Huit ans après le début du conflit syrien, Alep, ville multi-millénaire, reste un mythe et un rêve pour des millions de personnes. Entre joie et peine, enthousiasme et chagrins, les habitants de la ville rêvent d’un avenir.
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À Alep, huit ans après le début du conflit syrien, les jeunes rêvent d’ailleurs. Dans leurs coeurs dominent le triptyque “sécurité-logement-travail”. Ceux qui rentrent, les nostalgiques, sont ceux qui ont vécu les “dix glorieuses”, entre 2000 et 2010, et chez qui la Syrie demeure associée à un souvenir heureux. Pour les sœurs franciscaines établies dans le pays depuis de nombreuses années, la réaction est unanime: “C’est maintenant que les problèmes surgissent. Des problèmes psychologiques, sanitaires, familiaux, financiers, éducatifs et confessionnels. On essaye d’assurer un accueil, une écoute, un travail spirituel et psychologique. De travailler avec nos frères et nos sœurs. Mais les temps sont durs”.
Une évolution paradoxale
Depuis 2017, une évolution paradoxale s’observe : la ville d’Alep est libérée mais personne n’est à l’abri d’un tir de mortier. “Il y a trois mois, un obus est tombé dans notre jardin”, a ainsi confié à Aleteia mère Françoise, carmélite nantaise installée à Alep depuis janvier 1987. “Les familles continuent à partir néanmoins mes sept sœurs et moi-même n’y avons jamais songé. Oui, Alep se vide de ses chrétiens. C’est une grande tristesse mais j’ai confiance et j’espère que le christianisme ne disparaîtra pas d’ici. Il y a beaucoup de musulmans qui se convertissent, des jeunes, des familles, des professeurs d’université… Et s’il y avait une liberté religieuse, il y en aurait encore davantage”.
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Dans leur couvent situé à l’ouest de la ville, elles continuent à loger des familles entières venant en catastrophe des villages avoisinants, à préparer les hosties pour les églises et des cierges pour les messes, malgré des conditions difficiles marquées par le manque de paraffine, de fuel et les coupures de courant. Les temps demeurent donc difficiles pour les chrétiens d’Alep mais il existe également une force extérieure, divine, qui en retient certains comme en témoigne Toni, un coiffeur du quartier chrétien d’Alep et père de deux petites filles : “Je ne suis pas parti pendant toutes ces années de guerre car j’y ai cru, et je ne voulais pas voir mes filles s’élever dans une société qui m’est étrangère, je le regrette par moments, mais d’un autre côté, j’ai découvert une nouvelle relation avec l’Église. Je sais qu’auprès d’elle, je trouverais refuge et consolation quand le moral est au plus bas”..
L’importance de la solidarité
La beauté exceptionnelle d’Alep naît aussi de la solidarité qui existe entre les différentes communautés chrétiennes. “Aujourd’hui, on essaye de répondre aux besoins urgents des chrétiens, de les rassurer, de leur proposer des solutions, de les consoler”, détaille à Aleteia le père Firas, un franciscain de Hama, qui dirige le couvent de Terre Sainte d’Alep. “Avec ses 87.000 m2, Terre Sainte est l’échappatoire des 25.000 chrétiens restants, latins, syriaques, catholiques, arméniens, orthodoxes, en quête d’appartenance à un groupe, à une communauté. Sur cet espace géographique, se trouve d’un côté, des terrains de sport, une piscine olympique, des espaces verts et des services de restauration pour les familles. Et, de l’autre, la maison de repos de Saint-Vincent qui héberge 20 personnes âgées, qui jouxte un centre de loisirs, ouvert tout au long de l’année, pour accueillir les enfants entre 6 et 17 ans et qui leur permet de se défouler à travers le sport, l’art, la musique, le théâtre et le dialogue avec de vrais professionnels”.
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Si l’insécurité fait partie de leur quotidien, les ecclésiastiques et religieuses insistent auprès de leur fidèles sur le rôle des chrétiens dans cette ville et dans cette région. “Vous êtes le sel de la Terre”, répète mère Françoise. Les pères franciscains tentent de leur côté d’élargir leur projet de Terre Sainte et d’obtenir les autorisations nécessaires pour construire une école et un foyer pour étudiants.
Quant aux frères maristes, ils poursuivent leur projet Goutte de lait qui consiste à distribuer, mensuellement, du lait à tous les enfants chrétiens d’Alep jusqu’à l’âge de 10 ans. Ils proposent également aux jeunes une formation professionnelle et des sessions d’apprentissage au sein de la MIT (Mariste Institute of Training) pour les préparer à un métier. “Nous ne donnons aucun argent en espèce, nous montons le projet ensemble puis nous laissons le jeune travailler, pour le sécuriser et lui donner confiance”, explique frère Georges. “C’est un coup de pouce et une lueur d’espoir”.
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