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Afrique : face aux massacres, les Églises au secours de la paix

PRETRE-CONGO-AFRIQUE-EGLISE-GODONG

Pascal Deloche / GODONG

Un prêtre à Brazzaville, capitale de la République du Congo.

Jean-Baptiste Noé - publié le 21/03/24

En Afrique centrale, les massacres se poursuivent sans que les États parviennent à y mettre fin. Retour de l’esclavage, guerres tribales, désordre démographique… les Églises tentent de rétablir la paix civile mais l’impuissance des autorités, note le géopoliticien Jean-Baptiste Noé, témoigne d’une dissolution des structures sociales.

La liste des massacres qui parcourent ces temps-ci l’Afrique du centre, de l’Atlantique au Soudan, est longue et macabre. 23 janvier : Nigeria, violences dans l’État du Plateau (centre du pays), 55 morts. Attaques contre des écoles, des maisons, des lieux de culte. Quelques jours plus tard, c’est une attaque contre le village de Kwahaslalek conduite par des éleveurs musulmans fulani qui a provoqué la mort d’une trentaine de personnes. 25 février : Burkina Faso, attaque contre une église catholique dans le nord du pays, 15 morts. Définie comme “terroriste” cette attaque n’est malheureusement pas isolée. Depuis 2015, le nombre de morts dans ce pays à l’issue d’attaques de ce type est estimé à 20.000.

Retour de l’esclavage 

Au Soudan, la guerre civile déclenchée en avril 2023 a déjà fait près de 20.000 morts et sept millions de déplacés. Nombreux sont ceux à s’être réfugiés au Tchad voisin, qui n’a nullement les capacités alimentaires et sociales d’accueillir autant de réfugiés. L’état d’urgence alimentaire y a été décrété, appelant l’aide internationale pour venir au secours d’un pays de plus en plus fragilisé par des luttes intestines. Au Soudan du Sud, majoritairement chrétien et qui a obtenu son indépendance contre un Soudan du nord musulman, les massacres de civils se poursuivent également, notamment contre la tribu des Dinka, dont beaucoup de femmes et d’enfants sont enlevés pour être vendus comme esclave. 

Le professeur italien Beatrice Nicolini, dans un remarquable article paru dans la revue Vita e pensiero a résumé la permanence de l’esclavage en Afrique, qui épargne peu de pays. Sénégal, Afrique du Sud, Nigeria, Éthiopie, Mauritanie, Congo comptent parmi les États les plus concernés. Le schéma est très souvent le même : des populations noires, animistes ou chrétiennes, sont enlevées et capturées par des populations blanches musulmanes ou noires mais appartenant à des ethnies traditionnellement esclavagistes. Ce sont essentiellement des femmes, vendues pour des pratiques sexuelles et des enfants, utilisés dans les mines ou dans les combats. Ces traites actuelles retrouvent les chemins, les réseaux et les méthodes de la traite qui avait cours jusqu’à l’arrivée des Européens. Déjà lors de ses voyages dans la Corne de l’Afrique dans les années 1930, Joseph Kessel constatait la permanence de la traite pratiquée par les Arabes qui faisaient transiter les populations par la mer Rouge. Une permanence que les Pères blancs et les colons européens ont réussi à endiguer et à restreindre, mais jamais à éradiquer. 

La dissolution des États

La plupart des massacres que l’on constate aujourd’hui, que ce soit au Nigeria, au Burkina ou en Centrafrique, trouvent leur origine dans cette traite. Ce ne sont pas tant des attaques religieuses ou terroristes, contrairement à ce qu’affirment les autorités locales, mais des attaques à base ethnique, opposant souvent des tribus nomades à des tribus sédentaires, qui possèdent un vernis religieux particulier et qui mettent en avant cette coloration religieuse afin de justifier leurs attaques en mobilisant les populations locales. 

La dissolution des États conjuguée à la tribalisation des sociétés est l’un des facteurs d’accroissement de la violence.

Il est en effet plus valorisant de dire que l’on combat pour le califat ou pour l’islam plutôt que pour de bas motifs de rapine et de traite. La dissolution des États conjuguée à la tribalisation des sociétés est l’un des facteurs d’accroissement de la violence. Le second facteur est celui de la croissance démographique. Celle-ci fait que des espaces autrefois vides sont désormais occupés et que des groupes humains rivaux, mais qui étaient relativement peu en contact sont désormais en friction quotidienne pour l’occupation et l’usage de l’espace. Les pays du Sahel comptaient ainsi 12 millions d’habitants en 1960 contre près de 70 millions aujourd’hui. Le Niger est par exemple passé de 3 millions à 25 millions d’habitants. 

L’action des Églises locales 

Face aux dynamiques de violences et d’attaques, les Églises locales se retrouvent impuissantes à éradiquer les désordres politiques et sociaux, tout en faisant beaucoup pour aider les populations civiles. Les diocèses sont abondamment mobilisés dans la lutte contre les violences et nombreuses sont les associations locales et internationales, catholiques ou protestantes, à œuvrer pour la paix. Le pape François s’est beaucoup investi pour l’Afrique. En se rendant en Centrafrique alors que la guerre civile se poursuivait (2015), en accueillant les dirigeants du Soudan du Sud au Vatican et en s’y rendant en 2022. Une attention multiple qui n’a pas permis de réduire la violence ni d’éteindre les incendies. Mais qui a au moins mis ces attaques sur le devant de la scène mondiale et qui a contribué à ne pas les faire tomber dans l’oubli, ce qui serait les condamner à se poursuivre sans fin. 

Tags:
Afriqueburkina fasoChrétiens au NigeriadiplomatiePape François
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