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Mossoul : Le difficile accompagnement humanitaire

SYRIA-IRAQ-CONFLICT-REFUGEES

©DELIL SOULEIMAN / AFP

Iraqi refugees who fled Mosul, the last major Iraqi city under the control of the Islamic State (IS) group, due the Iraqi government forces offensive to retake the city, arrive in the desert area of Rajam al-Saliba on the Iraq-Syria border south of al-Hol in Syria's Hassakeh province on October 22, 2016. / AFP PHOTO / DELIL SOULEIMAN

Charlotte d'Ornellas - publié le 24/10/16

La question du déminage de la région reste encore l'un des grands enjeux de la bataille.

Les locaux attendaient cette offensive depuis maintenant deux ans, date à laquelle l’État islamique s’est emparé de la ville, chassant notamment toutes les minorités vivant sur place, parmi lesquelles des chrétiens dont les maisons avaient été marquées du tristement célèbre « noun » de « Nazaréens ».

Mais ce n’est pas tout, pour libérer Mossoul, il faut également libérer la plaine de Ninive qui entoure la ville et dans laquelle de très nombreux villages avaient été pris peu à peu par les combattants islamistes. Irakiens, Kurdes, Américains, Français… Toute la coalition est sur le pied de guerre pour tenter d’imposer, enfin, une réelle défaite à l’État islamique.

Les déplacés ou réfugiés de cette plaine regardent les avancées militaires avec grand intérêt, elle qui signifie qu’ils pourraient rentrer chez eux un jour… Mais il ne suffit pas de « libérer » un village pour que l’installation soit possible, et les associations présentes à leurs côtés le savent mieux que personne.

« Tout le monde parle de l’après-libération, mais il y a un “pendant”»

« D’abord, tout le monde parle de l’après, mais il y a eu un avant et il y a maintenant un pendant, notre travail consiste aujourd’hui à poursuivre celui que nous faisons depuis 2014 à leurs côtés », explique Marc Fromager, directeur de l’Aide à l’Église en détresse (AED) France, qui a déjà dépensé plus de vingt millions d’euros dans la région depuis la terrible crise humanitaire de 2014. L’idée d’une libération prochaine de la plaine de Ninive est évidemment réjouissante, mais Dieu seul sait combien de temps cela prendra, et quel sera l’état dans lequel seront retrouvés les villages. De tout cela dépendra le retour rapide, ou non, des populations.

Des soldats irakiens ont foulé le sol de Qaraqosh, ville chrétienne la plus importante de la plaine, et les « alléluias » de joie n’ont pas tardé à se faire entendre dans le Kurdistan irakien qui accueille depuis deux ans de très nombreux déplacés. Cette liesse populaire réchauffe le coeur, mais l’avenir reste flou. « Nous suivons avec une grande attention les évolutions militaires contre l’État islamique, mais il faut prévoir aussi le déminage potentiel, la reconstruction qui sera sans doute nécessaire, la relance de l’économie indispensable pour un retour, et tout cela est encore très flou puisqu’il est difficile de connaître l’état des villages qui sont libérés ou approchés par les forces de la coalition », explique à son tour François-Xavier Gicquel, chef de mission en Irak pour l’association SOS Chrétiens d’Orient.


Lire aussi “Mossoul : L’analyse d’un plan de bataille”


Toutes les associations tiennent le même discours : il faut tenter d’imaginer les besoins mais ne surtout pas lâcher les actions aujourd’hui en place pour alléger le quotidien de tous les déplacés de cette plaine. « Il faut par exemple occuper les enfants, et continuer les distributions de nourriture évidemment », insiste François-Xavier Gicquel. Marc Fromager approuve : « Pour l’instant, le quotidien reste le même : il faut trouver de quoi manger, de quoi étudier, de quoi se réchauffer… ». La liesse bien légitime n’a pas encore adoucit le quotidien.

De son côté, l’association Fraternité en Irak suit avec grande attention les évolutions de l’offensive et finance déjà le déminage de plusieurs villages kakaïs et chrétiens dans la région. Concrètement, l’association forme des démineurs locaux qui agissent ensuite de manière autonome dans leurs villages et demain dans toute la plaine.

L’État islamique a l’habitude de quitter des lieux minés

Le déminage est un défi que tous savent important : l’État islamique a l’habitude de quitter des lieux minés jusque dans le moindre recoin et il est inimaginable de prévoir un retour sans que des conditions élémentaires de sécurités soient remplies. Difficile de savoir ce qu’il en sera dans tous les villages mais Fraternité en Irak fonde son diagnostique sur ce qui existe déjà : « Fin mai 2016, quelques villages kakaïs de la plaine ont été libérés lors d’une première avancée des peshmergas kurdes. Malheureusement, dans ces premiers villages, l’État islamique a piégé et miné routes, infrastructures, maisons et champs », expliquent-ils. L’enjeu est important lorsque l’on sait que depuis la fin du mois de mai, douze personnes sont mortes à cause de ces mines alors qu’elles venaient récupérer leurs affaires et voir dans quel état étaient leurs maisons.

C’est également l’inquiétude de Mgr Gollnisch, directeur de l’Oeuvre d’Orient, autre institution présente auprès des chrétiens de la région. « Nous attendons de cette intervention une libération rapide et totale des villes chrétiennes de la plaine de Ninive, écrit-il. Cela redonnera aux chrétiens qui le souhaitent l’espoir de pouvoir rentrer chez eux. Cependant cela suppose d’assurer, sans délai, le déminage et le “dépiégeage de cette zone ainsi que le rétablissement des infrastructures de base. » Là encore, l’Oeuvre d’Orient promet d’être aux côtés des chrétiens pour faciliter leur retour, « notamment en soutenant la reconstruction ou la restauration des structures nécessaires pour la vie quotidienne (logements, écoles, dispensaires…) ».

« Mais pour l’instant, personne ne sait réellement ce que les populations trouveront en rentrant chez elle, et les sommes à investir pourraient être très élevées », confie Marc Fromager qui espère que les Américains prendront leur part de ce travail gigantesque, en raison de leur « responsabilité énorme dans l’état du pays ». « Ils l’ont à mon avis déjà prévu ! Lorsqu’ils lancent une guerre, c’est à crédit : ils savent ce qu’ils dépensent mais ils calculent déjà ce qu’ils gagneront en reconstruction derrière », explique-t-il. En attendant, l’AED promet d’être là pour ceux qui attendent ou rentreront demain « parce qu’il ne faut pas oublier qu’ils ont tout laissé en partant, ils n’ont plus rien ».

Mais il veut rester prudent aussi : « Il y a une accélération dans l’offensive, mais il n’est pas dit que des grands mouvements de population auront lieu demain. Ils nous répètent depuis toujours qu’ils ne bougeront pas tant que Mossoul n’est pas libérée. Ils n’ont pas envie de se faire avoir une deuxième fois, la dernière les Kurdes étaient censés les protéger ! »

L’accompagnement humanitaire est donc difficile à prévoir sur cette offensive, mais toutes les organisations et la France est bien représentée  suivent avec attention les évolutions. En attendant, elles poursuivent leur travail bien moins médiatisé que cette offensive, mais qui dure depuis des années. « Ils ont besoin de nous là où ils sont aujourd’hui et nous devons continuer à être là. Nous nous réjouissons avec eux de la libération de telle ou telle ville ou village, mais nous savons aussi qu’ils devront encore être patients », conclut François-Xavier Gicquel.

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