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Neuvaine pour la France : « Je suis venu jeter un feu sur la terre » (Luc 12, 49)

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La Neuvaine - publié le 20/02/15
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« Le Carême est le rappel urgent à sauver le monde, rien de moins », affirme cette semaine le père Guilhem Lecoq dans sa méditation.
Comme elle avait du sens la parole du Christ… La Bonne Nouvelle du Salut était donc, dans l’esprit-même du Fils de Dieu, un feu puissant qui devait tout brûler sur son passage, tout atteindre ! Et qui devait se répandre jusqu’aux extrémités de la terre ! Voilà ce qui était confié par le Messie. Confié à son Église, confié à tous les hommes de bonne volonté qui devaient se réjouir de ce Salut qui leur était offert : le feu de la foi, irrésistible feu de joie dont les Apôtres se sont fait les ardents propagateurs. Et le monde en fut bouleversé, et l’Église en fut sanctifiée, et la France en fut la première capitale…

2 000 ans ont passé. Et ce feu, si puissant, si persévérant, si déterminé, qui avait su franchir tous les obstacles et toutes les époques et continuer de brûler quand même : voilà que ce feu s’est appauvri, refroidi au point de disparaître ? « Lorsque le fils de l’homme reviendra : retrouvera-t-il la foi sur la terre ? » (Luc, 18, 8). Retrouvera-t-il le trésor confié qui devait porter du fruit et rapporter au centuple ? Retrouvera-t-il le Feu en train de consumer toutes choses ? Hélas aujourd’hui le monde est dans la glace, l’Église s’est presque éteinte, et la France toute entière recouverte de cendres… La cendre d’un feu perdu, la cendre d’une Foi oubliée… Comment se peut-il qu’un feu ne brûle pas !? C’est pourtant son principe. Comment se peut-il que la lumière n’éclaire pas les ténèbres ? Comment se peut-il que la Vérité ne triomphe pas du mensonge ? Comment se peut-il que les choses d’en bas ne cèdent pas la place aux choses d’en haut ? Et que les hommes appelés à l’éternité s’en soient retournés à creuser leur tombeau ? Cela ne se peut et pourtant cela est. Et, comme devant Jérusalem, le Christ pleura…

Oui ! Nous voyons le mal se répandre et, semble-t-il, triompher. Le bien n’est pas aimé, le mal est applaudi. La mort partout. Une contre-morale qui s’insinue dans les consciences. Nous voyons le monde se suicider, ayant perdu le sens de sa vie, divaguant sur les chemins de traverse, se cognant aux murs des choses. Un monde pourtant aimé de Dieu ! Qui n’a plus goût à rien sinon à jouer l’adolescent attardé qui ricane salement en bravant les interdits par oisiveté. Le monde court à sa perte avec la joie de l’homme ivre qui ne sait plus ce qu’il fait, ou plutôt qui sait ce qu’il fait mais qui n’en mesure plus les conséquences. Voilà l’homme fait pour les hauteurs et qui en vient à préférer ses bassesses…

La France n’est pas en reste. Une France vieillie trop tôt. Une France qui ne s’aime plus. Une France à l’âme grise comme l’ont ceux qui n’ont plus d’Esperance et qui continuent par habitude de se lever le matin sans plus savoir pourquoi. Et aujourd’hui c’est l’Église elle-même qui est sous la cendre. Elle aussi s’impose depuis trop longtemps ses 40 ans au désert, comme une somnambule qui cherche à se convaincre que la cause de Dieu avance alors que Dieu n’est plus ni vu ni enseigné, ni prié, ni honoré… La cendre répandue partout aujourd’hui : ce n’est même plus le drame romantique de Pompéi, c’est l’holocauste d’Hiroshima.

Et nous,  que faisons-nous ? Nous attendons du Ciel que la Vérité intervienne… Mais elle est déjà venue ! Elle s’est incarnée il y a 2 000 ans et a vaincu au prix de son humanité offerte en sacrifice. Le Christ est venu au milieu de nous, Il s’est fait l’un de nous et nous a montré le chemin. Il nous a enseigné à « Le suivre », à « faire comme Lui », à devenir « d’autres Lui-même ». Afin que, grâce à nous, la vérité continue de progresser, afin que grâce à nous la lumière continue d’éclairer les moindres recoins ténébreux. C’était à nous d’aller partout, c’était à nous de continuer l’œuvre du Seigneur. Et de la continuer dans sa dimension la plus éminente : la dimension du sacrifice, la dimension RÉDEMPTRICE : continuer la Croix du Seigneur. Non seulement pleurer ses propres péchés mais aussi pleurer les péchés des autres et enfin, et surtout les réparer !

