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Le pape François est-il en train de bâtir l’Eglise de Benoît ?

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Timothy Kirchoff - aleteia - publié le 23/01/14
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Les faits démontrent une continuité plus marquée entre les deux papes que les apparences le laissaient penser.

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Dans les paragraphes 93 à 97 de l’Exhortation apostolique Evangelii Gaudium, le pape François énonce deux formes de « mondanité spirituelle» qu'il considère comme des obstacles au vrai christianisme. Une comparaison de ces passages avec ce que Joseph Ratzinger avait prédit pour l'avenir de l'Église suggère que notre Pape et le Pape émérite partagent une même vision de ce que l'Église tend à devenir dans les années futures. Les obstacles qui se dressent sur le chemin de l'Église et que Ratzinger avait décrits sont précisément ceux que le pape François identifie.

À la fin des années 1960, Ratzinger semblait prédire l'effondrement total du catholicisme culturel et de ses  institutions:

« L'Église de demain émergera de la crise d’aujourd’hui- ce sera une Église qui aura perdu beaucoup. Elle deviendra petite et devra plus ou moins tout reprendre depuis le début. Elle ne sera plus en mesure d'habiter les nombreux édifices qu'elle a bâtis dans la prospérité. Étant donné que le nombre de ses adhérents diminue, elle perdra beaucoup de ses privilèges sociaux. Contrairement à un autre âge, elle sera davantage perçue plus comme une société volontaire, que l’on intègre par une décision libre ».

L'Église, prédisait Ratzinger, aurait perdu son prestige social et beaucoup de ses institutions. Comparons cette assertion avec la condamnation de François de cette forme de mondanité spirituelle qu'il appelle le gnosticisme :

« Cette mondanité spirituelle s’abrite derrière une fascination pour le gain social et politique, ou la fierté face à la faculté de gérer les affaires pratiques, ou une obsession pour des programmes d'auto-assistance et d’autoréalisation. Elle peut aussi se traduire par le souci d'être remarqué, dans une vie sociale faite d’apparences, de réunions, des dîners et des réceptions. Elle peut aussi conduire à une mentalité tournée vers le business, la gestion, les statistiques, les plans et les évaluations, dont le principal bénéficiaire n'est pas le peuple de Dieu, mais l'Église en tant qu'institution ».

En plus de traiter les articles de foi que comme «un ensemble d'idées et de bouts d'information destinés à consoler et à éclairer », ce gnosticisme catholique est axé sur le maintien des institutions et des programmes dans le but de sauver les apparences : il cherche à préserver, précisément, les privilèges sociaux et les édifices institutionnels qui, selon les prédictions de Ratzinger, devraient pouvoir être abandonnés par l’Église.

Parmi les édifices qui devront être abandonnés, il y aura sans nul doute de nombreuses écoles catholiques, des hôpitaux et des organismes de bienfaisance. De nombreuses écoles paroissiales et même des paroisses dans un certain nombre de grandes villes américaines ont été fermées au cours des dernières décennies. La pression culturelle accrue pour ce qu'on appelle par euphémisme « la médecine reproductive » ainsi que la surveillance gouvernementale de l'industrie médicale pourraient conduire, pour beaucoup d’hôpitaux catholiques, même ceux qui ont vu le jour au cours de ces dernières décennies, à être rachetés ou bien fermés. L'institution des unions pour des personnes du même sexe a bien souvent mené à la fermeture des agences d'adoption catholiques, qui étaient auparavant les organismes les plus efficaces.
 
Il y a un moment où nous devrons être prêts à abandonner le prestige qui provient du fait de diriger un grand nombre de programmes «catholiques», pour couper le cordon institutionnel qui ne sert à rien d'autre qu’à identifier l'Église comme étant la mère de toute cette belle charité. Si nous insistons sur l'identité catholique de ces institutions uniquement parce que le catholicisme procure un effet thérapeutique mais qu’il n'a jamais été ou n'est plus réellement le but ultime de notre mission, nous sommes devenues les victimes de cette première forme de mondanité spirituelle.

L'autre forme de mondanité spirituelle, que François qualifie de « néo-pélagianisme prométhéen égocentrique » : une spiritualité basée sur certaines règles ou sur une manifestation historique très particulière de l’identité catholique culturelle et religieuse. D'autres ont analysé et décortiqué le sens profond de cette expression, mais elle, me semble-t-il, bien résumée dans les mots de Ratzinger : « l’étroitesse d'esprit sectaire ainsi que l’obstination pompeuse devront être abandonnées ».
L’adoption obsessionnelle d’un « style catholique particulier d’un autre temps » et l'analyse inquisitoire que le pape François critique tant peuvent facilement s’apparenter à l’idée d'étroitesse d'esprit sectaire. De même, l’obstination pompeuse est manifeste dans l'état d'esprit de ceux qui, pour reprendre les mots de François, « seraient davantage les généraux d'une armée vaincue qu'un simple individu appartenant à une unité qui continue à se battre. »

Comme certains l’ont déjà démontré, plus on compare François et Benoît, plus il est facile de constater que les liens entre eux sont profonds, malgré des différences flagrantes dans leur style respectif. Il y a, cependant, une autre comparaison à faire.

Dans Matthieu 23:5-7, Jésus condamne fermement les scribes et les pharisiens, pour leur trop grande attention envers les apparences, plutôt qu’envers les exigences de la Loi:
 
« Et ils font toutes leurs actions, afin que les hommes les voient; car ils portent de larges phylactères, et ils allongent les franges de leurs vêtements; Ils aiment les premières places dans les festins, et les premiers sièges dans les synagogues; Ils aiment à être salués dans les places publiques, et à être appelés par les hommes: Maître, maître ».
 

Inutile d’avoir beaucoup d'imagination pour percevoir le lien entre la spiritualité toxique des scribes et des pharisiens, et les spiritualités centrées sur l’apparence que François a identifiées comme étant des obstacles à la réalisation de la vocation de l'Église dans le monde. François et Benoît, en présentant leur prescription commune pour l'Église moderne, ne sont pas en train de démontrer leur continuité l’un avec l'autre, mais leur continuité avec le Christ.

Article traduit de l'édition anglaise de Aleteia par Solène Tadié

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