Dans un grand entretien donné aux Echos le 30 juin, le président de la République s’est montré offensif : “Il y a bien une reprise en France et un début d’inversion de la courbe du chômage. C’est un fait indiscutable”. Il n’hésite pas à tacler la droite : “Le discours de la droite est si je puis dire un fond commun de mauvais placements”. Et absout benoîtement la CGT des violences commises lors des manifestations.
Les chères promesses de François Hollande
Surtout, François Hollande sort de sa hotte une nouvelle promesse de baisse de l’imposition sur le revenu des classes moyennes pour 2017 : deux milliards d’euros d’impôts en moins… si la croissance est de 1,7% l’an prochain. “Dix mois avant l’élection présidentielle, cette décision n’est pas exempte de considérations politiques” note sobrement Le Monde, non sans relever que “ce cadeau fiscal arrive beaucoup plus tard que ce que François Hollande avait prévu, et promis”. Promesse tardive mais néanmoins crédible ? Deux jours plus tôt, le premier ministre, Manuel Valls, annonçait “une hausse de 600 millions d’euros pour les entreprises et les ménages” constate RTL.
Sur la réforme du droit du travail, François Hollande affirme que la loi El Khomri “sera votée et promulguée dans les délais prévus” et que s’il ne se trouve pas une majorité à l’Assemblée, “il sera de nouveau recouru à l’article 49-3”. Et botte en touche quant aux critiques de la Cour des comptes qui est “dans son rôle” quand elle avertit.
La Cour des comptes tire la sonnette d’alarme
Les critiques de la Cour des comptes ne sont pourtant pas à l’eau de rose : l’objectif de réduction des dépenses publiques, à 2,7%, du déficit en 2017 présente “un risque élevé de ne pas être atteint”, “alors qu’aucune indication n’est donnée sur les réformes à mettre en œuvre pour l’atteindre et qu’à l’inverse de nombreuses décisions récentes vont conduire à des dépenses supplémentaires importantes” met en garde la Cour des comptes dans un communiqué. Elle estime que “le programme de stabilité” présenté en avril par le gouvernement ne présente pas “les réformes nécessaires pour atteindre l’objectif (…) Au contraire, la hausse programmée des dépenses militaires, les mesures annoncées en début d’année concernant l’emploi, celles en faveur des jeunes, l’atténuation des efforts demandés aux communes et intercommunalités et, surtout, la progression de la masse salariale de la fonction publique vont pousser les dépenses à la hausse”, prévient-elle. En effet, explique le JDD, “L’exécutif a annoncé une série de mesures nouvelles depuis le début de l’année, comme le dégel du point de l’indice des fonctionnaires, l’augmentation de la prime des instituteurs, mais aussi des aides en faveur des jeunes, des agriculteurs ou de l’emploi.”
La Région Ile-de-France “premier financeur de la Marche des fiertés”
L’opposition s’insurge contre ce train de dépenses nouvelles : “Les seuls véritables efforts ont été faits par les collectivités locales, efforts aussitôt dilapidés par le président de la république. La fuite en avant préélectorale de François Hollande est une bombe à retardement” dénonce par exemple sur son site le sénateur Bruno Retailleau (LR). Un exemple de gabegie parmi d’autres est donné par la fondation iFRAP (Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques), rapporte Gabrielle Cluzel sur Boulevard Voltaire : il concerne les logements sociaux pour lesquels “quarante milliards d’euros annuels sont dépensés, soit 2,3 % du PIB, c’est-à-dire deux fois plus que chez nos voisins européens”. Mais la droite n’est pas exempte d’étranges libéralités payées par le contribuable, telles les subsides accordés à la Gay Pride par Valérie Pécresse, présidente LR de la Région Ile-de-France, fière de rappeler dans une interview à Têtu que “la Région est le premier financeur de la Marche des fiertés. Elle donnait 23 000 euros l’année dernière, elle donnera 25 000 euros cette année.”
