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Père Bruno-Marie Duffé : « Les États doivent donner du sens à l’impôt »

FATHER DUFFÉ

M.MIGLIORATO I CPP I CIRIC

24 novembre 2017 : Portrait de Mgr. Bruno Marie Duffé, secrétaire du Dicastère pour le développement humain intégral lors de la présentation, au Vatican, du message du Pape pour la prochaine journée mondiale de la paix. Vatican.

Arthur Herlin - publié le 05/06/18

Pour le père Bruno-Marie Duffé, numéro deux du Dicastère pour le service du développement humain intégral, "Œconomicae et pecunariae questiones" – Questions économiques et financières en latin, veut inciter les mouvements de capitaux à être dirigés en vue du bien commun.

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Aleteia : En quoi était-ce indispensable d’intégrer la Congrégation de la doctrine pour la foi à cette réflexion sur l’éthique en économie, qui n’est pas forcément un principe chrétien ?
Père Bruno-Marie Duffé : Cette coopération a du sens dans la mesure ou l’éthique prend ici son inspirationdans l’acte de foi. En articulant les deux services, nous avons essayé d’intégrer ces principes d’éthique sociale dans la perspective de la confession de foi. Nous croyons en effet en un Dieu qui nous confie la création, en Jésus Christ qui libère les hommes de l’impasse de l’appropriation et en l’Esprit saint qui inspire des conduites de justice et de paix. La collaboration a été un effort de dialogue qui a aussi l’effet de présenter la foi chrétienne dans le contexte actuel, non seulement sur un plan théorique mais aussi comportemental, car déterminé par nos choix dans le domaine économique et social.

Y a-t-il aussi — par le lexique employé dans ce document — une volonté d’être entendu par les protagonistes de l’économie, parfois éloignés de la foi chrétienne ?
Tout à fait. Nous voulions ce document accessible tant par les individus de la sphère financière que par chaque citoyen. Ce dernier a en effet une part de responsabilité dans ses choix et sa façon d’utiliser son argent, comme un outil ou une fin. C’est le débat qui traverse tout le texte : nous contestons radicalement la vision de l’argent comme une finalité en soi. Si les richesses ne sont plus investies dans une dynamique d’innovation, dans un circuit de production, de travail et d’échange, elles ne servent à rien. C’est le cœur de notre réflexion. L’argent lorsqu’il représente un monde en lui-même, fermé, fétichisé, devient morbide.


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Le document fait référence de nombreuses fois à la taxation, à l’imposition et aux subventions. Lorsque l’État applique cette politique ne participe-t-il pas à l’isolement de richesses en les retirant du circuit des échanges de capitaux ?
Oui, c’est pourquoi — en plus d’inciter à mettre de l’argent dans un projet commun — nous appelons également les États et les institutions publiques à donner du sens à l’impôt. Si l’État taxe les individus, cela doit être pour soutenir la collectivité et non pas pour sanctionner la personne propriétaire de son argent. La question fondamentale est donc celle de la propriété. Toutefois, si au lieu d’être utilisées, les richesses restent dans un monde clos, ce n’est plus un problème de taxe, mais d’appropriation. Certes nous sommes propriétaires de notre argent, mais si la seule logique est celle de l’amplification de l’appropriation, en un mot l’usure, cela peut nuire à la répartition des biens. 

La propriété n’est-elle pas un droit fondamental promu par l’Église, notamment par le pape Léon XIII dans l’encyclique Rerum Novarum ?
De fait, elle était alors envisagée comme la garantie de pouvoir se constituer un petit capital, afin de survivre. C’est une propriété pensée sur le mode agraire, en permettant de disposer de terres pour passer du statut de prolétaire à celui de propriétaire. C’est une propriété au sens thomiste du terme : pour saint Thomas d’Aquin, la propriété assure des moyens pour vivre.

Est-il adaptable à l’économie actuelle ? Pour être en mesure de faire des dons par exemple, il faut pouvoir disposer librement de son argent…
D’un certain point de vue, l’impôt institutionnalisé représente l’expression sécularisée de la charité. L’État remplit en effet une fonction caritative, ou de correction des inégalités. Il n’y a dès lors pas de raison d’être indisposé par la taxation. D’autant que s’il y a autant de besoins, c’est parce que la situation n’est pas suffisamment équitable.


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Benoît XVI ne met toutefois pas l’impôt et la charité sur le même plan, dans la mesure où la charité, contrairement à l’impôt, doit être libre et volontaire…
La distinction de Benoît XVI insiste en effet sur le principe de gratuité, qui est très fort en économie, car cela revient à donner sans obligation et exercer ainsi notre liberté. Cela donne à la charité son caractère d’innovation. Le don spontané est à chaque fois réalisé comme s’il était le premier. Tandis que les subventions de l’État semblent plus institutionnalisées et formalisées. Mais chacun doit remplir son rôle : l’État régule, l’économie dégage de la richesse, et enfin l’individu exerce la charité.

Le nouveau gouvernement italien prévoit de mettre en place une flat tax —un impôt à taux unique, mais payé par tous les citoyens. Cela fait il partie des « réformes sages » évoquées par le document ?
Ce principe a été évoqué par notre groupe de travail et reconnu comme positif. Il faut toutefois veiller aux individus avec des revenus bas, voire nuls, pour qui cela reste une contribution forte. Cet impôt a toutefois du sens car il permettrait à chaque personne de contribuer à l’essor de la société et au bien commun. Or, payer l’impôt permet d’être reconnu comme citoyen à part entière et donc d’acquérir de la dignité.

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ArgentBien communVatican
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