Certains contemporains de Henry VI disaient qu’il avait plus de qualités pour être moine que roi…L’Église regorge de trésors spirituels magnifiques. Parmi ces trésors se trouvent les prières que les fidèles récitent et méditent avec beaucoup de ferveur. Certaines sont intemporelles, tel le « Pater Noster » qui a été enseigné par le Christ lui-même aux Apôtres, d’autres nous viennent directement des saints qui peuplent le Royaume des Cieux…
Mais il existe des prières méconnues qui ne demandent qu’à être redécouvertes. Voici l’une d’entre elles, que l’on nomme « la Prière du Fondateur », attribuée au roi Henry VI d’Angleterre (1421-1471) :
« Domine, Jesu Christe, qui me creasti, redemisti, et preordinasti ad hoc quod sum ; Tu scis quae de me facere vis ; fac de me secundum voluntatem tuam cum misericordia. Amen. »
« Seigneur, Jésus Christ, vous qui m’avez créé, sauvé et prédestiné à être ce que je suis ; Vous savez ce que vous voulez faire de moi ; Faites de moi selon votre volonté et avec miséricorde. Amen. »
Mais qui était Henry VI ?
Henry VI est un de ces rois anglais très peu connus, car peu de faits glorieux marquèrent son règne. Issu de la Maison de Lancastre, il est l’unique fils du roi Henry V et de son épouse, Catherine de Valois. Né le 6 décembre 1421 au château de Windsor, dans une Angleterre déchirée par les batailles sanglantes avec la France, il monta sur le trône d’un des plus prestigieux royaumes du Moyen Âge à l’âge d’à peine neuf mois. Mais ce n’est qu’en novembre 1429 que Henry VI est sacré roi d’Angleterre en l’Abbaye de Westminster. Deux ans après, en décembre 1431, il est couronné roi de France à Paris, en la cathédrale de Notre-Dame.
Roi de France et d’Angleterre, les nombreuses lettres diplomatiques que l’on conserve aujourd’hui du souverain anglais au souverain français, font mentions de cette titulature : « Henry, par la grâce de Dieu, roi de France et d’Angleterre ». Charles VII n’est qu’un « très haut et excellent prince, notre très cher oncle de France »… L’Angleterre était en effet engagée dans une guerre qui n’en finissait plus avec la France : la Guerre de Cent Ans. En vertu du Traité de Troyes, le roi d’Angleterre était l’héritier du roi Charles VI qui avait déshérité son propre fils du trône de France. Mais une certaine Jeanne a su insuffler au cœur des Français le courage dont elle était animée afin de délivrer Orléans et de mener le « Petit Roi de Bourge » pour son couronnement à Reims.
Cette guerre ayant trop duré, le cardinal de Beaufort et le comte de Suffolk proposèrent de conclure une paix avec la France par le moyen d’une alliance. Parmi toutes les princesses du royaume de France, le destin a voulu que l’épouse soit Marguerite d’Anjou, fille du roi René et d’Isabelle de Lorraine. Princesse française courageuse, Marguerite d’Anjou fut une souveraine remplie de qualités à faire envier un monarque alors que son mari était considéré comme un roi vertueux, doux et inoffensif, d’un caractère faible, ignorant l’art de commander et un peu trop dévot. D’ailleurs, certains contemporains de Henry VI disaient qu’il avait plus de qualités pour être moine que roi. De leur union est né Édouard de Westminster, prince de Galles.
La fondation d’Eton College et la grâce d’une prière royale…
C’est dans une Angleterre épuisée et ruinée par les batailles que Henry VI décida de laisser son emprunte à la postérité grâce à deux des plus belles fondations de son règne. En 1440, il fonda le King’s College de Notre-Dame d’Eton près de Windsor (Eton College). Cette école devait, à l’origine, accueillir 70 enfants pauvres qui allaient recevoir une éducation gratuite. Par la suite, ils pouvaient entrer à l’université du King’s College de Cambridge, que Henry VI fonda en 1441. Le roi avait des projets bien ambitieux ! Il n’hésita pas d’octroyer des moyens financiers important et prévoyait de construire la nef la plus grande d’Europe.
Roi très pieu, Henry VI attachait beaucoup d’importance à l’aspect religieux. Si bien qu’au service de la chapelle il nomma 10 prêtres, 10 aumôniers, 16 choristes… 14 messes par jours devaient être dites, ajoutées les prières et les messes pour les âmes du purgatoire… Enfin, la chapelle devait abriter les reliques d’un morceau de la vraie croix et de la sainte couronne d’épine pour la vénération des fidèles. Nul doute, ce monarque anglais voulait que sa fondation soit un des plus hauts lieux de piété. Quoi qu’il en soit, c’est en posant l’acte de fondation d’Eton College que la « Prière du Fondateur » fut écrite par Henry VI.
Mais que nous apprend cette prière ?
