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Le voile islamique: symbole religieux, tradition culturelle ou instrument de discrimination?

velo islámico – fr

© Izabela Zaremba SHUTTERSTOCK

Joven árabe se cubre con el velo

María Angeles Corpas - publié le 21/05/13

Son utilisation soulève un vif débat en Occident et dans les pays musulmans

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Le voile dans l’Islam transcende largement la tradition vestimentaire. Son utilisation possède une haute  valeur symbolique. L’apparence des femmes constitue un langage non verbal qui transmet, selon un certain code, des messages très variés. Il renvoie à des questions cruciales, donnant une indication de l’identité d’origine, la croyance religieuse, le milieu familial ou le statut social.
Dans les pays musulmans, le voile se réfère à la transformation de son rôle comme pilier pour la reproduction de la famille musulmane traditionnelle. En Occident, cette polysémie du voile est source de polémiques qui renvoient à  la capacité de l’Islam à prendre en marche le train de la modernité. Et à son rôle  consistant à  précipiter la transformation des structures de l’Etat.

  1. Le voile dans l’Islam

 Dans l’histoire, le voile musulman n’est pas le seul exemple dans lequel la femme se couvre pour des motifs religieux. Il n’en est pas moins significatif, car il révèle des problèmes essentiels de l’Islam  et de la façon dont il a évolué, en s’adaptant à des situations culturelles différentes.

Dans son origine coranique, la modestie vestimentaire remplissait une fonction précise, à savoir montrer que l’aspect extérieur correspond à la croyance intérieure. Cette cohérence manifestée par la modestie de la tenue, concerne également les hommes: « Dis aux croyants de baisser leurs regards (…) et de garder leur chasteté.. C’est plus pur pour eux. (…) Et dis aux croyantes (…) qu’elles rabattent leur voile sur leurs poitrines; et qu’elles ne montrent pas leurs atours » (Sourate 24, 30-31).

C’est ainsi que le voile ou  hijab ( (littéralement " rideau ") est devenu une façon d’identifier et de protéger la femme musulmane. Dès leur puberté, les petites filles se couvraient la tête. Le concept englobait également l’usage de vêtements  amples, pas trop fins, qui devaient couvrir la tête, en laissant à découvert les mains et la figure. « Ô Prophète! Dis à tes épouses, à tes filles, et aux femmes des croyants, de ramener sur elles leurs grands voiles : elles en seront plus vite reconnues et éviteront d’être offensées. » (Sourate 33, 59).

A partir de là, va se développer une variété de types ou versions de hiyab. Au Pakistan, le voile sera une sorte de foulard de mousseline, de couleurs vives, qui laisse à découvert une partie de la chevelure. Au Magreb, le foulard est plus épais, de couleurs discrètes. Le tchador  désigne le tissu couvrant la tête et l’ensemble du corps des femmes musulmanes chiites, en particulier en Iran. Cette pièce de vêtement peut être ouverte devant et laisse le visage à découvert. Le Niqab saoudien ne montre que les yeux. La Burqa traditionnelle, utilisée surtout en Afghanistan et au Yémen, est un vêtement qui couvre le corps de la tête aux pieds, avec une grille au niveau des yeux permettant de voir sans être vu. Il existe d’autres variétés régionales comme le Shayla, al-amira, le litam ou le khimar.

  1. Pourquoi les femmes musulmanes se voilent-elles?


Comme on l’a vu plus haut,  de ce commandement coranique se dégage un concept de femme musulmane idéale. Cette pudeur extérieure doit être cohérente avec une attitude d’engagement de fidèle croyante. Elle ne doit pas devenir une contrainte. Le port du voile est un acte volontaire conforme à une décision prise en toute liberté, en application du verset coranique « Nulle contrainte en religion!” (sourate. 2, 256). C’est également un acte de protection. Une manière d’identifier l’appartenance de la femme à la communauté de croyants,  l’Oumma ou umma, espace collectif   au sein duquel lui est assigné un rôle particulier, qui implique certaines reconnaissances et des obligations.

On peut en déduire que ce choix offre à la femme musulmane un espace social intégré, conforme à certaines valeurs religieuses et culturelles déterminées. On retrouve des éléments communs venant de l’islam en tant que croyance et comme civilisation. Ainsi que beaucoup d’autres, d’un caractère particulier, conditionnés par des facteurs géo-historiques, pluriels et changeants .

D’un autre côté, pourrait-on dire, cette approche idéale de la femme musulmane croyante, cohérente et libre, n’exclut pas l’existence de fortes limitations à son épanouissement personnel et professionnel. L’obstacle ne résiderait pas dans le fait religieux en soi, mais dans son instrumentalisation pour perpétuer un modèle social réfractaire à une évolution positive et naturelle de la figure féminine. Historiquement dans les pays à majorité musulmane, la tenue féminine traditionnelle a fait partie de la coutume, sans que son utilisation ait fait débat comme choix.

