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En RDC, « l’Église accompagne l’espérance du peuple »

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Mgr Ambongo, archevêque de Kinshasa.

Agnès Pinard Legry - publié le 23/03/19

Alors que l’Église catholique de la République démocratique du Congo (RDC) s’est largement mobilisée pour la tenue d’une élection présidentielle démocratique et représentative, la victoire de Félix Tshisekedi début janvier ne reflète pas « la volonté du peuple », affirme Mgr Ambongo, archevêque de Kinshasa. Invité par l’Aide à l’Église en Détresse (AED) à participer à la Nuit des Témoins qui se tient en France du 23 au 29 mars, il rappelle que si « l’Église n’est pas un parti, ni du pouvoir, ni de l’opposition », elle est considérée « comme la voix du peuple ». « Et le peuple attend de l’Église qu’elle fasse résonner sa voix, qu’elle l’aide à ce qu’aboutissent ses revendications », confie-t-il à Aleteia.

Le témoin est celui qui a vu, se souvient et raconte. Nommé archevêque de Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo (RDC), en novembre 2018, Mgr Fridolin Ambongo en est un. Fervent partisan d’un État de droit, il préside depuis 2008 la commission Justice et Paix, l’organe politique de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco). Il est à ce titre très écouté sur la scène internationale et a activement participé à la négociation de l’accord dit de la Saint-Sylvestre. Signé le 31 décembre 2017, c’est cet accord qui a prévu l’organisation d’élections alors que le président Kabila refusait de quitter le pouvoir.

Le non-respect de cet accord a conduit l’Église tout au long de l’année 2018 à mener un vaste mouvement de protestation largement suivi par la population mais sévèrement réprimé par les autorités. Si la victoire début janvier 2019 de Félix Tshisekedi « laisse un goût amer au peuple congolais », cette élection présidentielle, première alternance politique pour le pays, « va dans la bonne direction ». « Un pas a été franchi par le simple fait que ces élections ont eu lieu », affirme Mgr Ambongo à Aleteia. « Le peuple a beaucoup mûri dans sa perception de la chose publique ».


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Parce que l’Église catholique de RDC a un rôle central dans la vie du pays et que sa voix est audible par tous, l’Aide à l’Église en détresse (AED) a invité Mgr Ambongo à participer à la Nuit des témoins. Du 23 au 29 mars, l’archevêque de Kinshasa va sillonner la France, se rendant successivement à Strasbourg, Nice, Coutances, la Rochelle et Paris, afin de témoigner de ce qui se passe dans son pays.


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Concrètement, la Nuit des Témoins se déroule sous forme de veillées ponctuées de témoignages, de chants et de méditations sur les fruits du martyre. Au cours de celles-ci sont égrenés les noms des chrétiens (prêtres, religieux et religieuses) tués dans l’année, tandis que leurs portraits sont portés en procession jusqu’à l’autel. « En 2018, quarante missionnaires ont été assassinés en raison de leur foi, selon l’agence Fides, explique Marc Fromager, directeur de l’AED. Un chiffre terrifiant, dans la mesure où il a presque doublé par rapport à l’année précédente. Et un chiffre d’autant plus terrifiant, quand on sait qu’y échappe la longue cohorte des témoins anonymes du Christ dont on ne saura jamais rien. Mais tous, ils sont restés fidèles à leur vocation en cherchant à soulager la souffrance des plus démunis et à leur apporter un peu d’espérance. Au cours de ces veillées, nous leur rendons hommage. »

Aleteia : 2018 a-t-elle été une année difficile pour l’Église en RDC ?
Mgr Fridolin Ambongo : 2018 a été une année d’espérance qui s’est achevée sur de l’amertume. Tout le monde a espéré que cette année allait se passer normalement et donner au peuple le dirigeant qu’il désirait. L’Église a pris la tête de cette espérance du peuple, elle l’a accompagné à travers ses programmes d’éducation civique et électorale. Sa place est, a toujours été et sera toujours du côté du peuple. Mais cette année d’espérance s’est terminée sur de l’amertume. Le peuple s’est exprimé massivement pour un changement qu’il n’a pas eu.

Quel rôle l’Église va-t-elle avoir dans les prochains mois, les prochaines années ?
L’Église continue sa mission. Son rôle est d’accompagner le peuple. Elle n’est ni un parti du pouvoir, ni un parti de l’opposition. Elle doit désormais aider le peuple à ne pas céder au désespoir ou à la violence. La population a accumulé beaucoup de frustration après ce qu’il s’est passé, de désillusion par rapport au processus électoral. On lui a fait croire que si elle allait aux urnes elle aurait le pouvoir de faire évoluer les choses. Mais cette élection n’a été qu’un changement de façade, le même système reste en place. Notre rôle est donc de dire au peuple de ne pas céder à la tentation du découragement. Quelques pas allant dans la bonne direction ont été franchis. Le simple fait que les élections ont eu lieu et que Kabila ait dû se retirer en est un. L’attitude des Congolais en est un autre. Le peuple a beaucoup mûri dans sa perception de la chose publique. Il sait ce qu’il veut même s’il n’a pas eu le moyen de l’imposer.


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Qu’est ce qui fait que la voix de l’Église est audible par tous en RDC ?
Depuis l’indépendance du pays l’Église a toujours eu un rôle central en prenant le parti du peuple contre celui des régimes dictatoriaux qui se sont succédés. L’importance de son rôle tient aussi à la composition du pays : les catholiques représentent plus de la moitié des habitants et l’autre moitié est essentiellement composée de chrétiens. L’Église est naturellement considérée comme la voix du peuple. Et le peuple attend de l’Eglise qu’elle fasse résonner sa voix, qu’elle l’aide à ce qu’aboutissent les revendications. De ce point de vue-là l’Église est un acteur majeur et très respecté comme autorité morale.

Quel est le sens de votre présence à la Nuit des Témoins de l’AED ?
Je suis invité comme témoin d’une foi qui est en train de se vivre dans un contexte social et historique particulier qu’est celui de la RDC. Comment au nom de ma foi, celle de mon peuple, nous vivons ces réalités avec tout ce que nous avons d’espérance, de déception, de joie et de tristesse ? C’est une occasion de partager mon expérience de foi, celle de mon peuple et une invitation à prier pour ceux qui ont souffert, ceux qui sont blessés, ceux qui sont morts.




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Comment les chrétiens de France peuvent-ils soutenir l’Église de RDC ?
La prière est la première des choses. Le monde a tendance à penser que le premier soutien est matériel. Non ! Il s’agit d’abord de la communion, de la prière. Les chrétiens de France peuvent aussi jouer un rôle auprès de leurs dirigeants pour qu’ils puissent orienter leurs politiques dans le sens de l’intérêt du peuple. Enfin, pour ceux qui sont dans le besoin de plus immédiat, cela peut être de l’aide matérielle.

Quelle est votre espérance ?
L’avenir est devant nous. Il y a eu des élections présidentielles mais nous devons avoir des élections locales. Si le processus prend à partir de la base, je suis convaincu que cela peut influencer jusqu’au sommet de l’État.

Y a-t-il une parole d’Évangile qui résonne particulièrement en vous aujourd’hui ?
« Sois tout en tous ». Il s’agit de la première lettre de saint Paul aux Corinthiens. Au nom de notre foi nous essayons d’être tout à tous. C’est le leitmotiv de l’action de l’Église et je souhaite que ce soit le leitmotiv de l’ensemble des catholiques du Congo et, plus largement, de tous les Congolais. Le seul avenir que nous avons est un avenir commun.

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