Pas de panique : ni Mgr Kasper ni Mgr Müller ne remettent en cause le caractère sacré du mariage !
Nous sommes maintenant à quelques jours de l’ouverture Synode extraordinaire des évêques, qui se penchera sur les problèmes de la famille dans le monde d’aujourd’hui. On a peut-être du mal à le croire, mais la planète est plus grande que l’Occident où, assurément, la presse a suscité de fausses attentes.
Le cardinal Parolín a été parfaitement clair à ce sujet : le but du Synode n’est pas de modifier la doctrine de l’Eglise, qui dépend de l’Evangile, mais d’aborder les problèmes de la famille et du mariage, afin de définir une stratégie pastorale allant du local au global. Un défi considérable ! Personnellement, cela me comble de joie de savoir que, dans un monde des relativismes et des frivolités, il existe encore une institution qui prenne au sérieux un fait qui accompagnera toute la vie : la famille telle qu’elle est, telle qu’elle nous est échue.
Comment ce synode a-t-il pu ainsi susciter de fausse attentes ? Essentiellement du fait de l’ignorance sur la façon dont se déroule un débat catholique, en particulier quand sont en jeu de grands sujets comme la famille. Rien n’est plus faux que cette idée d’intransigeance souveraine au sein de l’Eglise, même si la tentation existe toujours, et c’est pourquoi il faut la combattre sans merci. Il s’en trouvera toujours pour confondre autorité et immobilité. Pour comprendre comment se déroule un débat dans un contexte catholique, voici cinq éléments clés à considérer.
-1- L’importance de la maxime de saint Augustin
"Unité dans l’essentiel, liberté dans le doute, en toutes choses, la charité." L’essentiel est solide puisqu’il dépend de la doctrine qui émane de l’Evangile et de la tradition. Ainsi, parce que le sol est ferme, les débats sont généralement intenses. Mais, quand l’essentiel est respecté, domine la charité, à ne pas confondre avec les petits sourires et les échanges bienséants de salutations. Dans un débat sérieux, comme celui auquel nous assistons avant le Synode, la charité s’affirme via l’ouverture et le dialogue, en cherchant la vérité, même sans sourire. En revanche, quand l’essentiel n’est pas respecté, la liberté devient diatribe, et la charité est absente. C’est alors que la catholicité se perd. Jusqu’à présent, nous n’avons observé personne dans cette situation, et je suis sûr que nous n’en trouverons pas. Certes, le débat entre les cardinaux Kasper et Müller est, par moments, passionné, mais il suit la logique de saint Augustin. Personne ne remet en cause le caractère sacramentel du mariage, qui est l’essentiel. Aussi ils peuvent discuter très librement de l’attention pastorale à accorder aux divorcés-remariés. D’autres cardinaux ont rejoint la discussion, ce qui est logique, en plus d’être sain. Pas d’inquiétude donc à avoir : au final la charité l’emportera !
-2- Le débat conserve un ordre spécifique conforme au dialogue entre foi et raison
On examine un problème, on soulève une hypothèse, on recherche les arguments pour et contre en recourant à des savoirs très différents (théologiques, scientifiques, sociologiques, historiques…) afin de prendre des décisions fermes et éclairées. Généralement, participent au débat divers acteurs ecclésiastiques à différents moments (laïcs, religieux, prêtres, évêques, théologiens), au travers de consultations. La conviction profonde qui anime chacun est que la réalité est la carte de notre existence, la raison, le moyen qui nous aide à comprendre, et la foi la boussole qui oriente le chemin.
Apparemment, dans le cas mentionné plus haut, avec la permission du Pape, Mgr Kasper et Müller jouent des rôles distincts et sont l’un comme l’autre plus que convaincus de ce qu’ils disent. Le Pape lui-même s’est chargé de soulever l’hypothèse d’un débat sur l’opportunité, dans certains cas, après une période de pénitence, d’admettre à la communion sacramentelle les divorcés remariés. Une chose est sûre, le matériel pour débattre sur ce point sensible abonde, comme sur d’autres. Les décisions pastorales, soyons en sûrs, ne se prendront pas à la légère.