“Pénibilité” : compteur à gaz
Parmi les mesures gouvernementales du type “usine à gaz”, le compte pénibilité. Il devait s’appliquer dans les entreprises du privé le 1er juillet. Impossible ! selon Pierre Gattaz, le président du Medef : “Nous ne savons pas comment faire le 1er juillet, donc nous n’appliquerons pas”. “Potentiellement, expliqueLe Point, 3 millions de personnes sont concernées, selon le gouvernement qui a retenu dix facteurs, dont quatre en vigueur depuis 2015 : travail de nuit, travail répétitif, en horaires alternants ou milieu hyperbare (sous-marin). Au 1er juillet, six autres doivent entrer en application : postures pénibles, manutentions manuelles de charges, agents chimiques, vibrations mécaniques, températures extrêmes et bruit. “C’est beaucoup trop compliqué, c’est inapplicable”, a expliqué Pierre Gattaz.”
La loi Travail votée pendant les vacances
Côté manifs, les comptes tournent aux mécomptes. La 11e journée de mobilisation nationale contre la Loi travail lancée par l’intersyndicale “CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, UNL et FIDL”, mardi 28 juin, a confirmé l’essoufflement (14 000 à 15 000 personnes entre la Bastille et la place d’Italie selon la préfecture de police et 55 000 personnes selon FO et la CGT contre de 19 000 à 20 000 manifestants selon la police et 60 000 selon les syndicats le 23 juin). Cette fois, la police avait anticipé : “Alors que près de 2 500 policiers ont été mobilisés pour encadrer le cortège entre Bastille et place d’Italie, au moins 27 personnes ont été interpellées avant le départ de la manifestation” relevait RTL. Le lendemain, mercredi 29 juin, s’est déroulé à Matignon le dialogue de sourds convenu entre le gouvernement et les syndicats, CGT en tête, avec Manuel Valls, en présence de la ministre du Travail Myriam El Khomri.
L’ombre du 49-3
Il ne reste quasiment rien du texte initial, mais l’exécutif campe fièrement sur ce rien. La semaine précédente, François Hollande avait répété “qu’il irait “jusqu’au bout” du projet, rappelle la chaîne parlementaire Public Sénat “Parce que c’est essentiel de permettre aux entreprises de pouvoir embaucher davantage, permettre que nous ayons davantage de formation (…) et davantage (…) en matière d’insertion”. Le texte reviendra à l’Assemblée nationale. Attention : “Les Français ne veulent pas d’un passage en force” titrait mardi Le Parisien : “Selon le baromètre Odoxa – France Info – “le Parisien”, plus de 7 Français sur 10 s’opposent à un nouveau recours au 49-3 pour adopter ce texte controversé”. Mais l’exécutif compte sur les vacances estivales pour tempérer les indignations.
Nuit debout se met au vert
Avec les vacances, le mouvement Nuit debout “s’est recouché » constate Eugénie Bastié dans Le Figaro : “La Place de la République s’est vidée peu à peu. Finies les AG à ciel ouvert, finis les stands type fête de l’Huma, finies les commissions-débats. Quelques tags qui demeurent dans la station de métro et sur les dalles de la place sont les derniers vestiges de l’activité révolutionnaire… ” Les prochains rendez-vous se feront au vert : “Notre-Dame-des-Landes, bien sûr, reste l’objectif numéro un après la loi Travail. Les 9-10 juillet, comme chaque année depuis 2013, une grande mobilisation aura lieu sur la ZAD, (…). L’université d’été du Parti socialiste est aussi en ligne de mire des Nuit-deboutistes. Elle se tiendra cette fois à Nantes, soit tout près des zadistes, qui n’hésiteront pas à se mobiliser. Certains parlent aussi de préparer le blocage de la rentrée scolaire”. Bref, le rituel calendrier hexagonal.
60 CRS armés pour 2 400 plages
D’ici là, vive la campagne, la montagne, la plage ! Oublions les terroristes : bronzeurs et baigneurs seront protégés par des CRS armés selon une note interne des services du ministère de l’Intérieur publiée par LCI. 60 CRS armés pour 2 400 plages ? Hum ! Là encore, on est loin, très loin du compte, constate Le JDD qui a interrogé le délégué national CRS du syndicat Alliance. Celui-ci dénonce de multiples impossibilités pratiques à l’application d’une telle mesure qui donnerait de toute façon “une puissance de feu ridicule”. Pour lui, “l’annonce du ministère de l’Intérieur ressemble plus à un “parapluie administratif pour avoir bonne conscience.”” Il n’y a plus qu’à espérer que les terroristes prennent eux-aussi un peu de vacances.
Michel Rocard encensé post-mortem