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François Fillon : la sincérité contre le cirque médiatique ?

France: Francois Fillon holds meeting at  Palais des Congrès

©CITIZENSIDE / Samuel Boivin / Citizenside

FRANCE, Paris: Francois Fillon, candidate for the right-wing Les Republicains (LR) party primaries ahead of the 2017 presidential election and former French prime minister, gestures at a meeting on November 18, 2016 in Paris. - Samuel Boivin

Eléonore de Vulpillières - publié le 22/11/16

Contre toute attente, l'ancien premier ministre a remporté haut la main le premier tour de la primaire de la droite avec 44 % des suffrages.

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La victoire aura été difficile à obtenir. C’est aussi ce qui la rend si magistrale. Crédité de 8% dans les sondages en août, laborieux quatrième homme derrière « le renouveau, c’est Bruno », François Fillon, premier candidat déclaré à la primaire de la droite et du centre aura réussi l’exploit de faire éliminer un ancien président sur le retour et de coiffer sur le poteau un ancien premier ministre archi-favori depuis le début. Les sondages n’ont souligné la dynamique Fillon qu’une dizaine de jours avant le scrutin, et certains, plus prudents que prescripteurs depuis la victoire de Donald Trump aux États-Unis, indiquaient deux jours avant une estimation de « 30 % pour Sarkozy, 30 % pour Juppé, 30 % pour Fillon ». Là où ils ont vu juste, c’est au sujet du faible score des quatre autres, qui se sont partagés les miettes du festin, totalisant à eux quatre moins de 7 % des suffrages. À l’exception de Jean-Frédéric Poisson, seul à ne pas être membre du parti Les Républicains, les perdants ont rapidement fait part de leur ralliement. Nicolas Sarkozy (20%), avec élégance jugent certains, avec logique diront d’autres, tant son inimitié avec Alain Juppé est connue, s’est prononcé pour son ancien premier ministre. Bruno Le Maire, premier à avoir pris la parole après sa lourde défaite (2,4%) a adopté la même attitude. Quant à Nathalie Kosciusko-Morizet (2,6%) et Jean-François Copé (0,3%), ils ont opté pour le maire de Bordeaux – ce qui allait de soi pour la première et paraît moins naturel pour le second, qui a évoqué la fidélité au chiraquisme et la forme de gouvernement par ordonnance qui lui est si chère pour justifier son choix.

Mais pourquoi l’austère François Fillon a-t-il à ce point terrassé ses concurrents ? Menant un début de campagne très axée sur l’économie libérale tendance Thatcher, son programme n’attirait guère les foules. On se souvient davantage d’une nuée de personnes âgées écoutant doctement le candidat du temps de travail non encadré (limité aux 48 heures hebdomadaires plafonnées par le droit européen) qu’elles n’auront de toute façon plus jamais à effectuer. À l’automne, notamment grâce au ralliement de Sens Commun, des thématiques telles que la famille, l’éducation, et plus classiquement la sécurité, l’immigration et la diplomatie ont davantage émergé. Son programme économique est bien resté le même. Mais son audience s’est élargie. Jadis proche de Philippe Séguin avec lequel il avait fait partie du « Cercle », une association de députés à la fois libéraux et gaullistes, Fillon a réussi à minimiser sa responsabilité de premier ministre à l’époque où la diplomatie de la France était très atlantiste. Son discours sur le rapprochement franco-russe, et le désalignement sur les États-Unis plaît. Ne sont-ce que des mots ? Alors que François Hollande et Barack Obama sont sur le départ, que l’Union européenne laisse chaque jour apparaître ses profondes fissures et que Donald Trump et Vladimir Poutine président aux destinées d’une importante partie du monde, cette vision paraît ajustée au tournant qu’est en train de prendre la diplomatie mondiale.

François Fillon, l’anti-bling-bling

Mais outre son programme, il est certain que l’ethos du personnage Fillon a séduit au-delà de tout ce que les sondages auraient pu imaginer. Nicolas Sarkozy a surjoué la carte de l’expérience, mais cette campagne aura visiblement été pour lui l’expérience de trop. La manière dont le perçoivent les électeurs est marquée émotionnellement : on l’adule ou on le déteste. Même à droite. Président, il en a déçu beaucoup ; candidat, ses manières théâtrales ont agacé. Quant à Alain Juppé, il a pâti de son image de candidat favori des médias. Tête sérieuse qui sait également se la jouer jeune, qui « a la super pêche » entre deux parties de beer-pong avec les Jeunes avec Juppé (JAJ), son personnage n’a pas suscité l’engouement du plus grand nombre. À l’inverse de son concurrent qui fut également premier ministre, sa campagne a donné l’impression d’être restée immobile. Il a fait d’excellents scores dans l’est et le centre de Paris, ainsi qu’en Seine-Saint-Denis, là où n’est pas le cœur de cible de la droite.

Quant à François Fillon, il a joué un rôle très habile à l’endroit des médias. Refusant de faire le clown, de lâcher la petite phrase assassine, ou de répondre à des sollicitations qui ne lui convenaient pas (On n’est pas couché de Laurent Ruquier), il a infligé un nombre incalculable de vents aux rois du divertissement, Charline Vanhoenacker en tête, mais aussi aux grands pontes de l’interview politique, Jean-Pierre Elkabbach et David Pujadas. Lors du dernier débat, il a marqué des points en ne se pliant pas au match de boxe à sept que leur proposaient les journalistes politiques en guise de conclusion, transgressant ainsi la règle de la politique spectacle implicitement édictée depuis une vingtaine d’années.

François Fillon, l’anti-bling-bling est parvenu à expliquer, en quelque sorte, que la politique est chose trop sérieuse pour être laissée à des commentateurs sportifs et à des humoristes (« qui ne font plus rire personne », pour paraphraser Manuel Valls). Il a compris que les journalistes étaient encore plus impopulaires que les politiques et que, sans les attaquer frontalement, ni personnellement, comme le fait Marine Le Pen, dénoncer leurs ficelles et leurs manières de procéder recueillerait l’assentiment de la majorité silencieuse. Quand Nicolas Sarkozy joue l’offusqué lorsque David Pujadas l’interroge pour la forme sur les valises d’argent libyen, avant d’enchaîner sur autre chose, cela ne marche pas. Il n’est pas crédible parce qu’il a accompli l’intégralité de sa carrière avec les médias en « sparring partner ». Ce qui n’est pas le cas de Fillon.

« J’aime mon pays, cela peut paraître ringard sur le plateau télé, mais sachez que ça ne l’est pas dans le cœur des Français », « Je défends la famille, l’autorité de l’État, l’amour du pays. Je ne vais pas m’excuser d’avoir des valeurs » aime-t-il à rappeler. Les thèmes qui l’ont porté sont bien davantage identitaires qu’économiques. Moins comptable qu’Alain Juppé, mais plus sincère que Nicolas Sarkozy ?

Pour conclure, je citerai un passage du livre Un président ne devrait pas dire ça, de Gérard Davet et Fabrice Lhomme. Savourons cette hypothèse ébauchée au sujet de la primaire de la droite par François Hollande, président de la République française, sur un des domaines qu’il maîtrise le mieux, la science politique : « Il n’y en aura que deux, Juppé et Sarkozy. Le Maire, c’est Montebourg. Il se vendra le moment venu. Plus à mon avis à Juppé qu’à Sarkozy. Fillon n’a aucune chance. »

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ÉlectionsNicolas SarkozyPolitique
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