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Aleteia vous souhaite une belle et sainte année et vous offre un merveilleux conte de Noël

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Ronald Barakat - publié le 31/12/16
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“Un ange apparut au Père Noël…”Le père Noël, après la corvée nocturne tous azimuts de la nuit de Noël, venait juste de déposer sa hotte, aussi épuisée que lui, quand un ange lui apparut, contre toute habitude : “Félicitations, père Noël, pour cette mission réussie dans des circonstances si difficiles.”

Étonné d’abord de cette apparition exceptionnelle, il se dit qu’enfin un peu de reconnaissance lui parvenait après tous ces siècles de travail annuel, et s’en réjouit : “Ah ! comme c’est aimable de votre part de récompenser mes efforts par cette visite de courtoisie. – Hélas, ce n’en est pas une, père Noël. J’ai été envoyé pour vous assigner une nouvelle mission qui consiste à distribuer des cadeaux aux adultes, cette fois-ci, à la Saint-Sylvestre, dans quelques jours.”

Le vieux bonhomme, encore tout flagada, sursauta : “Quoi ?!! Distribuer des cadeaux aux adultes ! Il ne me manquait plus que ça ! Comme s’ils le méritaient aussi ! Voyez où ils ont conduit l’humanité ! Et puis ce n’est pas dans nos traditions, ni dans ma mission. J’ai été créé pour faire des cadeaux aux enfants, pas aux adultes. Et puisque c’est à la Saint-Sylvestre, allez plutôt confier cette mission à saint Sylvestre, lui-même. Moi, mon nom d’origine c’est saint Nicolas…”

L’envoyé, imperturbable, l’interrogea mélodieusement : “Père Noël, seriez-vous en train de désobéir au Très-Haut ?
– Moi, désobéir au Très-Haut ? C’est un gros mot, ça, désobéir au Très-Haut… allons donc… je n’ai fait que sursauter…
– Bon, alors au travail.”

Le Père Noël continua d’un ton plaintif : “Mais quels cadeaux distribuer ? Ce n’est pas un peu court, comme délai, pour les préparatifs ? Vous me prenez à l’improviste ! Avons-nous le budget pour ça ? Les demandes des adultes sont beaucoup plus coûteuses et capricieuses que celles des enfants ! Ensuite, ils ne sont même pas prévenus ! Il fallait envoyer une annonce bien avant ! Les appeler à rédiger leurs lettres et me les envoyer. Il faudra, de plus, tenir compte de la qualité de leur écriture, illisible et truffée de fautes d’orthographe. Les lettres des enfants sont au moins appliquées et bien calligraphiées.”

L’ange lui répondit : “En effet, vu le court préavis et la situation, nous allons parer au plus pressé et nous en tenir à des cadeaux abstraits, pas concrets…
– Des cadeaux abstraits ? Comment ça, des cadeaux abstraits ?
– Des principes, des valeurs, des notions…
– Ah ! ne me dites surtout pas qu’on va refaire passer la ritournelle de l’amour du prochain, de la tolérance, de la fraternité, de la charité… ces notions reprises depuis des siècles et qui n’ont aucune prise sur le réel !”

L’ange tenta de le rassurer : “Il ne faut pas désespérer, père Noël, surtout en cette période d’Espérance. Si les adultes ne peuvent recevoir toutes ces notions et valeurs d’un coup, n’étant pas habitués, nous pourrions procéder au compte-gouttes et commencer par une seule.
– Et par laquelle ?
– Par celle qu’ils possèdent déjà au fond d’eux-mêmes. En fait c’est un cadeau avec lequel ils sont nés, mais ils n’ont tout simplement pas défait l’emballage et ouvert la boîte.”

Le Père Noël de plus en plus surpris : “Et ce cadeau c’est ? – L’émerveillement… l’émerveillement de soi, de son existence, de sa conscience, de sa présence dans le monde, de cet être fondamental enfoui au fond de soi… partant l’émerveillement de l’autre, quel qu’il soit et qui qu’il soit… par une sorte d’effet miroir. Cet émerveillement développera le sens du Merveilleux et conduira à l’amour… l’amour de soi, partant l’amour de l’autre. S’émerveiller pour pouvoir mieux aimer. S’émerveiller de sa création, de la Création ; de sa vie, de la Vie, qui englobe toute forme de vie.”

