Et ce malgré le contexte difficile dans lequel les chrétiens vivent, a souligné le cardinal guinéen à son retour de l'Hexagone.
Le cardinal guinéen Robert Sarah a été reçu lundi matin par le pape François. Une audience privée pour le préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, qui vient de rentrer d’un voyage en France. Cette visite dans l’Hexagone intervenait à l’occasion de la sortie de son ouvrage Dieu ou rien, entretiens sur la foi, écrit en collaboration avec le journaliste et écrivain Nicolas Diat.
Le cardinal Sarah, qui a été pendant plusieurs années à la tête du Conseil pontifical Cor Unum, connaît bien la France où il a vécu, notamment durant ses études théologiques. Il porte sur la société française un regard à la fois bienveillant et optimiste, mais aussi très lucide, évoquant un cruel manque de Dieu. Interrogé par Hélène Destombes, de Radio Vatican, il souligne par ailleurs la nécessité de promouvoir un dialogue entre les religions pour lutter contre le fondamentalisme.
Dans quel état d’esprit revenez-vous de France ?
Mgr Sarah : Ce qui me réjouit, c’est vraiment de voir que la fille aînée de l’Église, quelles que soient les difficultés qu’elle traverse, veut demeurer la fille aînée de l’Église, témoigner de sa foi dans un contexte difficile. Je vois cette volonté à travers les jeunes que j’ai vus, à travers les paroisses que j’ai visitées. J’ai trouvé une Église qui donne de l’espérance et en tout cas pour ma part, j’ai pu dire que l’Église de France est vivante et belle malgré le contexte difficile dans lequel les chrétiens vivent.
Quelles sont les préoccupations exprimées par les catholiques français ? Qu’avez-vous perçu ?
Mgr Sarah : Je crois que nous pouvons sincèrement, humblement, reconnaître qu’il se développe aujourd’hui, notamment en Occident, en France, un relativisme moral et religieux, une grave perte des valeurs, une désorientation des esprits, provoqués, peut-être, par un libéralisme sans limites. Même à l’intérieur de l’Église catholique se manifeste une certaine confusion sur des questions doctrinales, morales ou disciplinaires fondamentales. Je pense que les chrétiens veulent vraiment entendre une parole forte, qui réconforte leurs convictions, leur foi. Benoît XVI avait dit, un mois je crois avant son élection, que la crise que traverse aujourd’hui l’Occident ne s’est jamais vérifiée au cours de l’histoire de l’humanité, le fait d’exclure Dieu. Je crois que la grande difficulté aujourd’hui, c’est de retrouver Dieu, ramener les hommes à Dieu parce que Dieu n’est pas éloigné, Il n’est pas mort, Il est avec nous. Mais c’est nous qui nous éloignons.
Vous avez senti ce manque de Dieu en France ? C’est particulièrement visible, plus qu’en Italie, par exemple ?
Mgr Sarah : Je ne dirais pas qu’il y a une grande différence, même si, disons, l’Italie a encore plus de prêtres. Il y a peut-être une pratique plus soutenue mais je crois que les mêmes difficultés se retrouvent aussi en Italie. Moins peut-être. Ici, je crois que cette absence de Dieu se voit par exemple par cette volonté de vouloir légiférer à la place de Dieu sur des questions fondamentales comme le mariage, la vie conjugale, la famille. Ou bien maintenant, on va rediscuter sur l’euthanasie. On voit donc quand même une force qui s’oriente vers une absence de plus en plus significative de Dieu où l’homme prend la place de Dieu pour légiférer, en tout cas pour orienter la société comme si Dieu n’existait pas.
Votre visite en France intervient également deux mois après les attaques meurtrières à Paris. On sent un climat tendu entre les religions alors que de nombreuses initiatives ont été mises en place pour favoriser, notamment le dialogue islamo-chrétien ?