinze siècles de paroisses, de diocèses et de provinces, il fallait oser.
Qu’est-ce qu’une région ?
La Cour des comptes vient de tirer le bilan de ses fusions. Le constat des magistrats est navré : « Trois ans après la mise en œuvre de la réforme, les économies de gestion annoncées ne sont pas au rendez-vous. » Rien d’étonnant. Pis, la Cour relève que ces fusions ont entraîné de lourds surcoûts, chiffrés en dizaines de millions d’euros, pour un service public dégradé. Au vrai, ce résultat est tout sauf une surprise. Pour n’avoir cherché que des économies, la réforme n’a rien produit, pas même des économies.
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Croire que la force d’une région n’est qu’une question de masse critique est absurde, ou alors il faudrait en Allemagne fusionner la Sarre et la Rhénanie-Palatinat, et en Italie couper en deux la Lombardie. Une région française, c’est une identité, un vouloir vivre ensemble, un élan démocratique. Une bonne réforme aurait dû s’intéresse à cette réalité. Plutôt que de redessiner des cartes, elle aurait dû s’attacher à libérer les énergies. Cela supposait, par exemple, qu’on recherchât un mode de scrutin capable d’ancrer véritablement les élus régionaux dans l’âme de nos provinces. Sans doute était-ce trop demander.
L’immobilisme déguisé en réforme
Donc, on « fusionna ». Dans les administrations publiques, les « fusions », quand elles sont mal conçues et mal conduites, ne produisent pas des synergies, mais des contagions. Les dépenses de personnel et les indemnités des élus sont immanquablement alignées par le haut. Les frais de structure explosent, les procédures s’empilent, les fonctions support s’essoufflent, les centres de décision s’éloignent, les organigrammes se compliquent, les hommes se fatiguent. Les grandes régions ont vécu ce scénario. Mais avec les fusions, l’État aussi a régressé. Les grandes régions créées par la réforme n’avaient pas été pensées comme des communautés de vie, mais comme des circonscriptions d’action de l’État : et — ce que ne relève pas la Cour des comptes — l’État pour autant n’a pas, lui non plus, surdégagé de synergie en regroupant ses services. Tel préfet chargé de préparer la fusion des services de l’État dans une future grande région a déclaré, avant même de se mettre au travail, qu’il n’y aurait aucun flux net d’emplois entre les deux capitales réunies : l’immobilisme déguisé en réforme ! On fait semblant. Si les entreprises se restructuraient de cette façon, il y a longtemps qu’il n’y aurait plus d’industrie en France.
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Et la subsidiarité ?
La France a plus que jamais besoin de donner de la réalité au principe de subsidiarité, idée chrétienne, idée neuve pervertie par la vieille technocratie. Faute d’écouter, on ne fait rien de bon.
En savoir plus :
Rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales 2019