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Si l’on chantait (la gloire de Dieu) ? Épisode 2. Les chants de Taizé

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Comment chante l'Église d'aujourd'hui ? Explication.

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Tandis que les vieux carnets de chant paroissiaux à la couverture de cuir jaunissent tranquillement sous les bancs des églises, Ecclesia Cantic rassemblait, fin mai, près de 500 jeunes à Grenoble. Membres d’une chorale ou non, ces jeunes aiment chanter et surtout chanter la gloire de Dieu par le chant polyphonique (c’est-à-dire à quatre « voix »: soprane, alto, ténor, basse). Ils témoignent du renouvellement du chant liturgique à l’œuvre dans l’Église de France. Un chant qui ne fait pas table rase du passé, mais s’enrichit de sa longue histoire. Du chant grégorien aux chants charismatiques, comment chante l’Église d’aujourd’hui ? Retour (non exhaustif) sur les sensibilités musicales et vocales de ses fidèles…

Épisode 2. Les chants de Taizé

Sur la moquette de l’église de la Réconciliation, des centaines de jeunes prient ensemble, assis par terre ; un refrain méditatif s’élève, répété longuement, émaillé de contre-chants chantés par des solistes, en plusieurs langues. Bienvenue à Taizé !

Cette atmosphère si particulière – que certains qualifieront hâtivement de « babacool », ne doit pas faire oublier que les chants de Taizé sont issus d’un travail musicologique et théologique profond et qu’ils font référence aujourd’hui depuis des dizaines d’années dans le répertoire de l’Église. « Laudate Dominum », « Jésus le Christ, lumière intérieure », « Bless the Lord my soul », « Nada te turbe »… Autant de « tubes » à l’harmonie soignée et bien adaptée pour les assemblées priantes. Nous ne sommes d’ailleurs pas très loin du grégorien (pour les retardataires, allez lire notre épisode 1 !) – source d’inspiration pour Jacques Berthier, le compositeur historique de ces chants (1923-1994) – et de la psalmodie pratiquée par les moines.

« Frère Robert et Jacques Berthier ont tous les deux cherché un mode méditatif, marqué par la répétition d’un verset, le plus souvent tiré de l’Écriture (à l’origine en latin puis dans différentes langues) ou issus d’auteurs spirituels comme le pasteur Bonhoeffer ou Sainte Thérèse d’Avila », raconte Frère Benoît de Taizé. Il est membre de la communauté monastique œcuménique, fondée par Frère Roger en 1940, à Taizé, petite commune de Saône-et-Loire.

S’abandonner dans le chant répétitif

La répétition est sans doute ce qui fait la particularité des chants de Taizé. Pas d’alternance entre refrains et couplets, mais seulement une phrase ou deux répétées pendant plusieurs minutes. « La répétition invite à l’intériorité. Les paroles descendent dans notre cœur au fur et à mesure que nous les répétons », explique le frère Benoît. Faites donc l’essai, le résultat est saisissant ! D’autant plus que ces phrases sont choisies avec soin et portent un sens qui ne s’épuise pas à mesure qu’on les répète.

« Beaucoup de jeunes qui reviennent à Taizé témoignent de cela », assure Frère Benoît. « L’un d’eux m’a dit que dans les transports en commun, tout à coup, un chant de Taizé lui est revenu et qu’il s’est surpris à prier avec.

« Cela me frappe d’autant plus qu’une grande partie des jeunes qui nous rendent visite sont en cheminement… Or, chaque semaine, par le chant nous arrivons à partager l’essentiel de la foi : la relation au Christ ressuscité. C’est un bel apport au mûrissement de la foi chez tous les jeunes qui nous visitent. »

Et selon Frère Benoît, « ce n’est pas tout à fait déconnecté de la tradition : chez les catholiques et les orthodoxes il y a une place pour la répétition. Par exemple le chapelet pour les catholiques ou la prière du Nom de Jésus pour les orthodoxes. »

Simples mais pas simplistes

Et si on s’ennuie quand même au bout d’un moment ? « Les chants s’accompagnent souvent de versets soli (Ndlr solo au pluriel, en latin), chantés par des frères, par-dessus le chœur de l’assemblée », nous rassure Frère Benoît. « Cela rompt la monotonie. Au bout d’un certain temps on pourrait avoir l’impression d’en avoir fait le tour, mais ces versets ajoutent comme des touches de couleurs au tableau. »

Pour Frère Alois, le supérieur de la communauté, « la valeur de la répétition est à contre courant de notre société où il faut toujours quelque chose de nouveau, mais cela répond à une soif profonde chez les jeunes qui peuvent s’abandonner dans cette musique et ces chants répétitifs. »

Pour que la prière se fasse plus profonde, l’exigence dans l’interprétation est de mise. « Les chants méditatifs édités dans le cahier Chants de Taizé sont simples, mais leur utilisation dans une prière commune demande une préparation », explique-t-on sur le site de la communauté.

Surclassés par nos voisins allemands ?

« Par rapport à beaucoup de chants de messe dans les paroisses, ces chants comportent plusieurs voix », souligne Cyril, 28 ans, habitué de Taizé. En contrepartie, « cela demande beaucoup de travail », explique le jeune homme en connaissance de cause.

« Il faut pouvoir utiliser toutes les potentialités de ces chants », abonde Frère Benoît. « Grâce aux quatre voix et aux parties soli, il y a une marge de progression importante. Le chant peut sembler pauvre si on ne chante que la partie soprane. Mais quand on peut y ajouter d’autres voix ou si quelqu’un a la capacité de chanter les versets soli, c’est extraordinaire. »

Pourquoi la qualité du chant à Taizé est-elle si exceptionnelle ? Cyril avance une explication : « En Europe, certains pays ont une culture musicale plus développée que chez nous. » En effet, nos voisins allemands, par exemple, sont beaucoup plus calés en solfège que nous Français. « À part la flûte à bec en 5e B, on n’y connaît pas grand-chose », ironise-t-il.

Arrêtons là le « French bashing », mais reconnaissons que si l’on distribue une partition au début de la messe, le déchiffrage pourra poser problème, ce qui est beaucoup moins le cas en Allemagne.

Chanter en finnois ?

À Taizé, depuis que des milliers de jeunes sont arrivés de toute l’Europe (voire du monde) dans les années 70, on apprend à chanter dans toutes les langues. En début d’après-midi, les répétitions permettent d’exercer sa voix et sa prononciation. « Quand il y a une langue dont la prononciation est peu connue, comme le finnois, une personne dont c’est la langue maternelle prononce les paroles et les fait répéter », indique Cyril.

Le latin est aussi une langue vivante à Taizé, par esprit de communion avec la tradition de l’Église catholique latine, tout comme le slavon ou le grec pour les Églises de rite byzantin.

Comment comprendre alors qu’autant de jeunes soient attirés par ces chants qui peuvent sembler un peu vieillots ? Pour Frère Robert, le responsable des chants à l’époque des premiers chants commandés à Jacques Berthier, dans un article publié en 1986 (Cahiers protestants), la prière ne gagne pas forcément à s’immerger dans « les cultures passagères ».

« Au contraire, un certain dépaysement, qui fait sortir de l’environnement quotidien, permettra peut-être d’avoir un regard intérieur neuf. » Et ainsi, de mener vers l’Éternel.

Tags:
Art sacréchoraleLiturgieMesseMusiquetaize
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