Au cours du XXe siècle, la femme musulmane subit l’influence du féminisme occidental et tente d’adapter ce discours à ses réalités différentes. Notamment, en rejetant l’immobilisme de structures politiques et sociales de nature patriarcale, diamétralement opposées à la modernité.  D’où le refus du port du voile,  qu’elles considèrent comme un rôle prédéterminé et inamovible qui leur serait imposé.

Aujourd’hui beaucoup de femmes se retrouvent prises dans un feu croisé de pressions contradictoires. D’une part, les puissants mouvements de re-islamisation, qui leur dénient le droit à jouer un rôle de plus en plus actif et autonome. De l’autre, l’influence occidentale puissante véhiculée par les médias et qui importe des modèles étrangers à leur  tradition. Cette tension requiert des équilibres difficiles à concilier. S’engager librement dans la voie de la liberté, dans le respect de leur identité, tel est le défi que doivent relever les nouvelles générations, en quête de leurs propres références.

Un des exemples les plus significatifs est représenté par le documentaire  « Islamic Pop » réalisé par Ismail Elmokadem ;  au cœur de ce documentaire,  la top model voilée égyptienne, Yasmine Mohsen), qui  a lancé la création de passerelles avec des lignes de mode pour femmes voilées. Cette initiative pour donner une image moderne et attractive de la jeunesse arabe, mais « dans certaines limites,  lui vaut des adeptes aussi bien que des détracteurs .
 Par conséquent, cette option de porter le voile tout en gardant une attitude critique, ou simplement de choisir de ne pas le porter,  révèle le côté « transgresseur » de la question. A l’opposé, d’autres ont choisi de renforcer sa valeur symbolique en l’utilisant comme instrument de « militantisme ». Dans ce cas, le voile sert à rendre visible la présence musulmane, objectif prioritaire de certaines communautés islamiques en Occident.
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  1. La règlementation du voile comme symbole dans l’espace public


Aux législations démocratiques ont été incorporées des “générations” successives de droits fondamentaux. La première, d’ordre civique et politique, la seconde relative à la reconnaissance d’aspects culturels, sociaux et économiques, et une troisième concernant la protection de la vie privée et la solidarité .

La question du voile se réfère à la fois à des droits individuels et communautaires. De mêm, qu’elle oppose  des facteurs fondés sur la religion et d’autres culturels.

Le droit à la liberté de conscience de l’individu doit être compatible avec un modèle d’Etat défini par le traitement égalitaire de tous les citoyens et toutes les confessions. Mais les principes « personnalistes » et  « institutionnalistes » du droit peuvent entrer en conflit, lorsque des symboles religieux sont présents dans l’espace public.

Par exemple, le modèle laïque français inauguré en 1905 préconise une stricte séparation  du public et du religieux, considéré comme une affaire privée. Dans d’autres cas, comme en Espagne, a été ouverte la possibilité d’une coopération entre l’Etat et les confessions, reconnaissant leurs valeurs et leurs racines sociales.

Cependant, aucun des systèmes juridiques n’a pu éviter les polémiques récurrentes que la présence des symboles religieux  a suscitées. C’est ainsi qu’ont fait débat l’existence de cérémonies religieuses d’Etat, l’assistance de politiques à des actes confessionnels, la présence du crucifix dans les écoles publiques  ou le port du voile.     

  1.  La polémique du voile dans la construction de l’image médiatique de l’Islam en Occident.


Comme on l’a vu, l’Etat doit appliquer les principes juridiques relatifs à la liberté de conscience dans une réglementation concrète de la présence des symboles religieux dans l’espace public. Un mandat complexe entre la neutralité et la reconnaissance de droits. Plus que dans d’autres domaines comme celui du travail, le cadre privilégié de la polémique sur le voile a été l’enseignement.

L’école est un instrument  de diffusion des valeurs civiques communes, spécialement sensible à diverses pressions. L‘interdiction de tous types de symboles a provoqué des réactions, qui considèrent cette interdiction comme discriminatoire. Une question récurrente en France, depuis l’expulsion de Fatima, Leila et Samira de leur collège de Creil en 1989, jusqu’à la loi 2004-228 relative aux symboles. A l’opposé, une permissivité donnerait prise à une utilisation discriminatoire de ces signes extérieurs.

Entre tout permettre et tout interdire, surgit la difficulté de savoir quelle autorité est compétente pour réglementer. En Espagne, les différents Conseils de classe ont eu à se prononcer sur cette affaire, avec des polémiques comme celle de Fátima, au collège de El Escorial en 2001.

La clé essentielle réside dans la question de savoir si le voile est un droit religieux ou une simple tradition culturelle. Comme dans tout conflit entre les interprétations des droits fondamentaux, il est difficile de trouver une solution satisfaisante pour les différents acteurs impliqués.  On peut en conclure que le voileest une question importante, car elle concerne de grands débats  de notre temps. Notamment, l’image de  l’Islam immigré en Europe, son degré d’intégration et  sa compatibilité avec les systèmes juridiques occidentaux. Il appelle également à la construction de communautés islamiques minoritaires et à leur rôle en tant que catalyseurs du changement dans la règlementation étatique du fait religieux.       

Tags:
Islam
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