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Offrir l’eau courante aux populations les plus vulnérables, le bon plan de Philippe de Roux

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© Eauetvie.ong

Ondine Debré - publié le 28/09/15

Le 30 septembre, l’ONG Eau et vie deviendra membre de l’organisation internationale Ashoka, fondée aux États-Unis, le plus grand réseau d’entrepreneurs sociaux.

Philippe de Roux est le fondateur et directeur d’Eau et vie. Cette ONG a pour but de contribuer à l’amélioration des conditions de vie dans les bidonvilles grâce à l’accès durable à l’eau courante, la lutte incendie, l’assainissement et la gestion des déchets. Rencontre avec un trublion de la pensée (il est co-fondateur des Poissons Roses, le think tank des jeunes professionnels chrétiens proches du PS) et un entrepreneur idéaliste et avisé à l’énergie communicative.

En 2015, 50% de la population mondiale vit en ville. Une personne sur six vit dans un bidonville. D’ici 2050, 75% de la population sera urbaine. Près de la moitié de cette croissance se fera dans des quartiers précaires. Un exemple suffit à donner la mesure des défis. Au Bangladesh, tous les jours 2 000 nouvelles familles issues de l’exode rural viennent s’installer à Dhaka, la capitale, squatter les trottoirs ou ce qui reste de terrains vagues.

Aleteia : La naissance d’Eau et vie, c’était quand et pourquoi ?
Philippe de Roux : L’ONG est née en 2008. C’est une idée qui m’est venue lors d’une marche sur le chemin des douaniers avec ma femme Emmanuelle en Bretagne. C’est le fruit d’un improbable puzzle d’expériences professionnelles et de connaissance du terrain, après avoir partagé la vie des gens aux Philippines. C’est en travaillant sur les questions de crédit, et du coût énorme que les plus pauvres payaient à des usuriers, que je me suis rendu compte du coût exorbitant de l’eau. Mais à l’époque, je n’avais pas d’expérience en plomberie…

Dans quels pays avez vous décidé d’intervenir et pourquoi ceux là ?
D’abord aux Philippines car c’est un pays que Valérie, mon associée, et moi-même connaissons bien. Il est plus sage de développer un projet nouveau dans un pays connu. J’y avais des relais, en particulier dans les zones de bidonvilles, je parle un peu la langue et je m’y sens comme chez moi. Nous avons ainsi démarré notre pilote dans une zone pour laquelle je travaillais avec Interaide. Par exemple, j’avais recruté comme consultante mon ex responsable des opérations (dans l’ONG de micro-crédit), une personne hors du commun, issue des bidonvilles et qui était à la retraite mais a repris du service pendant une année.

Ensuite le Bangladesh car nous savions les besoins immenses et nous avions de bons contacts grâce à Christian de Boisredon de Sparknews. Nous avons fait une étude de faisabilité  qui avait confirmé les besoins. Enfin, la Côte d’Ivoire car nous voulions tester notre modèle dans une agglomération en pleine croissance en Afrique francophone. Valérie et moi-même avions des contacts sur place.

Quels liens avez vous tissés avec ces populations ? Quelles rencontres marquantes avez vous faites ? Avez-vous un exemple à nous donner ?
La clé de notre succès est la mobilisation communautaire et les relations quotidiennes tissées avec les familles, notamment via le processus de collecte à domicile, via des personnes issues du bidonville. Et nous développons des activités qui soudent les personnes (clean-up day, lutte anti-incendie, formation à l’hygiène). Je me souviens d’une clients au Bangladesh, venant à ma rencontre avec son sari et son voile, me déclarant tout de go que grâce à nous, elle ne souffrait plus de ses diarrhées quotidiennes…

Quels sont vos grands chantiers ?
La méthode fonctionne, elle rend service aux familles des bidonvilles et aux opérateurs. Nous développons nos réseaux dans quatre villes actuellement. Et nous démarrons dans deux nouvelles villes aux Philippines et une nouvelle au Bangladesh (20 000 personnes aujourd’hui, 80 000 dans trois ans). Maintenant, nous sommes en phase de changement d’échelle et de recherche de la viabilité financière. Pour cela, nous levons du capital auprès d’investisseurs sociaux.  Et nous comptons aussi essaimer via des entrepreneurs désireux de dupliquer notre méthode. Le chantier est immense, à la hauteur des besoins…

Quelles sont vos grandes réussites ?
Avoir convaincu les clients des bidonvilles que nous avions une solution de long terme après de nombreuses déceptions, d’expériences sans lendemain ou de fausses promesses. Avoir également convaincu les opérateurs que nous allions leur faire gagner de l’argent. Et enfin avoir fait changer le regard des des responsables politiques à propos de zones grises du tissu urbain pour lesquelles ils se sentaient démunis. L’eau est un point d’entrée très puissant pour faire changer les choses sur d’autres questions (anti-incendie, hygiène, assainissement).

Vos déceptions ?
Que nous n’allions pas assez vite pour lever du capital et des compléments de subvention alors que nous sommes très innovants et que cette question de l’eau en milieu urbain touche des millions de personnes. Notre situation financière est encore très précaire. Que cela n’aille pas assez vite non plus pour pouvoir alimenter en eau des zones défavorisées, qui ne sont jamais prioritaires dans les plans d’urbanisme. Il reste encore un long travail de plaidoyer.

Quels changements espérez vous après cette journée du 30 septembre ou vous allez recevoir ce prix prestigieux ?
Contribuer à faire connaître cette question afin qu’elle devienne prioritaire dans les agendas politiques des décideurs nationaux et internationaux. De ce point de vue, nous avons un partenariat avec le PNUD au Bangladesh, qui va sans doute s’étendre en Côte d’Ivoire. Appartenir à une communauté mondiale d’entrepreneurs sociaux est aussi une opportunité de rencontres et de partage d’expériences.

Pour en savoir plus, c’est ici !

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