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La cathédrale de Strasbourg a déjà 1000 ans !

cathedrale strasbourg

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Diocèse de Strasbourg - publié le 12/09/14

Le Pape la visitera-t-il lors de sa visite au parlement ? La célèbre cathédrale fête son premier millénaire.

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Le Pape fera-t-il un virage par la cathédrale de Strasbourg lors de sa prochaine visite au Parlement Européen ? On ne peut que prier pour ! En attendant, vous pouvez déjà découvrir toutes les facettes des festivités du millénaire de la cathédrale de Strasbourg sur le site www.cathedrale-strasbourg-2015.fr. Et voici la retranscription du sermon de Mgr Grallet, archevêque de Strasbourg, lors de la messe d’ouverture du millénaire des fondations de la cathédrale :

« Pour le Seigneur, un jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour ». Frères et soeurs, il nous faut bien admettre que cette affirmation de la deuxième lettre de saint Pierre, si profondément vraie pour le Dieu créateur de l’univers, ne se vérifie pas pour les hommes. Un millénaire, c’est très long pour nous : dix siècles, plus de trente générations d’hommes… songeons que plus de soixante évêques se sont succédé sur le siège épiscopal de Strasbourg depuis Werner qui, en 1015, décida la construction d’une cathédrale sur de nouvelles fondations. Vous le savez, ces fondations sont celles-là même sur lesquelles fut édifiée plus tard la cathédrale gothique. Les fondations de notre cathédrale, celle dans laquelle nous nous retrouvons cet après-midi, ont bien mille ans.

Je voudrais avec vous commencer par méditer sur l’événement que nous commémorons. Ensuite, nous parcourrons –rapidement, je vous rassure– les mille ans d’histoire qui nous en séparent. Enfin, nous dégagerons la signification spirituelle de ce Millénaire.

L’événement de 1015
Nous avons bien peu de détails sur ce qui s’est passé en 1015. Grâce aux Annales de l’abbaye de Marbach, nous connaissons cependant l’essentiel : c’est cette année là que la cathédrale a, pour reprendre l’expression exacte, commencé à surgir de ses fondations.
C’est l’évêque Werner qui prit la décision de la construction. À la tête du diocèse depuis 1001, il connut, hélas, le grand incendie de l’an 1002 qui détruisit totalement l’édifice. La reconstruction ne fut pas immédiate. Sans doute l’évêque a-t-il suivi le conseil de Jésus, qui demande de s’asseoir, avant de construire une tour, pour savoir de quels moyens on dispose pour le faire. Or, la cathédrale de Werner avait très probablement DEUX tours…

Ce temps d’attente a été notamment mis à profit pour rassembler les moyens financiers nécessaires, mais aussi pour élaborer les plans. Les architectes durent calculer la profondeur des fondations, dans une terre alsacienne marquée par la proximité de la nappe phréatique. Là encore, Werner suivit la parole de Jésus qui conseille de ne pas bâtir sur le sable, mais sur le roc. Il l’a si bien fait que les fondations de 1015 ont été suffisantes pour supporter la reconstruction de l’édifice après le nouvel incendie de 1176. La meilleure preuve de cette priorité donnée aux fondations sur l’édifice lui-même, c’est qu’il ne reste plus aujourd’hui que les fondations de la cathédrale de Werner. Quelle belle leçon pour notre temps, qui privilégie si souvent la partie visible au détriment de la solidité des soubassements !

On est impressionné par les dimensions de l’édifice de 1015 : il était si vaste qu’il n’a pas été nécessaire, précisément, d’établir de nouvelles fondations deux siècles plus tard quand on a commencé à édifier la nef gothique : sa largeur de 16 mètres, augmentée des deux nefs latérales de dix mètres chacune, nous vient directement des plans de Werner. Ni le nombre des chanoines qui vivaient alors au chevet de la cathédrale, sur l’emplacement de l’actuel grand séminaire, ni même le nombre d’habitants de la ville de Strasbourg, ne nécessitaient une cathédrale aussi imposante. C’est un signe très fort de confiance que Werner a donc posé en 1015, quelques années après l’an Mil dont on dit qu’il suscita tant de peurs irrationnelles. Il a voulu bâtir une cathédrale capable d’abriter les fidèles du diocèse au-delà de la seule ville épiscopale : grâce à lui, aujourd’hui, nous pouvons accueillir des représentants des quatorze zones de l’actuel diocèse. Par ce geste de confiance en l’avenir, il ne bâtissait pas seulement pour son temps, mais pour les générations futures.

