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Homoparentalité : « Peut-on volontairement priver un enfant  de son père ou  de sa mère ? »

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© Andriy Maygutyak/SHUTTERSTO CK

Il est Vivant - L'1visible - publié le 04/07/14

Faut-il autoriser la GPA et la PMA pour les personnes de même sexes ? Débat sans détours entre la journaliste Lili Sans-Gêne et Tugdual Derville, publié dans les colonnes du mensuel l'1visible.

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Après la légalisation du « mariage » et de l’adoption pour les personnes de même sexe, la question de la Procréation médicalement assistée (PMA), et des mères porteuses est dans les esprits. Déjà, des personnes homosexuelles vont à l’étranger pour ces services. Faut-il les légaliser ? Sont-ils une évolution naturelle de la famille ?

Lili Sans-Gêne : Je suis pour la PMA pour les femmes homosexuelles et pour les mères porteuses pour les hommes homosexuels : s’ils s’aiment et qu’ils ont un si grand désir d’avoir un enfant ensemble, je ne vois pas au nom de quoi on leur interdirait de le faire, puisque les progrès de la science le rendent possible ? Peut-on leur refuser le bonheur d’avoir un enfant, sous prétexte que leur mode de vie est différent ?

Tugdual Derville : C’est beau de vouloir engendrer, mais ça ne se fait pas n’importe comment. Tu sais bien que chacun de nous reste conçu de la complémentarité entre un homme et une femme. Cette loi biologique rend la procréation homosexuelle impossible. N’est-ce pas parce que paternité et maternité sont précieuses ? Faut-il changer la nature ? Est-elle si mal faite ? Bien sûr, il faut entendre le désir des adultes, mais c’est en premier le droit et l’intérêt de l’enfant – la personne la plus faible de la société – qu’il faut respecter. Peut-on fabriquer un enfant comme un objet ? Peut-on délibérément le priver de son père ou de sa mère ? Ne faut-il pas lui offrir ce qu’il peut espérer de mieux : un papa et une maman ?

Lili Sans-Gêne : J’ai bien aimé ce qu’a dit Élisabeth Badinter : « Quand on voit la somme de malheurs, de névroses, de douleurs que peut engendrer la famille hétérosexuelle, au nom de quoi une famille homoparentale serait-elle pire ? » Les hétéros ne sont pas de meilleurs parents que les homos !

Tugdual Derville : Cette approche est biaisée. Il ne s’agit pas de savoir qui est meilleur éducateur, mais si on a le droit de priver un enfant de son père ou de sa mère. J’accompagne des familles en difficulté, et c’est vrai qu’aucun parent n’est parfait. Il y a aussi des familles monoparentales, où l’un des deux parents manque, ce qui n’est jamais facile. Mais ces souffrances familiales ne disent pas que père et mère sont interchangeables. Bien au contraire. Un système qui prive délibérément l’enfant de l’un ou l’autre est injuste.

Lili Sans-Gêne : Légaliser les mères porteuses pour les hommes est une autre urgence. En effet, les enfants déjà nés par Gestation pour autrui (GPA) à l’étranger n’ont pas d’état civil français et ne sont pas inscrits sur le livret de famille de leurs parents. C’est honteux. Et hypocrite : surtout, n’offrons pas de cadre légal à ces enfants, comme ça la morale sera sauve…

Tugdual Derville :Tu sais, je trouve plutôt injuste que des hommes s’autorisent à transgresser notre loi bioéthique qui veut protéger de la GPA les enfants et les femmes. Ils vont dans des pays ultra-libéraux ou pauvres pour louer un utérus. À partir de banques d’ovocytes, ils font fabriquer des bébés qu’ils coupent (légalement) de leur mère et ramènent en France. Puis ils s’y posent en victimes ! Comme Axel Kahn (le grand généticien), je pense que la protection de ces enfants devrait passer par une sanction pour les adultes qui ont manipulé ces procréations.

