Le jeûne est un acte de "pénitence" qui doit se pratiquer en étant généreux avec son prochain, en "lui prêtant assistance", a redit le pape François lors d'une messe à Sainte-Marthe marquant l'entrée en carême, en mars 2017. Et ce jeûne-là n’a rien à voir avec le "jeûne hypocrite" pratiqué par certains catholiques qui, "pour se faire bien voir ou se sentir dans le juste", jeûnent mais continuent de s’occuper de leurs affaires de manière "déplorable". Et que dire de cet homme qui "après s’être payé un diner à 200 euros, rentre chez lui et ignore l’affamé rencontré sur son chemin ?", a déploré le pape avant de laisser les fidèles à leur examen de conscience.
Aux hypocrites
Le Seigneur demande un jeûne "vrai, sincère, cohérent". Dans la première lecture du jour, tirée du livre d’Isaïe - "Est-ce là le jeûne qui me plaît ?" (Is 58, 1-9a) – Dieu réprouve les hypocrites qui "savent bien faire leurs affaires mais traitent durement ceux qui peinent pour eux ; qui passent leur jeûne en disputes et querelles". C’est "ce que nous faisons lorsque nous ne payons pas le juste prix à ceux qui travaillent pour nous, quand nous les payons au noir, ou ne faisons pas comme veut la loi pour qu’ils puissent nourrir leurs enfants ", a commenté le Saint-Père. Et il y en a beaucoup, parmi les catholiques, qui ont cette attitude, qui se croient "généreux" parce qu’ils font une offrande à l’Église.
Ne pas détourner les gestes du carême
Et le pape François de citer alors cette anecdote qu'il tenait du Père Pedro Arrupe, supérieur général des jésuites (de 1965 à 1983). La scène se déroule juste après la seconde guerre mondiale et le père Arrupe était alors missionnaire au Japon : "Un riche homme d’affaire lui remet une enveloppe avec une offrande pour l’aider dans sa mission, en présence d’un photographe et d’un journaliste. Seulement voilà… l’enveloppe ne contenait que 10 dollars". C’est ce que fait le catholique hypocrite, quand il veut se faire "bien voir", a expliqué le Pape. C’est l’attitude du "vaniteux" qui détourne non pas des fonds, mais les "gestes de prière", de "jeûne", d’"aumône" lors du carême, s’éloignant du chemin de pénitence. Ces détournements sont "les pots-de-vin de la vanité", a souligné le Pape dans une métaphore. "S’il vous plaît, quand vous faites une bonne œuvre ne la détournez pas, c’est pour le Père que vous la faites". C’était la recommandation de Jésus, elle doit être dans tous les esprits aujourd’hui en ce début de Carême : "Quand vous priez faites-le en cachette, quand vous faites l’aumône faites-le sans tambour ni trompette, quand vous jeûnez ne prenez pas un air abattu pour montrer que vous jeûner", a exhorté le souverain pontife.
Comment jeûnons-nous ?
Dans le livre d’Isaïe, il est dit "ce n’est pas en jeûnant comme vous le faites aujourd’hui que vous ferez entendre là-haut votre voix". Le Seigneur s’adresse aux "hypocrites", les mêmes que ceux qui, aujourd’hui, "sous des airs de bon catholique, commettent des actions scandaleuses ", dénonçait le Pape une semaine plus tôt. Et de rappeler, en ce premier vendredi de Carême, les caractéristiques du jeûne qui plaît alors à Dieu : "Faire tomber les chaînes injustes, délier les attaches du joug, rendre la liberté aux opprimés, briser tous les jougs". Ou encore "partager son pain" avec celui qui a faim, "accueillir" chez soi les pauvres sans abri, "couvrir" celui que l’on voit sans vêtement, "ne pas se dérober à son semblable".
"Pensons à ces paroles a exhorté le Saint-Père, pensons à comment nous jeûnons, à comment nous prions et comment nous faisons l’aumône". Rappelons-nous toujours de cet homme qui "après s’être payé un diner à 200 euros, rentre chez lui, et ignore l’affamé rencontré sur son chemin, ne le regarde même pas et poursuit sa route".