Werner n’a certainement pas pris sa décision tout seul. Il avait auprès de lui, pour le conseiller, cette communauté de chanoines présente depuis au moins deux siècles à l’ombre de la cathédrale, qui suivait la règle de saint Chrodegang de Metz, fréquentant plusieurs fois par jour le choeur de la cathédrale pour y chanter les psaumes de l’Office. Ce n’est pas pour rien, aujourd’hui, que cette messe a été précédée par une prière avec l’actuel chapitre, toujours chargé de l’intercession quotidienne aux intentions du diocèse.

Il y avait aussi les responsables publics. Ne m’en veuillez pas, Monsieur le Maire, de n’évoquer la Municipalité qu’à partir de la fameuse bataille de Hausbergen, en 1262, un siècle et demi plus tard, date où l’évêque perdit sa suzeraineté sur la Ville, et par là même, quelques années plus tard, la direction de l’Oeuvre Notre Dame, en charge de l’entretien architectural de la Cathédrale. Il n’y avait non plus ni préfet, ni assemblée générale ou départementale…En revanche, l’Alsace relevait à l’époque de l’Empire romain germanique et l’empereur de ce temps, Henri II, faisait preuve d’une telle piété que l’Eglise en fit un saint. De vieilles chroniques nous disent qu’il aurait même souhaité devenir chanoine dans la cathédrale de Strasbourg et il a, en tout cas, été représenté aux offices par l’occupant d’une stalle particulière jusqu’à la Révolution française ! On peut facilement en déduire que l’empereur saint Henri a assisté l’évêque Werner dans son projet de construction en 1015. Avec un peu d’anachronisme, nous voyons donc à l’oeuvre l’Eglise et l’Etat, toujours parties prenantes de l’entretien de la cathédrale.

Mille ans d’histoire
Vous l’avez constaté, notre messe a commencé par une démarche d’examen de conscience, dirigée par le chanoine Vogelweith, nommé pénitencier à la cathédrale, pour souligner l’importance de la pénitence et de la réconciliation dans notre vie chrétienne.
Pourquoi une telle démarche en ce jour festif et joyeux ? Précisément, parce que nous célébrons 1000 ans d’h
istoire mouvementée, d’événements lumineux, mais aussi d’événements regrettables. En rendant grâce pour les premiers et en faisant repentance pour les seconds, nous nous inscrivons dans la même démarche que saint Jean Paul II célébrant le Grand Jubilé de l’An 2000. Nous devons bien reconnaître que la mauvaise herbe de l’ivraie s’est trop souvent mêlée au bon grain de la moisson !
Nous reconnaissons comme un fruit de la grâce de Dieu l’admirable travail des architectes, des sculpteurs et des maçons, selon la parole du psaume : « Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les maçons ». Ils ont édifié là un chef d’oeuvre exceptionnel de notre patrimoine mondial, en raison de son audace, de son élégance, de la richesse de ses sculptures, de la splendeur de ses vitraux…
Au long des âges, les concepteurs de la cathédrale ont su admirablement exprimer les mystères de la foi chrétienne : je pense en particulier aux trois tympans de la façade, présentant le cycle de la naissance du Christ et celui de sa Passion et de sa Résurrection. Le troisième portail est dédié au thème du Jugement Dernier, si important au Moyen-âge et trop peu médité aujourd’hui. Pour magnifier ce thème, on a même conçu à Strasbourg une oeuvre unique, le Pilier des Anges, qui exprime le Jugement Dernier en trois dimensions : si l’on élève les yeux, on voit successivement les quatre évangélistes, qui ont annoncé la Bonne Nouvelle, les Anges qui contemplent la gloire de Dieu, et le Christ juge, au sommet du pilier.
Tout récemment, et j’en remercie aussi bien les autorités de la DRAC qui ont mené le chantier que celles de la Ville qui, de plus, ont réaménagé la place du Château, les vitraux du bas-côté Sud ont été pour ainsi dire sauvés de l’illisibilité : ils expriment aujourd’hui, magnifiquement, les scènes de la vie de Jésus.

Au titre des regrets à exprimer, évoquons la manière dont nos frères juifs ont été représentés au Moyen-âge, soit de manière individuelle, soit à travers la figure symbolique de la Synagogue du portail Sud qui, pour être un chef d’oeuvre de la sculpture, n’en est pas moins une présentation injuste de nos frères aînés dans la foi. Cette représentation participe d’une certaine manière de ce que le grand historien Jules Isaac dénoncera bien plus tard au saint pape Jean XXIII comme relevant de « l’enseignement du mépris ».

