Le Comité des droits de l’enfant des Nations-Unies réagit durement au rapport présenté par le Saint-Siège sur sa lutte contre la pédophilie. Et en profite pour lui reprocher son opposition à l’avortement et à la contraception.
05/02/2014
Le Comité des droits de l'enfant des Nations-Unies a rendu son rapport mercredi 5 février. Il accuse le Saint-Siège de ne pas avoir reconnu « l'étendue des crimes commis » par des ecclésiastiques sur des enfants, ni d’avoir pris « les mesures nécessaires pour faire face à ces affaires de pédophilie et pour protéger les enfants ». Il l’accuse également d’avoir fait usage de politiques et de pratiques qui ont contribué à la poursuite de ces abus et à l’impunité pour leurs auteurs.
Les 18 experts des droits de l’homme de divers pays, membres dudit comité, se disent « gravement préoccupés » par ces manquements et somment le Saint-Siège de relever immédiatement de ses fonctions toute personne suspectée d'abus sexuels et de déférer son cas aux autorités judiciaires compétentes à des fins d'enquête et de poursuites. Ils exigent aussi que le Vatican rende publiques ses dossiers sur les affaires de pédophilie dans l’Eglise afin que « les auteurs d’abus et ceux qui ont couvert ces crimes » rendent des comptes.
Enfin, le comité va jusqu’à demander une réforme du droit canon afin de garantir une meilleure protection des enfants, grâce à des « règles, des mécanismes et des procédures clairs ».
Le 16 janvier dernier, le Saint-Siège avait réaffirmé devant le comité sa volonté de défendre le droit des enfants et présenté les mesures et initiatives destinées à lutter contre la pédophilie dans l’Eglise. Mgr Silvano Tomasi, observateur permanent du Saint-Siège à l’ONU, pensait que ce dialogue aurait permis de « dissiper la peur que le Saint Siège pourrait défendre les institutions ecclésiales plutôt que les enfants ». Aujourd’hui c’est la douche froide : « On dirait quasiment que le rapport était préparé à l'avance, avant la rencontre avec la délégation du Saint-Siège », déclare aujourd’hui Mgr Silvano Tomasi, sur les ondes de Radio Vatican. Pour lui, ce rapport déforme les faits et semble ne pas tenir compte de l'audition de janvier dernier.
La réaction officielle du Saint-Siège ne s’est pas fait attendre : dans un communiqué, le Vatican fait savoir qu’il « prend acte des Observations Conclusives sur les Rapports Respectifs, observations qui seront soumises à une étude et un examen minutieux », mais regrette certains points listés dans ces Observations qui sont, selon lui, « une tentative d’ingérence dans l’enseignement de l’Eglise Catholique sur la dignité de la personne humaine et dans l’exercice de la liberté religieuse. ».
Dans ce rapport, le comité critique en effet les positions de l’Eglise contre l'avortement et la contraception : après avoir mis en cause sa « conduite discriminatoire » envers les filles, il demande au Vatican de revoir sa position sur l'avortement et dénonce les conséquences négatives pour les adolescents du refus de l'accès à la contraception.
Parmi les réactions, Radio Vatican juge que « les mots sont très durs », et que « la déclaration de l’ONU tombe comme un couperet ». Elle regrette que « le rapport du Comité de l’ONU sur les droits de l’enfance [fasse] l’impasse sur la politique de tolérance zéro appliquée par Benoît XVI » et sur « tout le travail accompli jusqu’ici par la Congrégation pour la doctrine de la Foi » sur ce dossier.
Quant au père Lombardi, le porte-parole du Saint-Siège, il a fait savoir que le Vatican préciserait dans les prochains jours ou les prochaines semaines le mode de fonctionnement de la Commission pastorale pour la protection des mineurs souhaitée par le Pape François.