Cette dernière peut paraître simple avec notre regard « mortel ». Cependant, elle est remplie d’un sens plus grand que seuls les yeux de la foi peuvent percer. Il faut la méditer avec toute son âme pour goûter les richesses de ses dons spirituels ! Comme un cri suppliant vers le Ciel, elle commence avec ce bel appel au Christ, « Domine, Jesu Christe », et nous invite à nous interroger au sens de notre existence sur terre. Nous qui avons été créés par Dieu le Père, sauvés par le sacrifice de son Fils et « ordonnés » comme ses Enfants, par la grâce du Saint-Esprit lors de notre baptême, nos vies sont insufflées à chaque instant par la puissance du souffle divin. Mais rappelons-nous aussi qu’à chaque battement de nos cœurs nous sommes destinés à faire sa Volonté. Cette prière nous redit combien nous pouvons Lui faire confiance en nous abandonnant entièrement à Lui : « Fac de me secundum voluntatem tuam ». En parvenant à réaliser Sa volonté, c’est dans un cœur à cœur que nous nous approchons de Celui qui est « le chemin, la vérité et la vie ». N’est-il pas l’Alpha et l’Oméga ? Alors qu’attendons-nous, laissons-Lui les commandes de nos vies… Laissons-nous tous simplement être guidés.
En musique
Henry G. Ley et Gabriel Jackson sont deux compositeurs anglais. Chacun a essayé par son talent de redonner une dimension spirituelle et méditative à ce si belle prière.
Par Henry G. Ley :
Par Gabriel Jackson :
La lettre de Henry VI à Charles VII au sujet de son mariage et Marguerite d’Anjou
Transcription de la lettre (ci-dessus) de Henry VI à Charles VII au sujet de son mariage entre lui et Marguerite d’Anjou
À très hault et excellent prince, notre très chier oncle de France, Henry par la grace de Dieu, roy de France et d’Angleterre, salut avec cordial desir de toute bonne et mutuele amour et concorde.
Très hault et excellent prince et notre très chier oncle, nouvellement sont retournez pardevers nous nostre très chier et feal cousin le comte de Suffolk, grant maistre de nostre hostel, et autres noz serviteurs que tant pour le bien de paix, comme pour avoir cognoissance et nous certiffier de voz bon estat et santé et aussi pour vous ouvrir en grant confidence nostre desir au regard du mariaige de nous et de nostre très chiere et très amée compaigne la royne, fille de notre très chier et très amé père le roy de Sicile, avions nagaire envoiez pardevers vous. Lesquelz, après ce que avons par eulx receu voz gracieuses lettres, que ioyeusement avons veues, nous ont certiffié de voz bon estat et santé, et exposé en quante doulceur et l’onneur les avez, pour amour de nous, voulu recevoir et traictier, et faire par voz pais et subgietz gracieusement traictier et recevoir, et comment a leuvre du dit mariaige vous a pleu vacquer et entendre de grant voulenté et bonne affection, et finablement faire vacquer, entendre et communiquer sur la matiere de la dicte paix, et pour le repos et aaise du povre peuple longuement afflict et languissant à l’occasion des pestilensieuses guerres qui tant ont duré, prendre et conclure abstinence pour certain temps, pendant lequel on labourera efficacement de votre part, et de la nostre, à trouver voies et manieres pour parvenir, moyennant la grace de nostre benoist Redempteur, à finale conclusion de paix perpetuele et amoureuse entre nous et les deux royaumes. Auquel bien vous sentons estre entierement, et pareillement sommes nous enclinez et disposez qui nous est le plus souverain bien que puissons en terre avoir et desirer.
De la quels votre disposicion, inclinacion et voulenté, regracions nostre Seigneur de ce et des autres choses dessus dictes, dont nostre dit cousin et les autres devant diz nous ont fait agreable et plaisant relacion, et meismement de ce que nous avez escript par vos dictes lettres, que, pour plus amplement nous declairer votre entencion, et traictier final appointement avecques nous sur le fait de la dicte paix et aussi pour nous visiter et savoir la certaineté de notre bonne prosperité, avez deliberé de briefment envoier pardevers nous de voz gens notables, sommes très joyeux, et vous en remercions si effectueusement et de cueur comme plus povons. Desqueles voz gens desirons la venue, et les verrons joyeusement, voulentiers et de cuer.
Si vous prions, très hault et excellent prince, notre très chier oncle, que pour le brief et bon accomplissement des choses commencées, vous plaise envoier les dessus diz pardevers nous, ainsi que nous escripvez et par eulx et autres venans pardeca, nous certiffier de votre bon estat et prosperité, qui nous sera chose ioyeuse à savoir et oyr ; et samblablement seront de temps en temps envers vous de très bon cueur.
Très hault et excellent prince et notre très chier oncle, nous prions le benoist Filz de Dieu qu’il vous ait en sa saincte garde.
Escript soubz notre signet, en notre parc de Woudestok, le xxj jour d’aoûst.
Henry