Le Père Noël n’était pas rassuré du tout : “Et qu’est-ce qui vous garantit que l’émerveillement sera la panacée contre les maux de cette terre ? – Un émerveillé permanent peut-il faire preuve de violence ? Peut-il être méchant ? Égoïste ? Envieux ? Indifférent ? Buté ? Cruel ? Un illuminé, oui, mais un émerveillé ? – Mais n’y a-t-il pas un risque que cet émerveillé soit frappé d’hébétude ?”

L’ange continua sans se départir de son calme  : “Tout dépendra de l’usage qui sera fait de ce noble sentiment. Pour l’adulte qui ne saura pas s’y prendre, il vaudra mieux, pour son propre salut et celui de l’humanité, être hébété et bon, que bête et méchant.”

Acquis à l’idée, et investi des pouvoirs d’exécution, saint Nicolas alias père Noël, relança son traîneau à la Saint-Sylvestre, lâcha la bride à ses rennes aux quatre coins du globe et s’employa à faire découvrir et ouvrir ce cadeau universel perdu dans les gouffres ténébreux du monde adulte, accaparé jusque-là par les choses superficielles et superflues. Sa hotte pleine à craquer d’émerveillements fut in extremis épuisée sur le coup de minuit.

À la nouvelle année, un nouveau monde adulte émergeait, enchanté et chantant. On voyait des adultes, partout, se tâter d’émerveillement, n’en revenant pas d’être là, d’exister, de se « sentir », d’avoir un corps si bien organisé au sein de cette Organisation Incommensurable, allant de l’infiniment grand à l’infiniment petit ; d’avoir un esprit qui s’émerveille, un esprit merveilleux,  immatériel, conscient, insaisissable, inépuisable… Les gens se voyaient comme des merveilles, se contemplaient et contemplaient leurs semblables, sondaient l’espace étoilé, l’azur ensoleillé, découvraient pour la première fois la faune et la flore, les charmes de la nature, éprouvaient la magie de la vie. Tout leur pesant fardeau tombait en désuétude : leurs identités, coutumes, rites, dogmes, nationalités, races, langues… tout devenait un non-sens face à ce Sens Suprême, face à l’Essentiel, au Fondamental, face au Vivant. Même les plus endurcis, les extrémistes, les fanatiques, abandonnèrent leur dieu pour rencontrer ce nouveau sorti de leur emballage intérieur. Le temps marqua une pause, le travail humain aussi. Les bureaux, les ateliers, les usines, les magasins… se mirent à fonctionner au ralenti. Les journalistes, les écrivains, reçurent la plume de l’ange qu’ils plongèrent dans un encrier abyssal et cristallin, heureux de témoigner de cette extase. Les bons métiers s’exerçaient avec plus d’amour et d’intégrité. Les mauvais étaient remis en question par les travailleurs, comme les usines d’armement dont les ouvriers se mirent en grève. Les adultes des différentes religions, races, langues, cultures, se donnèrent l’accolade. Les étrennes du Nouvel An se confondaient en étreintes. Les malades s’amélioraient, comme par miracle, grâce à cet état d’esprit. Les souffrants étaient soulagés ; les pauvres s’enrichissaient ; les riches se dépouillaient ; les criminels se repentaient… Un monde merveilleux venait de naître de ce monde d’émerveillés.

Le père Noël, émerveillé à son tour, contempla le fruit de ses heures supplémentaires gratuites et remercia le Très-Haut de lui avoir offert cette opportunité d’enchanter le monde en cette nouvelle année. À présent, le tableau se complétait : les adultes avaient rejoint les enfants dans la faculté d’émerveillement. Après avoir donné plus de rêve aux enfants, il y a quelques jours, voici qu’il lui fut donné de transmettre un sens aux adultes : celui du Merveilleux. De son traîneau suspendu entre ciel et ciel, il poussa une bourrasque de satisfaction et un ho-ho-ho plus retentissant qu’à Noël. Il se demanda toutefois s’il n’était pas en train de rêver lui-même… Mais tout ne commence-t-il pas par un rêve ?

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