Lili Sans-Gêne : L’accouchement sous X, légal en France, est déjà une GPA déguisée puisque la mère mène sa grossesse à terme tout en sachant qu’elle va abandonner son enfant, sans savoir ce qu’il va devenir… Au moins, quand tu es mère porteuse, tu sais que l’enfant que tu portes sera entouré d’amour.

Tugdual Derville : Attention à la confusion ! Dans le cas de l’accouchement sous X, une femme enceinte en détresse choisit de confier son bébé à l’adoption. Gratuitement, pour qu’il ait une famille, parce qu’elle se sent en danger, ou en grande difficulté pour l’élever. Dans le cas de la GPA, l’abandon du bébé est programmé avant même sa conception, par contrat, contre rémunération ou dédommagement. Les féministes ont raison de contester l’instrumentalisation du corps de la femme.

Lili Sans-Gêne : Mais la GPA, c’est comme confier un bébé à une nounou. Elle le garde au chaud pendant neuf mois puis elle le donne aux parents, rien de plus. Pour le bébé, ce n’est pas pire que s’il avait été adopté…

Tugdual Derville : Comment peux-tu promettre par avance d’abandonner l’enfant que tu auras porté pendant neuf mois ? Avec la nécessité de « ne pas t’y attacher », ou d’avorter s’il est malformé… Nous connaissons de mieux en mieux les interactions qui relient le fœtus à celle qui le porte. Elles sont essentielles pour toute la vie. On aura beau donner à l’enfant de jolies explications, il saura un jour qu’on l’a privé délibérément de sa maman, contre de l’argent ! Quant à l’adoption, elle n’est jamais une réalité facile… Et elle doit aussi obéir à des exigences éthiques.

Lili Sans-Gêne : Et finalement, pourquoi limiter la possibilité de disposer de son corps comme on le souhaite ? Si j’ai envie de louer mon corps pour des services sexuels c’est mon droit, tout comme j’ai le droit de le faire gratuitement. Je ne vois pas en quoi être mère porteuse serait pire. Ces femmes seraient protégées par la loi. Peut-être vaut-il mieux être mère porteuse que de vivre dans la rue…

Tugdual Derville : Quelle violence de savoir que des femmes pauvres se louent à des hommes pour survivre ! Car le corps n’est ni un objet, ni une machine : nous sommes notre corps. La loi française en a déduit un principe d’inaliénabilité ou de non-marchandisation. Contrairement à un objet, un corps n’a pas de prix. Je ne peux pas le vendre en pièces détachées. J’ai le droit de conduire ma voiture neuve à la casse pour la faire couper en rondelles décoratives ! Mais ni le corps de mon enfant, ni le mien. Car ni l’un ni l’autre ne m’appartiennent. La sexualité elle aussi est attachée à la dignité intime du corps humain. C’est pourquoi le viol est un crime très grave. La France reste donc inscrite dans le courant abolitionniste en matière de prostitution : il la considère comme une forme d’aliénation voire d’esclavage…

Lili Sans-Gêne : Parenté et filiation n’ont rien de naturel aujourd’hui. Ce ne sont pas les liens génétiques mais la manifestation de la volonté d’être parent, l’engagement irrévocable et la réalité d’une vie de famille qui font qu’une personne devient un parent. Laissons le droit aux gens d’être parents techniquement, quand ils ne peuvent pas l’être naturellement.

Tugdual Derville : Hé ! Il y a tout de même dans notre pays 75 % des enfants qui vivent avec leurs deux parents. C’est encore la meilleure situation possible, la plus simple et la plus naturelle. La filiation adoptive est magnifique pour donner une famille à un enfant, mais ce n’est pas la norme. Et puis surtout, être parent n’est pas d’abord une question de volonté. C’est un consentement à ce qui est, un accueil de la vie, qui porte aussi sa part de mystère. Sinon pourquoi pas aussi trois ou quatre parents ? C’est justement parce qu’être parent ne dépend pas exclusivement de la volonté des adultes que les êtres humains « naissent libres et égaux en droit ». L’enfant n’étant ni un projet ni un objet maîtrisable, parents et enfants partagent ainsi la même dignité humaine.

Article initialement paru dans le mensuel L’1visible

Tags:
BioéthiqueGPA
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