Le Saint-Père priera notamment dans la cellule où mourût saint Maximilien Kolbe (1894-1941) et rencontrera des survivants de la Shoah.En visite pour la première fois aux camps de concentration et d’extermination d’Auschwitz et de Birkenau, en Pologne, le 29 juillet 2016, le pape François se recueillera en silence, sans prononcer de discours. Premier pape à visiter les camps de la mort en juin 1979, Jean-Paul II (1978-2005) avait alors célébré une messe particulièrement émouvante à Birkenau. Venu s’agenouiller dans ce “Golgotha du temps contemporain“, il avait fustigé le système nazi “qui déniait systématiquement l’humanité“. En mai 2006, venu quant à lui “en fils du peuple allemand“, Benoît XVI y avait prononcé un fort discours dans lequel il s’était demandé comment Dieu avait “toléré“ une telle “accumulation de crimes“. Troisième pape à se rendre à Auschwitz et Birkenau, François a choisi pour sa part le silence et le recueillement pour cette visite de deux heures.
Fin juin, en rentrant de son voyage en Arménie, le pape François avait ainsi expliqué aux journalistes qu’il souhaitait se rendre “seul“ dans “ce lieu d’horreurs“ afin de “prier“, souhaitant “que le Seigneur (lui) donne la grâce de pleurer“. S’il ne sera pas totalement seul, il devrait en revanche garder le silence et c’est sur le livre d’or du camp d’Auschwitz que devraient finalement se trouver les seuls mots du pape argentin.
Le souvenir du père Kolbe
Comme ses deux derniers prédécesseurs, le pape François passera à pied sous la célèbre entrée du camp d’Auschwitz surmontée par l’inscription en allemand “Arbeit macht frei“ (le travail rend libre). Puis, à bord d’une petite voiture électrique, il se rendra jusqu’au Block 11, lieu de punition et de torture, et priera en silence sur la “place de l’appel“, là où Maximilien Kolbe s’offrit à la place d’un père de famille, condamné à mourir. Ce geste héroïque, le père franciscain polonais l’accomplit il y a 75 ans exactement, le 29 juillet 1941.
Accueilli par le premier ministre polonais Beata Maria Szydlo, le pape François saluera 10 survivants des camps de la mort. Le dernier d’entre eux lui remettra une bougie. Le pape allumera alors une lampe qu’il laissera sur les lieux. Puis il se rendra en privé dans la cellule où mourut saint Maximilien Kolbe, des suites d’une privation forcée de nourriture et d’une injection de phénol, le 14 août 1941. Le pape signera le livre d’or.
Puis, au camp de Birkenau, le pape François se rendra devant les grandes dalles sombres du monument international dédié aux victimes. Après un temps de prière silencieuse et le dépôt d’une bougie, il saluera 25 “Justes parmi les nations“.
La troisième visite d’un pape
Comme archevêque de Cracovie, Karol Wojtyla fréquente maintes fois le site d’Auschwitz, qui dépend de son diocèse. Il est très logiquement le premier pape à s’y rendre et célèbre le 7 juin 1979 une messe à Birkenau pendant plus de trois heures devant 500 000 fidèles, dont d’anciens déportés portant les tenues rayées d’origine. Dans son homélie, il dénonce un “Golgotha du temps contemporain (…) construit pour la négation de la foi“ et se recueille dans la prison du père franciscain polonais Maximilien Kolbe, qui s’est proposé de prendre la place d’un père de famille condamné à mort. Il est canonisé en tant que martyr trois années plus tard à Rome en présence du dé tenu dont il a pris la place.
Le pontificat de Jean-Paul II est cependant marqué par une décennie difficile à cause du Carmel d’Auschwitz, couvent installé en 1984 à l’intérieur du camp, et vu par la communauté juive internationale comme une tentative de christianisation de ce lieu de mémoire. Les 14 sœurs carmélites quitteront le couvent en 1993 mais y laisseront une croix de sept mètres de haut érigée en 1988.
À son tour, Benoît XVI se rend à Auschwitz le 28 mai 2006, l’année suivant son élection. Enrôlé de force dans les jeunesses hitlériennes à 14 ans, le pape se présente “comme un fils du peuple allemand“, un peuple instrumentalisé, selon lui, par “un groupe de criminels“. Accompagné par le cardinal français Jean-Marie Lustiger, né juif et qui a perdu sa mère à Auschwitz, il rend un vibrant hommage à Jean-Paul II et se demande comment Dieu a “toléré tout cela“.
Le pontife bavarois rencontre des rescapés des camps et prie sur les lieux du martyr de saint Maximilien Kolbe et de la philosophe ashkénaze Edith Stein, carmélite convertie sous le nom de sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix. Le pape visite le centre de dialogue et de prière d’Auschwitz, proche du camp, créé en 1992 sous l’impulsion du cardinal Lustiger. Benoît XVI clôture sa visite par un discours fort au camp de Birkenau dans lequel il fustige “le régime de terreur nazi“ mais dénonce aussi une autre dictature, celle “de Staline et de l’idéologie communiste.