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Le virus Zika menace de faire exploser le nombre d’avortements clandestins en Amérique latine

Pro Abortion Demonstration In Buenos Aires

Célébration de la "Journée de la lutte pour la légalisation et la dépénalisation de l'avortement en Amérique latine et dans les Caraïbes". Une manifestation a lieu devant le Congrès à Buenos Aires pour sensibiliser sur les décès causés par des avortements illégaux et exiger une loi qui légalise et réglemente la pratique des avortements dans tout le pays © PATRICIO MURPHY / BRAZIL PHOTO PRESS

Jean-Claude Gerez - publié le 12/02/16

L’épidémie et son lien avéré avec la microcéphalie infantile ont poussé les autorités de certains pays latino américains à conseiller aux femmes d’éviter toute grossesse.

Une recommandation difficile à suivre dans une région où les programmes d’éducation sexuelle sont quasiment inexistants. D’où la crainte d’une explosion du nombre d’avortements clandestins.

Il ne se passe pas un jour sans que les autorités sanitaires des pays du continent latino américain ne diffusent des messages de prévention pour lutter contre la prolifération du moustique Aedes aegypti, responsable de la propagation du virus Zika. Mais c’est désormais la manière d’éviter les cas de microcéphalie chez les nourrissons qui mobilise les opinions du continent.

Récemment, les gouvernements de pays comme l’Équateur, la Colombie, le Salvador, Porto Rico, la République Dominicaine, le Honduras et le Panama ont été jusqu’à demander officiellement à leurs compatriotes d’éviter les grossesses. Au Venezuela, des campagnes permanentes d’information s’adressent directement aux femmes pour leur rappeler les risques d’une grossesse, qu’elle soit ou non désirée.

Accès difficile à la contraception

De ce fait, l’utilisation de préservatifs et des moyens modernes de contraception sont présentés, y compris par les autorités religieuses, comme les moyens les plus efficaces de lutter contre les grossesses qui pourraient amener la naissance de bébés atteints de microcéphalie. Mais ces messages se heurtent à une réalité. Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), 24 millions de femmes n’ont en effet pas accès à des méthodes contraceptives modernes sur le continent.

Une situation vécue avec d’autant plus de fébrilité que le virus est en train de se répandre dans l’une des régions du monde où les restrictions en ce qui concerne les interruptions volontaires de grossesse sont les plus importantes. Les polémiques portant sur une possible dépénalisation de l’IVG pour éviter la multiplication des cas de microcéphalie enflent dans différents pays du continent. Des débats motivés par la crainte d’une explosion des avortements clandestins, à commencer par le Brésil.

Selon des chiffres dévoilés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le SUS (Système unique de santé, au Brésil) sur le nombre d’avortements clandestins réalisés dans ce pays (où l’interruption volontaire de grossesse n’est autorisée que dans des cas très limités), plus d’un million d’IVG sont pratiquées chaque année clandestinement dans le pays, entraînant le décès d’une femme sur deux. Selon l’OMS, ces chiffres pourraient connaître une augmentation brutale dans les mois à venir.

56% des grossesses ne sont pas planifiées

Ces craintes sont d’autant plus crédibles que dans le cadre d’une étude continentale réalisée en 2015 par l’Institut Guttmacher, un organisme qui mène des recherches sur le contrôle des naissances et les avortements dans le monde, près de 56% des grossesses ne sont pas planifiées en Amérique latine et dans les Caraïbes. Le simple accès à des préservatifs, à des contraceptifs pharmacologiques (comme la pilule) ou intra utérins est compliqué pour de nombreuses femmes en âge d’être fertile ; 33% des femmes haïtiennes sont dans ce cas. Tout comme 17% des Guatémaltèques, 15% des Argentines et 12% des Salvadoriennes. Des difficultés d’accès autant économiques que socioculturelles dans une région du monde marquée, de surcroît, par des taux de violence sexuelle très élevés.

Hausse des IVG clandestines

Résultat ? Face aux craintes de microcéphalies, de plus en plus de femmes optent donc pour les interruptions volontaires de grossesse clandestines. De quoi susciter des débats, parfois houleux. Comme au Brésil, qui a déjà recensé 4 783 cas de microcéphalie, où les organisations de défense des droits des femmes, notamment ceux liés à la reproduction, ont exigé que soit révisées sans tarder les lois contre l’avortement. Une démarche par ailleurs récemment soutenue par José Gomes Temporao, l’ancien ministre brésilien de la Santé, qui a déclaré vouloir demander au Tribunal suprême fédéral (la Cour Suprême au Brésil) la dépénalisation de l’avortement.

Des débats existent en réalité un peu partout sur tout le continent et les contenus dépendent évidemment des législations locales en vigueur. Par exemple, au Mexique, au Belize et au Panama, la loi permet l’interruption de grossesse pour malformations fœtales. Au Brésil, l’IVG n’est autorisée que si le fœtus souffre d’anencéphalie ou présente des risques de mort pour la mère. Dans d’autres pays, comme l’Argentine, l’IVG est possible si la santé physique ou psychologique de la mère comporte un risque. En République dominicaine, au Chili, au Salvador, en Haïti, au Honduras, au Nicaragua et au Surinam, l’avortement est totalement interdit.

Face à ces cadres légaux, les organisations qui travaillent sur les droits de la reproduction redoutent que la crainte de microcéphalie n’entraîne une augmentation importante d’avortements clandestins. “L’expérience nous dit que, malgré les interdictions, lorsque les femmes n’ont pas une grossesse désirée, en particulier les jeunes et celles qui n’ont pas de moyens financiers, elles finissent par opter pour des formes d’avortement peu ou pas sûres, quitte à mettre en danger leur santé, voire même leur vie.”

Jean-Claude Gerez est correspondant d’Aleteia en Amérique latine.

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