Mgr Stima Monfort, évêque de Mandochi au sud du pays, s’inquiète de la radicalisation de la minorité musulmane.Lors d’une visite à l’Aide à l’Église en détresse, Mgr Stima Monfort, l’évêque de Mandochi a fait part de sa préoccupation : alors que son pays est réputé pour la coexistence des religions chrétiennes et musulmanes, des prédicateurs musulmans venus du Soudan tentent de mettre en avant un islam radical. Ils se disent insatisfait de l’islam traditionnel local, explique l’évêque, qui assure par ailleurs avoir de bonnes relations avec les chefs religieux musulmans locaux.
“Vous devriez prier pour nos imams”
Signe de l’histoire de coexistence entre les communautés chrétiennes et musulmanes, les clergés des deux religions ont créé un comité christiano-musulman, chargé de résoudre les problèmes. Or, ceux-ci se sont multipliés, notamment après la prière du vendredi, après laquelle des fanatiques musulmans s’en prennent à des chrétiens. Des chefs religieux islamiques ont confié à Mgr Montfort : “Vous devez prier pour les imams, car ils sont mal formés”.
Un pays majoritairement chrétien
Selon une estimation basse, les statistiques avancent 60% de Malawis chrétiens, mais la communauté musulmane, soit 20% de la population, revendique un nombre important de conversions. Au mois de décembre 2015, l’imam et prédicateur égyptien Wahîd Abd al-Salâm Bâlî a ainsi assuré qu’il avait converti 4 000 personnes à l’islam en une semaine. Si Mgr Montfort n’entre pas dans le débat de savoir si les revendications de ce prédicateur reposent sur quelque chose, il confirme que les adeptes des religions animistes, souhaitant embrasser une grande religion sont sensibles à l’islam. Notamment en raison de la polygamie : inacceptable pour l’Église catholique, elle est autorisée pour les musulmans et les nouveaux convertis peuvent donc conserver leur mode de vie familial.
La religion chrétienne, ciment du Malawi
Le Malawi est un petit pays densément peuplé où la pauvreté et le sida restreignent l’espérance de vie moyenne à seulement 43 ans, soit l’un des plus bas d’Afrique. Bien que l’État de la République du Malawi soit laïque, les églises jouent un rôle incontournable socialement et même politiquement. Ainsi, les événements qui ont mis fin à la domination de trente ans du Parti du Congrès malawite, en 1994, ont commencés par une lettre pastorale, lue par les évêques catholiques lors de la Pâques 1992. Il arrive aussi que les partis fassent appel à l’arbitrage du clergé en cas de crise politique, rappelle Ann Maganga, agente du Centre pour la démocratie multipartite au Malawi. “C’est une relation saine entre l’Église et l’État, qui concourt au progrès de la démocratie dans le pays”, assure-t-elle.
Menace extérieure
Or, l’arrivée de fondamentalistes qui prétendent enseigner aux autochtones le “vrai islam”, au détriment de la cohabitation qui prévalait jusqu’alors, menace l’équilibre du pays. Les prédicateurs ont des soutiens financiers importants et proposent à certains étudiants triés sur le volet de se rendre en Arabie saoudite pour être formés. Lorsqu’ils rentrent au pays, leur vision de l’islam a changé.