Nous ne nous sommes pas méfiés du déclin de l’Église, de la disparition des prêtres, des paroisses qui fermaient, de la chute vertigineuse de la pratique religieuse, de l’absence du sacrement de confirmation pour les quelques enfants survivants dont les parents – sans trop savoir pourquoi – demandaient encore le baptême. Nous ne nous sommes pas méfiés du dédain, jusqu’à l’oubli de la messe chez les chrétiens ! Nous ne nous sommes pas méfiés de la disparition des religieux et des religieuses : toutes ces âmes données en secret au service du bien commun. Du bien commun LE PLUS HAUT et le plus grave: ces âmes sacrées, cachées au fond de leur couvent étaient en train de nous sauver ! Ces âmes rédemptrices dans leur fonction de suppléance, dans leur fonction de prier Dieu nuit et jour et donner leur vie pour porter au Seigneur les noms de tous les hommes. Pour les sauver. Nous ne nous sommes pas méfiés, et nous en payons aujourd’hui un prix exorbitant.

Le monde se damne. Faute d’âmes généreuses qui prient et qui, par leur prière, par leur sacrifice, luttent contre la damnation des autres. Le monde se damne faute de personnes qui donnent leur vie pour le salut de leurs frères. Moïse en plein combat contre les Philistins, Abraham suppliant Dieu de laisser une chance aux habitants de Sodome et Gomorrhe, et le Christ, bras en croix sur sa potence faisant un rempart de son corps et de sa vie entre la justice de Dieu et les hommes qui avaient épuisé la patience divine. Ils étaient là parce que le monde ne méritait pas le Salut : alors ils sont venus mériter à la place du monde.

Ne vous lamentez plus ! Ne pleurez plus sur le monde ! Ne le dénoncez plus, vous l’avez déjà fait et Dieu vous a entendus. Puis Dieu vous a attendus et rien n’est venu !  Car le mystère de la Rédemption est un mystère qui nous implique, qui nous interpelle et nous convoque ! Le Christ est venu sauver et Il a enseigné ce Salut à ses disciples. Se peut-il que la braise se soit éteinte à ce point-là ? Se peut-il que l’homme sente à ce point le cadavre et que personne ne se lève pour agir ? Aurions-nous cru comme Rousseau que la nature humaine se suffirait pour connaitre le bien, vouloir le bien et faire le bien ?  Que ceux qui ont des yeux pour voir contemplent à quel point ils ont eu tort ! Le monde a eu beau creuser vers le bas, il n’a pas trouvé la lumière d’en haut. Il faut regarder en face la réalité… car avoir le front sous la Cendre ce n’est pas pour autant avoir la tête dans le sable !

Le Carême n’est pas, ne peut plus être, une simple discipline de vie, sorte de stoïcisme catholique, ce n’est pas une gentille lutte contre les abus de la table et les paresses du devoir d’état ou encore le choix de remettre un peu de prière dans notre vie. Le Carême est le rappel urgent à sauver le monde, rien de moins. Nos efforts, nos prières, notre ascèse, nos résolutions… ce n’est pas une simple liste de tâches : c’est un amour qui doit renaitre : un amour pour l’humanité qui se damne et dont la damnation doit nous terrifier. Si l’Église, si la France, si nous-mêmes avons failli pendant une période trop longue, il est temps de nous tenir debout, et de raviver la flamme oubliée, et de mettre à nouveau un feu de foi, un amour rédempteur dans notre cœur et notre vie.

Ne pleurez donc plus sur vous-même seulement, mais sur les autres en même temps ! Car si notre conversion nécessite de mettre le mot péché sur nos turpitudes et de redécouvrir l’impérieux besoin d’en demander pardon dans une bonne et belle confession, l’urgence de la situation du monde, nous appelle à aller le sauver. Nous voilà à porter sur nos fronts le deuil de l’ancien feu.Il faudrait, il faut que notre Carême soit l’occasion d’un feu nouveau. Le monde va mal ? Prenez-le en pitié ! Les âmes se damnent ? Sauvez-les ! Ne vous proposez pas de faire votre Carême avec pour seule ambition d’être moins méchant avec votre voisin (même si la sainteté passe par ces petits efforts quotidiens). Mais pensez votre carême comme le Christ a pensé la Rédemption : il faut que le monde soit sauvé, il faut que les hommes de ce monde soient sauvés. Et pour cela il faut qu’un petit nombre, il faut qu’un petit troupeau, il faut que quelques disciples acceptent la mission rédemptrice.

Alors le feu revivra, l’incendie de propagera quand nous aurons compris que le feu, c’est nous. Un carême pour la France, un Carême pour l’Église. 40 jours du deuil de ce que nous n’avons pas su faire et 40 jours d’espérance pour ce qu’il nous reste à faire ! Le Seigneur nous appelle : « Lève-toi et suis moi ! ». Courage j’ai vaincu le monde ! « Les faveurs de Yahvé ne sont pas terminées, ni ses compassions épuisées ;  elles se renouvellent chaque matin, car grande est sa fidélité ! » (Lamentations 3, 22).

L’abbé Guilhem Lecoq est prêtre de la Fraternité Saint-Pierre. Il est aumônier du groupe scout Saint-Michel (Paris, 7e).

 

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