“Chaque enfant du film a renouvelé mon énergie de maman d’une jeune fille handicapée.”
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Je viens de recevoir le choc : le film Et les mistrals gagnants d’Anne-Dauphine Julliand. Cinq enfants gravement malades et leurs parents ont accepté d’ouvrir aux spectateurs l’intimité de leur souffrance, pour proclamer en images et en paroles d’enfants leur amour de la vie. Alors que la menace de la mort plane sur leur corps, leur cœur d’enfant choisit la vie. Et le courage de ce choix éclate magistralement et discrètement dans les salles de cinéma de France.
J’ai un peu résisté devant ce film qui choisit de laisser tout discours de côté et de rester à stricte hauteur d’enfant. Ma résistance était celle de l’adulte qui ne veut pas toujours cédé à l’esprit d’enfance, qui ne se résout pas à se simplifier. Et puis, j’ai laissé le film infuser en moi. Et voilà qu’il me délivre doucement sa puissance de vie.
Chacun des cinq enfants pose ce choix de la vie à sa manière, avec originalité. Car on sort de ce film avec cinq vies singulières, impossibles à mélanger. Chacun est unique et prend sa place dans notre cœur et dans ce monde, comme un être indispensable et nécessaire. Ces enfants offrent généreusement, à des milliers de spectateurs, des trésors d’enseignement, que l’on déballe pendant longtemps après avoir vu ce film. Ils accomplissent leur vie d’une manière qui inspire un profond respect. Et chacun de nous peut tirer des forces de leur exemple. Leurs corps torturés inclinent l’intelligence devant le mystère de la souffrance. Chacun d’eux est un être de lumière, qui nous aide à comprendre ce que les malades accomplissent d’essentiel et d’invisible au cœur de notre société. Ces enfants, d’une certaine manière, ont vaincu la maladie. Ce qu’ils sont parle plus fort que le mal qui les touche. La vie de ces enfants est réussie.
Charles, la peau à vif
Cet enfant, dont les plaies se rappellent à lui à chaque instant, n’est héroïquement pas tourné vers lui-même. Il s’est ouvert à celui qu’il côtoie, Jason, dont le moral est moins solide que le sien, pour l’aider par son amitié à porter ses propres peines. Quelle beauté et bonté dans cette attitude ! Il m’enseigne que pour rester debout, on peut choisir de s’occuper d’un plus fragile que soi, pour faire jaillir en soi les forces que l’on croyait ne plus posséder.
Ambre, aux lèvres bleuies par un cœur et des poumons défaillants
Elle m’a appris que réaliser un talent que l’on porte en soi ou une activité aimée (pour elle, le théatre, avec prédilection pour les rôles et déguisements de princesses et aussi le sport ) est un moteur de vie, une manière de se donner et de rester vraiment soi-même, une respiration quand le souffle est court.
Imad, au sang qui s’empoisonne
En le voyant et l’écoutant, lui le petit étranger venu d’Algérie, j’ai saisi qu’on puise aussi dans sa culture pour traverser l’épreuve. Son phrasé et son accent, typiques, mettaient si joliment en musique la sagesse de son peuple d’origine. Ses paroles, universelles, étaient teintées de ce qu’il peut tirer d’un état d’esprit qu’on sentait aussi dans les paroles de son père quand il est en conversation avec lui, dans celles de sa mère qui, tout en versant elle-même une larme, ne le laisse pas s’apitoyer sur lui-même, face à un soin difficile. C’était beau cette fierté dans les pirouettes face aux difficultés (irrésistible description des gestes impressionnants d’une greffe, “on va m’ouvrir”, “on va m’emballer”), cette sagesse précoce qui sait discerner l’essentiel : “Je sais, pour vous, c’est difficile, mais pas pour moi”. Que ne redevient-on comme un enfant ?
Tugdual, face au cancer
De lui, j’ai su, à nouveau, que la nature et sa beauté sont une grande ressource et consolation face au mal. Cet enfant contemplatif et artiste, pianiste, diffusait de la paix. Et rappelait de ne pas oublier la prière, qui est aussi réserve de beauté. Tugdual, aux yeux perdus dans quelque méditation, caressait les bourgeons fragiles de plantes, d’une main délicate à force d’être faible. Jardinier de son âme, plus que de la terre trop lourde pour lui.
Camille, aux os malades
Aux postures de lutteur et sa famille de demi, 38 ans et demi, 35 ans et demi, 5 ans et demi, etc. Il m’a rappelé que la vie n’est pas la vie sans humour, sans rire et sans sourire. Et que rien n’interdit de rire, même pas la mort.
Merci, les enfants ! Chacun de vous a renouvelé mon énergie de maman d’une jeune fille handicapée. Vous qui n’êtes pas mes enfants, vous avez, grâce à la distance, mis en lumière ce que je peux parfois perdre de vue dans l’extrême proximité avec mon propre enfant. Vous me permettez de redécouvrir en Philippine la beauté de sa vie et sa manière unique de la porter. Et cela est un service essentiel que vous me rendez sans le savoir. Que je n’oublie pas, face à ma fille qui ne peut et ne sait pas parler, ce qui se passe en elle à mon insu, ce formidable travail de vie que vous avez exprimé subtilement. Que je ne me laisse pas aveugler par son handicap. Merci, les enfants.
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https://www.youtube.com/watch?v=Fd8X4n_Ki0E