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Le célibat des prêtres, est-ce une si bonne idée ?

prêtre, célibat, sacerdoce

© Pixabay

Jean Duchesne - publié le 27/02/17

On attend des prêtres l’obéissance et la pauvreté. Mais la chasteté en est inséparable.

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Un prêtre s’en va pour se marier. Et pas n’importe lequel : un curé de Lyon, qui faisait parler de lui, même en dehors de l’Église, parce qu’il attirait du monde et qu’on le donnait en exemple. Du coup, c’est reparti pour un tour de questionnement à la fois docte et moralisateur : le célibat ecclésiastique, est-ce une si bonne idée ?

Le célibat facultatif ? 

Les raisons pour répondre « non » ne manquent pas. Certains des apôtres étaient mariés, à commencer par saint Pierre, puisqu’il avait une belle-mère (Marc 1, 30-31). Chez les orthodoxes, le célibat n’est imposé qu’aux moines, parmi lesquels on choisit les évêques, et pas aux simples prêtres. Chez les protestants, les pasteurs se marient et, puisqu’il n’y a en général pas de moines, c’est parmi eux que sont choisis les évêques (quand on en garde), sans que ceux-ci doivent quitter leurs familles. La règle du célibat pour le clergé séculier ne s’est imposée que peu à peu et en Occident uniquement. Et l’Église romaine en dispense les prêtres de rite oriental qui sont en communion avec elle, de même que les anglicans et autres luthériens qui la rejoignent.

À ces éléments historiques et comparatifs s’ajoutent aujourd’hui des considérations anthropologiques, qui tendent à présenter la chasteté comme impossible, voire inhumaine et en tout cas malsaine. On est allé jusqu’à insinuer qu’il n’y aurait pratiquement plus d’affaires de pédophilie dans l’Église si les prêtres étaient mariés. Mais l’hypothèse qu’il y aurait proportionnellement davantage de délinquants sexuels dans le clergé que dans d’autres catégories socio-professionnelles ne repose sur rien d’autre que le préjugé que l’activité sexuelle est non seulement un droit, mais encore un devoir pour s’épanouir…

Des arguments qui ne tiennent pas la route

Or s’imaginer qu’il suffit d’avoir une femme sous la main pour n’avoir plus de problèmes, c’est à l’évidence avoir lu de travers Freud et ses épigones. Et puis la liberté se résume-t-elle à ne pas résister à ses instincts ? Et la grandeur de l’homme est-elle fondée sur sa capacité à dissocier sexualité et reproduction, ou bien par la possibilité qui lui est offerte de n’être entièrement conditionné ni par l’une ni par l’autre, mais de les mettre (sans obligation d’y recourir !) au service de l’amour qui s’exprime de bien d’autres manières ?

Un autre argument qui ne tient pas la route pour rendre au moins facultative la discipline adoptée par l’Église latine est que, si les prêtres pouvaient se marier, il y aurait davantage de candidats au sacerdoce et que les communautés chrétiennes s’en porteraient mieux. Ce qui prouve que cela ne résoudrait pas du tout la « crise des vocations », c’est que les Églises (protestantes, anglicanes) qui ont un clergé marié continuent à voir s’éroder les effectifs de leurs congrégations aussi bien que de leur personnel.

Ce qu’enseigne l’Évangile

Reste à se demander si les arguments en faveur en célibat ecclésiastique sont aussi faibles que ceux qui sont avancés pour soutenir l’opinion contraire. Du côté de l’Évangile, il n’y a pas photo. Que Pierre ait eu une belle-mère avant de rencontrer Jésus ne pèse pas lourd face à l’affirmation du même Jésus rapportée en Matthieu (Matt 19, 11-12) : « Il y a des gens qui ne se marient pas car, de naissance, ils en sont incapables ; il y en a qui ne peuvent pas se marier car ils ont été mutilés par les hommes ; il y en a qui ont choisi de ne pas se marier à cause du royaume des Cieux. Celui qui peut comprendre, qu’il comprenne ! ».  Il est donné à certains, en vue de l’avènement du règne de Dieu, de s’abstenir d’activité sexuelle, et comprendre cela est également un don de Dieu qui n’est pas donné à tout le monde.

À cette lumière, même si le départ d’un prêtre pour se marier est un événement assurément triste, ce ne devrait pas être une surprise ni une cause de scandale. On n’est jamais tenté, en effet, que sur les dons reçus et à leur mesure. Un des paradoxes de la foi est que plus on s’y abandonne, plus on reçoit et plus on est exposé au risque de s’approprier ces grâces, de les détourner et ainsi de les rendre stériles. Oui, le chrétien vit dangereusement – le prêtre bien sûr d’une façon particulière dans sa « mise à part », et suprêmement le saint ou la sainte qui, quel que soit son rayonnement et qu’il ou elle soit marié(e) ou non, a bien conscience de ne pouvoir se vanter d’aucun mérite et de rester faillible.

Un radicalisme libérateur

La question à se poser face aux tentations concernant le sacerdoce presbytéral (et la succession apostolique qui en est non pas un dérivé, mais la source) est de savoir si ce que l’on perçoit comme une fidélité nouvelle, plus grande et plus directe à la volonté de Dieu s’écarte ou non de la Tradition de l’Église sans laquelle son appel ne serait pas transmis ni vécu. Dans le cas du célibat ecclésiastique, la priorité n’est pas de mesurer son efficacité pour la gestion des communautés ni pour l’épanouissement personnel de ceux qui sont soumis à cette règle. On parle volontiers du signe prophétique que représente une vie inconditionnellement donnée à Dieu pour être disponible à tous et du témoignage ainsi publié que l’union au Christ suffit à emplir toute une vie. On avance aussi que le prêtre est appelé à agir au nom du Christ qui n’a pas pris femme. Mais peut-être convient-il de voir également la chose moins théologiquement et plus concrètement au niveau historique des retombées ou plutôt des motivations existentielles du dogme.

Dans la Tradition de l’Église, la chasteté est inséparable de l’obéissance et de la pauvreté. C’est ce que l’on appelle les « conseils évangéliques ». Les prêtres promettent de se soumettre à leur évêque et de ne pas s’enrichir. Leur engagement à ne pas se marier en est inséparable. Pourquoi priver le sacerdoce presbytéral du modèle monastique qui lui a permis de s’adapter et se renouveler après la fin des persécutions ? Le clergé dit séculier (celui des prêtres diocésains dans le « siècle », c’est-à-dire le monde) ne saurait être différent du clergé régulier (celui des religieux assujettis à une règle et souvent cloîtrés, hors du monde). Il est platement logique (si ce n’est bêtement mécanique) que le célibat ecclésiastique ait disparu là où l’on a fermé les couvents et que ce soit également là que la sécularisation fait des ravages.

Que la chasteté sacerdotale soit, dans l’Église latine, une règle et non pas un dogme et que cette règle soit, en fonction des circonstances, facultative pour certains de ceux qui sont en communion avec le successeur de Pierre, cela suggère bien que ce n’est pas une contrainte arbitrairement plaquée de l’extérieur, mais une exigence interne de la foi évangélique et du radicalisme dynamisant dont la vie consacrée est comme le moteur, mais qui ne s’impose pas comme une loi universelle et contraignante quel que soit le contexte. Cette radicalité apparaît plutôt comme une libération, un « plus » à proposer et à ne pas sacrifier par facilité, précisément en raison de ce qu’elle illustre et donne de partager de l’abnégation salvatrice du Fils de Dieu fait homme, crucifié et relevé d’entre les morts.

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