Entretien avec Frère Simon-Pierre Lessard interrogé par “Le Verbe” suite à la publication de l’Exhortation apostolique du pape François.
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En réponse à l’intérêt suscité par le dernier article du blogueur Simon-Pierre Lessard publié sur Le Verbe, ce dernier a jugé pertinent de préciser quelques points et d’approfondir la réflexion autour de la dernière exhortation apostolique Amoris Laetitia.
Le Verbe : Dans un article publié sur notre site Internet, vous affirmez qu’il faut lire les écrits du pape François selon les principes d’une herméneutique de la continuité. Toutefois, dans la récente Exhortation apostolique Amoris Laetitia plusieurs personnes semblent trouver difficile de faire une telle lecture au sujet de la discipline de l’Église envers les divorcés-remariés. Comment lisez-vous ce texte?
Frère Simon-Pierre Lessard : Pour ma part, je pense que l’Exhortation apostolique Amoris Laetitia peut et doit être comprise selon une optique de la continuité. Je pense même qu’il n’est pas si difficile d’interpréter Amoris Laetitia de cette manière. D’ailleurs, il est frappant de voir à quel point le Pape a enraciné ses considérations dans l’enseignement de ses prédécesseurs et de saint Thomas d’Aquin. Je fais miennes les paroles du frère dominicain Thomas Michelet :
“Les documents du magistère doivent être toujours lus et interprétés à la lumière de la doctrine catholique. Si un enseignement précédent n’est pas rappelé, on ne peut pas supposer qu’il est rejeté. Au contraire, si tel était le cas, il faudrait un texte explicite pour l’établir. Et quand bien même, nous devrions alors nous efforcer de le comprendre non pas comme un changement, mais comme un approfondissement, un développement dans l’ordre de l’explicitation de ce que l’Église a toujours cru.”
Mais le Pape ne change-t-il pas l’enseignement de l’Église quand il affirme : “Il n’est plus possible de dire que tous ceux qui se trouvent dans une certaine situation dite ‘‘irrégulière’’ vivent dans une situation de péché mortel, privés de la grâce sanctifiante” (AL n°301).
Pas du tout ! Le Pape ne dit certainement pas que l’on peut divorcer et contracter une nouvelle union sans pécher gravement. Cela serait manifestement contraire à ce qu’affirme le Catéchisme (CEC n°2384). Le Pape rappelle plutôt que des circonstances peuvent atténuer la responsabilité d’un péché et que l’on ne peut dès lors jamais juger l’âme d’autrui seulement à partir d’une situation de vie extérieure. Le Pape nous exhorte donc comme Jésus à ne pas juger ni condamner notre prochain.
Mais justement, si une personne dans sa conscience ne pense pas pécher, pense honnêtement être en état de grâce, ne peut-elle pas alors communier?
Selon le canon 915, l’Église n’admet pas à la communion les personnes qui s’obstinent à demeurer dans une situation qui implique de péché gravement et manifestement. Remarquez que l’Église ne demande pas aux prêtres de lire dans les âmes des fidèles pour voir s’ils sont ou non en état de grâce. Cela Dieu seul peut le voir !
Ainsi, même si certaines personnes dans une situation matrimoniale irrégulière se pensaient en conscience (à tort ou à raison) être en état de grâce, ils ne pourraient tout de même pas communier à cause de leur situation au for externe, c’est-à-dire observable par tous. Une discipline semblable s’applique pour les croyants qui ne sont pas en pleine communion avec l’Église catholique, comme pour les orthodoxes et les protestants. Lire la suite sur Le Verbe.com