Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi le vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
“Au Proche-Orient, aucun chrétien ne s’est jamais révolté contre Dieu !”
Pour qu’Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l’avenir d’Aleteia deviendra aussi le vôtre.
*don déductible de l’impôt sur le revenu
Plus d’un an après son enlèvement par un commando de l’État islamique dans le monastère de Mar Elias, à une centaine de kms de Palmyre, en Syrie, et sa libération cinq mois plus tard, dans des conditions rocambolesques, le père Jacques Mourad se trouve aujourd’hui à Sulaymānīyah, dans le Kurdistan irakien. Il s’occupe de réfugiés chrétiens provenant de Qaraqosh, dans la plaine de Ninive, où ces derniers sont venus se réfugier pour fuir l’avancée des djihadistes de Daesh. Au fond de leur faiblesse, affirme-t-il, comme lui, ils sentent “la force de Dieu “.
Après quelques mois passés à Rome, le religieux a voulu retourner au Moyen Orient. Il enseigne le catéchisme aux enfants et les prépare à la communion, en toute simplicité, rapporte Vatican Insider. Après un premier récit à L’Orient le Jour de “l’enfer” vécu lors de son emprisonnement, il raconte à notre confrère italien, Gianni Valente, comment il n’a jamais cessé de célébrer la messe en cachette des djihadistes, dès qu’il le pouvait, au risque de sa vie et de celle de tous les chrétiens – catholiques et orthodoxes – qui faisaient corps autour de lui.
Sa première messe « souterraine »
“Notre première messe, nous avons pu la célébrer à Qaryatayn où les djihadistes nous avaient ramenés – 250 chrétiens et moi – après nous avoir tenus en otage un peu partout. Nous avions trouvé un endroit sous terre, dans un établissement du quartier habité jadis par les chrétiens. Et alors que nous célébrions ensemble cette messe – syro-catholiques et syro-orthodoxes – nous n’en revenions pas du miracle qui était en train de se produire sous nos yeux”, et la peur qui prévalait au début chez les uns et les autres, a fini par s’estomper et disparaître complètement. Depuis cette messe, p. Mourad raconte avoir senti monter en lui “un fort sentiment de gratitude”pour Celui qui l’avait soutenu tout au long de cette épreuve. “Même quand on menaçait de m’égorger si je ne me convertissais pas”.
Cette première messe reste ancrée à jamais dans la mémoire de Mourad. Il y repense à chaque calvaire, comme celui du père Jacques Hamel, le 26 juillet dernier, assassiné sauvagement alors qu’il célébrait la messe, dans sa paroisse à Saint-Étienne-du-Rouvray, près de Rouen, en France.
La force visible de Dieu
Et quand il ne pouvait pas célébrer la messe, que faisait le père Mourad ? Il la chantait, se souvenant du chœur de sa paroisse et des messes célébrées à Mar Moussa. “J’essayais de me transposer dans ma cellule, au monastère”. Il était emprisonné dans une salle de bain fermée par une grosse porte en fer qui ressemblait à la petite chambre de son monastère et, paradoxalement, il essayait, dit-il, de créer “des liens d’amitié avec cet endroit”. Et son esprit vagabondait selon les endroits où il était déplacé. Lors de son emprisonnement à Raqqa, d’où son confrère italien, le père Paolo Dall’Oglio a disparu depuis juillet 2013 dans les mêmes circonstances, il “l’imaginait dans une situation semblable, pas très loin”, jusqu’à sentir sa présence. Il ajoute: “J’étais dans une situation inconfortable mais jamais angoissé (…) Je sentais la grâce vécue par Saint Paul à qui le Seigneur avait dit : ‘Ma grâce te suffit’. Au fond de ma faiblesse, Dieu me révélait Sa force”.
Et c’est l’esprit de tous les chrétiens en Syrie, assure-t-il. Ces derniers se demandent comment tout ce qui arrive est possible puis rendent grâce à Dieu, s’en remettent à Lui, sans jamais se rebeller. « Je n’ai jamais vu personne se retourner contre Lui », témoigne-t-il encore. Alors que les interventions militaires s’intensifient dans le pays contre les djihadistes, ils gardent le cap sur le Christ qui « participe à leur souffrance » et, à travers eux, « demande pardon » au Père « parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font ».
Les mauvaises raisons d’une guerre enlisée
Enfin, interrogé sur les raisons qui entretiennent cette guerre depuis plus de cinq ans, il est de plus en plus évident pour le père Mourad qu’elles sont d’ordre purement “économiques” et rejoint le pape François qui refuse de parler de guerre de religion, au mépris des réactions de haine du groupe État Islamique. Ces raisons sont poussées par une « vraie manie, l’envie féroce et insatiable, d’accumuler », estime-t-il. Mais, s’interroge-t-il, “que voulons-nous ? Plus que les richesses, le pouvoir, le développement moderne, que cherchons-nous ?”.
“Tout le monde s’est mis à accuser les migrants, à rejeter la faute sur eux, comme fit Adam avec Eve au Paradis terrestre”, poursuit le père Mourad, alors que tout le monde sait combien “les choix politiques” sont à la base des souffrances qui “affligent des peuples entiers”. Ceux-ci, a-t-il ajouté en substance, ont “besoin d’aide et de soutien de l’étranger, mais également d’une réflexion sur les responsabilités de chacun, et de “bons et nouveaux choix”. Aucun peuple, selon lui, n’arrivera à se libérer de ces guerres – en Syrie, en Irak, au Yémen – car celles-ci sont nourries par d’autres puissances et d’autres forces, le plus souvent loin de chez elles, formant comme une grande guerre “morcelée” comme dit le Pape. “Par procuration… Sous la table des gouvernements et des institutions internationales”, ajoute le religieux qui déplore à ce propos tant d’incohérences “entre les décisions et stratégies politiques prises et les déclarations de principe qui sont prononcées”, tout particulièrement concernant la situation des réfugiés.