Lorsque la Réforme, il y a bientôt cinq cents ans, a entraîné une fracture dans la chrétienté d’Occident, Strasbourg se trouvait précisément sur la ligne de cette fracture. C’est ce qui a entraîné le passage de la cathédrale au culte luthérien pendant plus d’un siècle et demi, suivi d’une restitution autoritaire, par Louis XIV, au culte catholique. Au cours des cinq derniers siècles, jusqu’à Vatican II, que d’actes hostiles et de paroles désobligeantes entre catholiques et protestants se sont échangés dans notre belle Alsace !


Et que dire des déchirements entre la France et l’Allemagne qui ont placé l’Alsace au coeur de trois graves conflits en un siècle, dont la cathédrale a porté de graves cicatrices, surtout lors des bombardements prussien de 1871 et américain de 1944 ? La haine entre les peuples a hélas atteint son paroxysme au milieu du XX° siècle. Puisse le vitrail de la Vierge, offert par le Conseil de l’Europe, nous rappeler sans cesse les bienfaits de la réconciliation franco-allemande !
La célébration du Millénaire doit donc assumer l’histoire complète de la cathédrale, y compris les changements qu’elle a connus, aussi bien dans les confessions religieuses que dans les langues pratiquées ou les nationalités, aussi bien les heures tragiques que les heures glorieuses.

Le sens du Millénaire aujourd’hui
Venons maintenant, frères et soeurs, à la signification spirituelle du Millénaire d’aujourd’hui. Ce sens nous est livré par les textes bibliques qui ont été proclamés, issus de la liturgie de la Dédicace.
Dans sa belle prière à l’occasion de la consécration du temple de Jérusalem, Salomon prend bien soin de rappeler que Dieu ne s’enferme pas dans une maison de la terre, mais qu’il accepte de se laisser inviter chez les hommes qui l’accueillent. Telle est la signification de nos cathédrales et de nos églises qui ne deviennent « maison de Dieu » qu’à la condition d’accueillir des hommes, car Dieu vient alors à la rencontre de ceux qui s’y sont rassemblés.
Le livre de l’Apocalypse de saint Jean insiste à juste titre sur le caractère éphémère de toute construction humaine. Même si nous sommes très fiers que les fondations de notre cathédrale aient mille ans, nous reconnaissons la fragilité de toute construction terrestre. L’éternité n’est pas à chercher sur notre terre, où tout est destiné à s’user, à se transformer et à disparaître, mais dans le ciel, où la mort n’existe plus. Pour cette raison, nos liturgies ne sauraient simplement refléter les réalités terrestres. Par certains aspects, comme la beauté de la musique ou la fumée de l’encens, elles veulent déjà donner quelque chose à voir de la réalité céleste. Mais cela ne les empêche pas d’exprimer les préoccupations du monde tel qu’il existe aujourd’hui.
Et revoilà, dans l’Évangile, le temple de Salomon où Jésus est présent pour la fête de sa dédicace. Admirons l’attitude de Jésus vis-à-vis du Temple, qu’il fréquente régulièrement. Il loue la pauvre femme d’avoir fait un modeste don pour son entretien ; il participe à la fête annuelle de la dédicace ; il chasse les marchands qui défigurent à ses yeux l’ambiance de prière… Et pourtant, il avertir que ce temple connaîtra la destruction. Agissant ainsi, le Christ nous montre comment considérer nos églises : conjuguer un très grand respect des bâtiments avec la conviction de leur caractère précaire ; faire tout pour que les églises soient entretenues et belles, mais ne pas les confondre avec la vraie demeure de Dieu qui est au ciel.

Telle est la manière, frères et soeurs, dont nous vivrons ce Millénaire en venant en pèlerinage dans cette cathédrale. Nous ferons de nos démarches des temps forts de notre foi, des actes de conversion, de renaissance dans l’Esprit, de communion avec Dieu et avec nos frères. C’est toute notre vie chrétienne qui est pèlerinage, la cathédrale n’est qu’une étape, le but ultime est en Dieu, pour la vie éternelle.

Frères et Soeurs, mettons-nous donc en route, avec confiance, et pour la belle étape d’aujourd’hui, méditons les belles paroles qui ont précéd&ea
cute; la lecture de l’Évangile :
"Nous sommes une maison que Dieu construit,
Nous sommes un sanctuaire de Dieu,
Le sanctuaire de Dieu est saint
Et ce sanctuaire, c’est nous !"

† Jean-Pierre GRALLET
Archevêque de Strasbourg

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